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Une Souris et des Hommes
15 mars 2009

France/Guyane - Du côté de la nature: découvertes ornithologiques (2)

Le jardin des guyanais est la forêt amazonienne. Mais n'imaginez pas que c'est le seul paysage de ce DOM vert...hé oui, qui dit Guyane dit côte, et en cette belle journée du 5 mars, c'est dans un écosystème inédit pour moi - non pas en 5 mois de Guyane mais bien en 28 ans de vie - que j'ai réalisé ma première sortie à visée intégralement naturaliste, avec le GEPOG, association d'ornithologues. Quel est cet écosystème ?? En fait, il y en a deux. Le premier, qui sera le principal site d'observation, est une splendide vasière.         

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Le second est l'écosystème végétal qui pousse autour et évolue très rapidement: une mangrove.

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La côte guyanaise...découvrons là en citant ce très beau livre que je recommande à tout amoureux de la nature. 300 km, délimitée par deux estuaires (du Maroni et de l'Oyapock). Très influencé par le tout puissant Amazone, son littoral est particulièrement dynamique, évoluant sans cesse au gré de l'érosion, ou, au contraire, des dépôts de sédiments. Sauvage et difficile d'accès, le front de mer est le lieu de confrontation direct entre la mangrove et l'océan. Ce n'est qu'à de rares endroits qu'apparaissent des plages de sable...hé oui, la Guyane a de très belles plages, mais, je le découvre par cette lecture, elles sont loin d'être nombreuses. Surpris, maintenant je comprends enfin pourquoi les tortues viennent pondre seulement à quelques endroits du littoral...forcément! D'ailleurs, ça tombe bien, l'une de ses grandes plages est à 10 minutes en vélo de chez moi...Aussi, cette côte est avant tout l'occasion d'observer des concentrations importantes de limicoles...limicoles ? Du latin limicola, de limus, "vase, boue" et colere, "habiter"...et en cette belle fin de journée, c'est donc à marée basse que je vous emmène ausculter cette splendide vasière découverte par la mer. Comme quoi, la vase de mangrove ne sert pas seulement aux Natural Tribal !

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La vasière, interface physique périodique entre mangrove et océan

Cette belle vasière offre une nourriture abondante à nombre d'aigrettes. Ainsi, devant nous, observateurs du moment, se baladent et chassent, de manière caractéristique, de splendides aigrettes bleues. Habitante du nouveau monde, elles fréquentent en Guyane toute la zone côtière et semblent se limiter aux vasières du littoral, exception faite des rizières de la région de Mana. L'aigrette bleue, au même titre que tous les autres hérons de Guyane, est entièrement protégée en tout temps et en tout lieux.

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Sa "cousine" est l'aigrette tricolore. Elle se différencies de l'Aigrette bleue par son ventre entièrement blanc, et par son mode d'alimentation, une pêche à l'affut. Oiseau du Nouveau Monde, elle affectionne en Guyane les vasières, les mangroves et les criques soumises à l'influence des marées. Elle est également entièrement protégée.

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Une belle aigrette neigeuse chasse à la limite de la mangrove. Blanche de plumage, aux pattes et bec noirs, elle a aussi les pieds jaunes, tout comme une partie de peau nue à la base du bec.   

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Autre joli héron du littoral guyanais mais présent dans beaucoup de pays du monde, le Bihoreau violacé. Héron qui, lorsqu'il n'est pas persécuté, peut être très familier et nicher en pleine ville ou dans des parcs très fréquentés, comme à Georgetown au Guyana.

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Alors que je reste admiratif devant ces somptueuses aigrettes, mon regard se tourne vers la droite, à l'arrivée d'une population de mouettes...accompagnant, comme souvent, un pêcheur venu chercher son repas. Combien d'espèces peut on y voir ?? Petit jeu...la réponse est déjà citée. Alors ? Je suis sur que les écologues amateurs l'auront deviné...Une seule ! Hé oui, en écologie fondamentale, une population désigne l'ensemble des individus d'une même espèce qui occupent simultanément le même milieu. Et je suis certain de ma réponse: il n'y a qu'une seule espèce de mouette en Guyane, la mouette atricille. Fidèle compagne des pêcheurs guyanais, elle profite en particulier des très nombreux déchets rejetés par les crevettiers qui relâchent environ 90 kg de poissons morts pour seulement 10 kg de crevettes prélevées.   

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Mais revenons à nos limicoles. Voilà un petit oiseau fort sympathique à observer, le bécasseau semipalmé. Sans aucun doute, ce bécasseau est le limicole le plus abondant en Guyane, présent par centaines de milliers aux époques les plus favorables. Grand migrateur se reproduisant dans l'extrême nord de l'Amérique (Alaska), ses effectifs sont, selon l'ornithologue présent en cette soirée, en chute libre...problème de disparition de son habitat. Sa manière de sonder la vase avec son bec pour chasser est plutôt marrante à regarder.

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La parole est lancée: "regardez là-haut, en voilà". Je lève la tête, et les vois. Je prends une photo, que je recadre, puis je colle mes yeux à ma paire de jumelle. Majestueux. 4 ibis rouges en vol. L' ibis rouge, un des symboles de la Guyane. Splendides. Un plumage remarquable, un bec en courbe caractéristique. En Guyane, ils se rencontrent presque exclusivement sur les vasières et lagunes littorales, et dans la mangrove en front de mer, et les estuaires. Considéré comme un gibier jusqu'à 1984, très chassé, on en trouvait sur les marchés guyanais et dans de nombreux restaurants. Chassé en second lieu pour son plumage, il a ainsi failli disparaître de la Guyane. Aujourd'hui protégé par arrêté ministériel, le statut de l'espèce reste cependant précaire en Guyane (4500 couples en 1995). Voila d'autres infos.

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Les observations ne s'arrêtent pas là, mais toutes ne sont pas photographiées..grande aigrette, spatule, moucherolle pie, balbuzard pêcheur sont d'autres espèces observées en cette belle soirée de mars. Ce moment précieux, terminé par une averse, restera dans ma mémoire. Un moment simple et accessible à tous, qui rendra certains insensibles mais qui suffit à véhiculer en moi de belles d'émotions. Voir ce monde naturel évoluer dans son milieu, découvrir et ressentir cette nature si présente en Guyane, profiter de ce séjour pour vivre davantage l'ornithologie, observer des nouvelles espèces, rencontrer des passionnés locaux. Cela ne demande pas d'argent et suffit largement à embellir mon séjour. D'ailleurs, cette première excursion me décide à ne plus laisser passer de temps: j'adhère au GEPOG pour réaliser le plus possible d'excursions ornithologiques, et sans doute également à la SEPANGUY, une autre association qui organise plutôt des sorties plantes et insectes. De beaux moments en perspective...          

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Et la mangrove continue de se déplacer sur les bancs de vase...

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19 avril 2009

France/Guyane - La conservation des tortues marines: luthons !

Ou comment allier plage et travail bénévole ponctuel. Hé oui, derrière cette liaison dangereuse se trouve une réelle possibilité d'actions utiles pour la protection d'une faune rare et menacée: les tortues marines. En effet, peut-être sais-tu, lecteur ou lectrice, que les plages de Guyane sont des sites de pontes de trois espèces de tortues marines: la tortue verte, la tortue olivâtre et la reine de tortues marines, la tortue luth.   

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Mon adhésion au GEPOG, association d'ornithologue, m'a en effet permis de prendre connaissance, par le biais des lettres d'informations, de l'association Kwata, une autre assoc' travaillant particulièrement sur la connaissance et la conservation des tortues marines de Guyane. Revenons sur ce week-end de découvertes étonnantes.

Samedi 18 avril 2009 après-midi - Balade sur la plage de Rémire-Montjoly

Les plages de Rémire-Montjoly, commune plutôt huppée de l'île de Cayenne. Des plages peu fréquentées et ainsi restées à l'état sauvage donc naturel, modelées par la force des vagues au fil des mois. Des plages ainsi préservées, une eau agitée, charriant les sédiments de l'Amazone et ainsi considérées comme désagréables et peu attrayantes pour le tourisme de masse.

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Une petite balade s'impose en cet bel après-midi et me permet de découvrir de nombreux œufs de tortues éclos dans les années précédentes...Ils ont été ressorties par l' arrivée des tortues de cette année, qui en préparant leur site de ponte creusent parfois pour enfouir leurs oeufs à 60-80 cm (tortues luth). J'avais cru dans un premier temps que des éclosions avaient déjà eu lieues, ou au contraire que les chiens errants étaient responsables de ces pertes. Sales bêtes.   

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Les aigrettes sont au rendez-vous, alors que des prises de vue originales sont possibles.

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Le retour à la voiture se fit tout de même en découvrant 3 serpents à quelques mètres d'intervalle, au milieu des flaques sous la végétation ci-dessus. 3, rien que ça !   les ados brésiliens qui suivaient n'ont pas semblé le craindre...

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Dimanche 19 avril matin - Formation au comptage des sites de pontes des tortues marines               

Dimanche 19 avril, 7h30. Le soleil est doux, le vent agréable, je suis sur la plage et vais apprendre à reconnaître et compter correctement les sites de pontes des trois espèces de tortues marines de Guyane. Un réel engouement. Je tenais à faire un brin de bénévolat avec une association locale, et ce sera donc avec Kwata. Dans un des lieux à la diversité biologique la plus riche de la planète, il serait dommage de passer à coté de ce genre d'occasions,et mettre en pratique quelques enseignements théoriques sur l'écologie! Je rencontre Eddy, un salarié de l'association qui a lâché son travail pour se lancer dans les programmes de conservation de Kwata à temps plein.

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Ponte d'une tortue verte, ponte d'une tortue luth. Deux styles différents, et donc reconnaissables. Après quelques généralités, on apprend à reconnaître les sites, et c'est parti pour un "scan" de l'ensemble de la plage. Sous la pluie, comme sous le beau-temps.

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Site de ponte d'une tortue luth - Notez les traces encore fraîches de sortie et retour  à l'eau

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Site de ponte d'une tortue verte - l'espèce s'enterre presque entièrement pour pondre

La saison des pontes est encore à son début, celle des tortues olivâtres n'a pas encore débuté. Cette première matinée de bénévolat me permet de découvrir quelques données sur les tortues marines, qui comptent seulement 7 espèces. Je découvre par exemple avec étonnement que les Luth traversent l'atlantique. Il arrive que certains spécimens "enregistrés" (à l'aide d'une puce) au Canada viennent pondre en Guyane ! Comme quoi on peut voyager écologique, il suffit de manger des méduses et d'éviter la pollution alimentaire par les sacs plastiques.

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Suite au contrôle de toutes les plages de Rémire-Montjoly, je m'approche d'un spécimen de tortue luth échoué mort la veille. Impressionnant. 400 kg à traîner sur le sable, pour parfois avoir peur des touristes flashant leur tête, être attaqué par des chiens errants - heureusement, la création récente d'un chenil à Cayenne va diminuer le nombre de sites dévastés par ceux-ci, environ 150 en 2008 - voire braconnés, tout simplement. En l'occurrence, ce spécimen sera surement enlevé (explosé ?) par les pompiers...à moins que les vautours "locaux", les urubus noirs, en fassent leur affaire...

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Pour conclure sur une note plus optimiste, il s'avère que les pontes de tortues luth en Guyane explosent depuis deux ans, et semblent bien parties pour suivre le rythme cette année. Alors qu' environ 400-500 pontes étaient répertoriées il y a dix ans, il y en a eu 5000 en 2007 et 6000 en 2008, selon les dires de notre formateur. Les raisons sont bien sur mal connues, politique de conservation, diminution des prédateurs (requins, orques) ou plus globalement modification de l'équilibre écologique global sont évoquées (cela en fera sourire certains...). Pourvu que ça dure! 

4 août 2009

France/Guyane - Hamsterminé en Amazonie !

Drôle de titre à connotation amicale et émotionnelle...mais en cette soirée étonnante  du 10 juillet 2009, bercée par la musique de la femme de ma vie musicale, Lila Downs, je décidai de  faire un petit break dans cette pause réelle à mon monde virtuel. Un peu de relecture, le temps qui file: l'article n'est publié qu' aujourd'hui mais a bien été écrit majoritairement à l'époque, en cette soirée dramatique.

10/07/09. Ce soir, je viens vous parler d'une histoire de rat mort. Actuellement, je sous-loue une maison pour l'été, et dois surtout nourrir les quelques  animaux du propriétaire: 4 cages avec des hamsters et souris, une tortue et trois chiens dont le seul but sur cette planète est d'aboyer en cas de présence. Quatre cages à surveiller...mettre de l'eau, regarder ces rongeurs se balader dans tous les sens, avoir les yeux pétillants de plaisir de vivre, car pour vivre heureux, vivons cagés. La vie d'un hamster est elle si simple dans la nature ? En cage, une vie paisible et sans problèmes. Et pourtant.

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Photo: la cage d'un hamster. Sans hamster.

Une des quatre cages  semble vide. J'ouvre la grille, je soulève les caches possibles, je soulève la paille:  ma main le frôle, je bondis légèrement en arrière. Et pourtant, j'aurais dû m'en douter. Le propriétaire m'avait prévenu: "il" viendrait peut être. "il" est là.

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Photo: "Il" est bien là.

Quelle utilité de titrer chaque photo ?? C'est simple ! Le titre exprime l'état émotionnel et cognitif par lequel je suis passé ! Alors à vos émotions. Seb Caillot, prépare les anxiolytiques.

L'enquête est donc très vite élucidé. Il est venu, et le hamster est mort. Le hamster est mort, vive le hamster! Il me permettra de dire à mes petits enfants, un jour peut être, qu'en ce 10 juillet 2009, je me suis retrouvé nez à nez avec un BOA ARC-EN-CIEL dans la cage du hamster que je devais nourrir. Un petit boa, cousin de celui qui deviendra l'un des plus grands serpents du monde, le constrictor, qui est venu se nourrir et nourrir en moi bons nombres d'émotions: sursaut de peur lorsqu'en soulevant la paille je suis tombé nez à nez avec lui, joie de voir celui qui était connu du propriétaire, joie de faire des photos marrantes, peur de son agilité, excitation à l'idée de le photographier en macro, bref, tout ça à la fois et dans le désordre.

Un boa arc-en-ciel est donc venu bouffer 1 hamster dans sa cage sur la terrasse de  ma maison.  Caillot, avale les anxiolytiques, voilà les photos.

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Photo 4 - Je l'avais dit: "IL" ÉTAIT LA

Je prends un objet de taille suffisante pour ne pas trop approcher mes mains, et enlève la paille autour de lui. A ce moment là, je ne sais pas du tout quel peut être la réaction de cette espèce, que je ne connais que par le nom. Vif ? Agressif ? Je sais seulement que c'est très probablement un boa, car j'avais discuté de ce petit délinquant récidiviste avec le propriétaire. Qui dit boa dit non venimeux, mais y a t'il des exceptions ?  La paille se dérobe, l'animal se dévoile à moi...il est tout petit pour un boa mais fait déjà une belle taille, a une joli petite bouille mais me fous quand-même sacrément la frousse.

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Photo 5 - Proverbe guyanais: "Un boa, c'est un peu comme une femme étouffante, on s'en débarrasse pas facilement."

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Photo 6 - Jusqu'où est ce que j'ose approcher mon appareil ?

Karine, il est pas trop chian ton mari en ce moment même ?

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Photo 7 - Repas du soir ? Boa sauce chien hamster avec patates et rhum

Après quelques minutes de photos sous haute surveillance, je me décide à renverser la cage pour photographier l'animal depuis d'autres points de vue.

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Photo 8 - Petit boa deviendra grand (1.20 mètres pour certains spécimens)

Seb, fous pas le feu à ta maison, le serpent, il n'est pas chez toi ! Touche pas à la colle, il n'est pas chez toi ce boa!!! Karine, fais lui une piqure de calmant. Résumé:

Étape 1: Cayenne, Guyane, juillet 2009: un hamster mange des graines, paisible

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Étape 2: Cayenne, Guyane, juillet 2009: une chaussette sale provoque le boa qui a avalé le hamster

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Étape 3: Bonneville, Haute-Savoie (à 8000 km), août 2009: un incendie d'origine humaine détruit une partie de la ville, sans faire de blessés: tous les habitants sont dans le sud.

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Cet effet papillon boa, je le dédicace à mon pote Seb Caillot, avec qui j'ai eu une bonne discussion à propos de sa frousse des serpents en compagnie de quelques autres potes, juste avant mon départ en Guyane !

22 octobre 2009

France/Guyane - Bénévolat "Tortues": synthèse d'une belle expérience !

Apprendre à protéger l’environnement assis sur une chaise d’école dans le pays le plus compétitif du monde est une chose, agir concrètement pour la protection de la nature dans un DOM à forte biodiversité mais où ¼ de la population vit avec moins de 500 euros par mois est également une source de réflexion intéressante. Aussi, je tenais lors de ce séjour à me faire une expérience de terrain et à visée naturaliste, et c'est dans ce but que je rejoignais l’association Kwata, qui s’occupe notamment d’un programme de conservation des tortues marines de Guyane. Une activité bénévole ponctuelle mais régulière, les samedi et/ou dimanche matin entre avril et août. Profiter des kilomètres de plages de Cayenne à allure vive tout en faisant une action à priori utile, apprendre à connaître l’écologie de ces espèces en voie d’extinction et absentes des plages de l' Europe continentale, créer un réseau de contacts dans le milieu associatif de Guyane, et essayer de voir cette problématique dans le contexte sud-américain: voilà quels étaient les buts de cette expérience atypique et enrichissante.   

 

Découvrir les plages de Cayenne et Montjoly

8 km de plages à contrôler tous les matins par le salarié de l’association, et les bénévoles. L’objectif: compter le nombre de sites de ponte de la nuit. Le comptage des sites et donc des tortues venues pondre sur une nuit et à terme une saison permet de voir les évolutions au fil des ans, et n’est bien sur qu’une des composantes du programme de conservation. Ces plages de l’île de Cayenne: naturelles, préservées, authentiques: s’y promener tôt le matin est un de ces petits bonheur que la vie guyanaise peut offrir. Bien sur, ce ne sont pas les plages touristiques des antilles, mais cette préservation et cette authenticité les rendent plus qu’agréables. 

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Le dernier week-end de juin: exceptionnel !

Exceptionnel car riche en évènements insolites. Le vendredi soir, dédié à une soirée d’animation des plages auprès du grand public. Après une discussion à la tonalité élevée avec un ami sur le rôle et l’utilité de ces association naturalistes, je découvrais les joies d’une première expérience dans l’animation des sites de pontes en binôme. Objectif: expliquer aux promeneurs les différentes étapes de la ponte, et plus généralement l’écologie des tortues marines et les mesures prises pour les conserver. Soirée enrichissante, qui me permit de discuter avec de nombreuses personnes, la majorité très à l’écoute et désireuses d’en savoir plus, qu’elles soient métropolitaines, guyanaises ou antillaises, de passage ou installées ici. Des animations ainsi utiles, à condition de ne pas faire la police et de prévenir avec le sourire. Soirée animation, mais ce n’est pas tout. Découverte du marquage des tortues olivâtres, programme financé par l’Europe et le WWF notamment et qui a pour but de développer les connaissances sur l'écologie des olivâtres, la plus petite des 7 espèces de tortues marines dans le monde. Le marquage d’une tortue olivâtre, une petite maîtrise à développer, mais réservé aux salariés. Pour ou contre? Mon seul avis est que cette espèce est également très menacée, que la Guyane possède des moyens et est un lieu de ponte primordiale pour cette population en Amérique du Sud: alors pour! Une facette du programme de conservation probablement utile à la vue des analyses qui ressortent déjà des données produites. Animation, assistance au marquage, et découverte en quelques minutes des trois espèces de tortues guyanaises (luth, olivâtre et verte) en train de pondre à quelques mètres d'intervalle. Beau moment nature, sans aucun doute.

Samedi matin: comptage des sites de pontes de la nuit, différenciation entre les espèces, évaluation des traces, comptages des demi-tours, parfois de nids ou individus attaqués par des chiens errants (photos 1 et 2) ou braconnés (photo 3). Deux menaces anthropiques, parmi de nombreuses autres: attaque des nouveaux-nés par les ratons crabiers, par les urubus (photo  4),  la buse buson (photo 5, notez la tortue dans la serre de gauche), puis, dans l’eau, par les dauphins (photo 6), poissons et autres dents de la mer. Le nid en lui même est parfois érodé par les vagues ou déterré par d’autres tortues en train de pondre.

 

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Nid en voie de destruction par l'érosion des plages

 

Mais en plus d’une matinée ordinaire, le téléphone sonne et nous voilà embarqués dans le sauvetage d’une tortue luth adulte. Hé oui, encore une menace que sont les enrochements des plages. Cette tortue, de belle taille, s’est retrouvé en dessus de l’enrochement et est allé droit vers la mer après la ponte. Résultat: coincée sur une roche et éraflée par le frottement contre les pierres.

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La solution : lui passer une corde sous les nageoires et tirer pour faire pivoter ses 400 kg et la remettre dans la bonne direction.  Une petite synthèse de cet étonnant sauvetage est écrite ici et se résume dans les photos ci-jointes.

 

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Tortue sauvée, et tout le monde en était content...ma petite synthèse à moi se trouve dans la photo ci-dessous, que je dédicace à certains potes qui se reconnaîtront!

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La matinée continue, et me voilà cette fois nez-à-nez avec la vie dans toute son évolution: de l’œuf à l’adulte en passant par les bébés émergents. La tortue, en pondant, a en effet déterrée des bébés et des oeufs !

 

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La vie extramarine: quand l'une dort, l'autre pleure !

Quelle difficulté pour ces reptiles marins de trainer leur poids sur le sable et d'affronter un moment de risque très important. L'effort physique est important, notamment pour les tortues Luth, qui doivent trainer 400 kg. Cette tortue, grande nageuse capable de traverser l'atlantique ou de remonter jusqu'aux côtes du Canada depuis ici, a la particularité de souffler fortement et "pleurer" lors de ses pontes. Il s'agit en fait d'un mucus produit par des glandes occulaires et qui lui permet de les lubrifier et surtout d'éliminer l'excédent de sel de son corps qu'elle accumule dans l'eau. L'une pleure...et l'autre dort ! La tortue olivâtre, qui avec son poids d'environ 36 kg et sa petite taille, est bien plus rapide sur le sable, a la particularité de parfois s'endormir pendant la ponte !

 

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Tortue olivâtre endormie sur son trou...vous, ça vous est déja arrivé ? :)

 

Cette tortue, peureuse, possède un comportement grégaire. Parmi les différentes stratégies de ponte connues chez les tortues marines, celle-ci est la plus impressionnante. Dans les régions du monde où elles sont très présentes, leur comportement grégaire se traduit par la sortie simultanée de plusieurs dizaines à milliers de femelles la même nuit, sur le même site. Ce phénomène, appelé arribada, peut être observé notamment sur les côtes du pacifique d'Amérique Centrale. En Guyane, le nombre de tortues est bien plus faible, mais des petits pics de ponte existent.

 

 

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Les émergences: en route pour l'aventure !

L’émergence. Naissance d’une vie qui sera souvent très courte. 1 tortue luth sur 1000 arrivera à l'âge adulte, et en tenant compte des facteurs anthropiques, ce chiffre n'est plus estimé qu'à 1/5000. L'émergence. un beau moment que de voir ces toutes petites tortues avancer à pas de géants vers un océan de danger...trouver l'océan peut déja s'avérer compliqué, ne serait-ce qu'à cause de la pollution lumineuse. C'est sans doute pour cela que ces trois petites Luth sont allées dans la rivière longeant la plage que j'oscultais.

  

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Tortue Luth devant un océan de danger...

 

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Traces de vie sur un désert minéral

 

Réflexions sur la protection des tortues marines en Guyane

Les sorties régulières des matinées de week-end à compter les sites de pontes m'ont permis de rencontrer de nombreuses personnes et d'échanger sur la problématique de conservation des tortues marines en Guyane. Hé oui, car parfois le débat est animé, entre des personnes voyant les naturalistes comme des mains de Dieu ou les personnes, qui, trop alcoolisées, vont jusqu’à monter sur les tortues en train de pondre. Tout le monde n'est pas d'accord sur l'utilité de la protection de ces espèces, dans un DOM ou 90% du territoire est de la forêt primaire domaniale et où le chômage bât son plein. Cependant, j’ai aussi rencontré des personnes des Antilles, de Guyane, du Guyana, du Brésil, totalement pour les mesures de protection et de conservation, et ces personnes là étaient au final nettement majoritaires. Les discussions que j’ai pu avoir étaient intéressantes et vraiment constructives, la plupart du temps. La valeur intrinsèque de ces espèces préhistoriques est évidente, mais il serait erronée d’oublier le rôle culturel, économique et touristique qu’ont joué et que jouent les tortues marines pour la Guyane. Véritable symbole nature de ce département, les voir arriver en nombre de plus en plus élevé sur les plages de Cayenne ne peut pas faire de mal au tourisme, et à la préservation de ces littoraux dont les eaux marrons ne permettront pas d'attirer le tourisme balnéaire en masse. Aussi, je pense que la conservation de ces trois espèces en danger d’extinction est un programme d’utilité réelle pour la Guyane, et certainement pas le contraire. Le braconnage? Un pêcheur guyanien que je connais, braconne parfois une à deux tortues qu'il trouve dans ses filets. Clandestin plus où moins partout ou il est passé, il pense à se protéger avant de protéger la nature. Se protéger, en mangeant une ou deux tortues. En protégeant les espèces naturelles, « ils » nous vendent leur poulet » dit il. D'accord, mais le projet TAMAR au Brésil montre que des solutions alternatives à la pêche artisanale de tortues sont possibles. Ce projet mérite une attention particulière par son envergure et ses résultats. Un exemple de développement basé sur la conservation de la biodiversité. Débuté en 1980 par deux océanographes brésiliens, alors que leur pays était le seul pays du continent américain à ne rien faire pour la conservation de la faune marine, il a permis, semble t'il,  d'améliorer le niveau de vie de nombreuses familles de pêcheurs, par la mise en place de 22 stations de suivi des tortues marines sur une distance de 1000 km de côtes brésiliennes, au sein de 8 Etats. 90% des personnes travaillant aujourd'hui au sein des stations sont des membres originaires de ces villages qui, 30 ans plus tôt, vivaient notamment de la pêche des tortues. En 20 ans, de nombreuses connaissances scientifiques sur ces espèces ont été produites, et c'est près de 8 millions de tortues juvéniles qui auraient été remises à l'eau. Alors, une réussite totale ? Seules les personnes complètement concernées par les retombées économiques de ce projet peuvent vraiment le dire.

 

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Jeune tortue luth sur une plage de Montjoly

 

Dans l’ouest guyanais, un aspect culturel fort vient en plus s’immiscer dans la problématique de conservation des tortues de Guyane à travers l’histoire mêlée entre Awala-Yalimapo et les tortues. Dans cette commune amérindienne, les oeufs étaient auparavant traditionnellement consommés, la chair de tortues utilisée pour la pêche, et les tortues vivantes étaient vendues à l’administration pénitentiaire. Avec la fin du bagne et l’apparition des filets, les personnes amérindiennes arrêtèrent en 1955 de chasser les tortues, mais la consommation des oeufs était alors très fréquente. Puis sont arrivés les scientifiques dans les années 1970. La suite, je le copie-colle de ce bouquin du WWF « la tortue luth » qui cite Daniel William, chef coutumier d’Awala-Yalimapo. « Quand je me souviens de ces premiers efforts, je me dis que personne ne pensait à l’époque que cela allait devenir contraignant pour la communauté. On se disait qu’après quelques années, tout ce suivi allait s’arrêter. Mais autour de ce travail, il y a eu des articles, des publicités, et les touristes sont arrivés. Quand il y a eu l’éclosion de l’écloserie, les gens sont alors venus très nombreux. En parallèle, les équipes se sont renforcées avec des étudiants et des volontaires, et nombreux sont ceux qui ont trouvé du travail en Guyane grâce à cela. Aujourd’hui, les choses ont profondément changé autour de la question des tortues marines. L’administration a interdit des activités qui étaient libres auparavant. On voit maintenant des gens armés sur les plages, on envoie des jeunes qui prélèvent des oeufs au tribunal et notre loi coutumière est contredite par des lois plus récentes. Il existe aussi des retombées positives autour des tortues marines, mais elles sont insuffisantes. Les bénéficiaires sont souvent hors de la communauté, et que laissent les touristes après leur passage ? Il est dommage que les associations locales à Awala-Yalimapo ne se lancent pas dans l’accueil des visiteurs, alors que de nombreux jeunes sont sans emploi. J’espère qu’à l’avenir, les jeunes ne resteront pas oisifs, je souhaite qu’ils s’impliquent. Il faut que les acteurs de la zone appuie ces initiatives, et les orientent. Il y a trop de projets qui ne visent que le court terme. Dans ce domaine, il reste beaucoup de choses à faire.»

 

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Retour à la liberté... 

20 décembre 2009

France/Guyane - Une journée à Montsinéry-Tonnégrande

Montsinery: petite commune rurale à proximité de Cayenne et en pleine expansion. Une commune composée également du bourg de Tonnégrande, mais ce n'est pas là, que je passais une belle journée, la première de mes vacances estivales d'août 09 en compagnie de mes parents, fraîchement débarqués de France métropolitaine pour découvrir la Guyane. En plus, Marion, une amie de longue date, elle-aussi en vacances à Kourou, et voilà 5 hauts-savoyards en force pour découvrir le bourg, sa crique et son zoo. Un bourg assez typique des autres bourgs ruraux de Guyane, et agréable à visiter. Mais comment mieux commencer cette journée que par une baignade à la crique patate, belle, naturelle et très prisée le week-end, paraît-il. Un petit arrêt pour apprécier la verdure d'une culture fourragère devant une végétation luxuriante splendide, et nous y sommes!

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Comment mieux débuter des vacances en Guyane qu'en mangeant en terrasse au bord du fleuve traversant le bourg. Un vieux rhum pour déguster des plats de recettes locales, alors qu'un pêcheur semble vérifier ses prises au filet.

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Découvrir le zoo de Guyane, une possibilité unique d'apercevoir dans une même journée nombre d'espèces fameuses d'Amazonie, et toutes les légendes qui en découlent. L'occasion de faire une petite balade dans une canopée de petite taille, de voir différentes espèces de mammifères arboricoles, de plantes, d'oiseaux...et de découvrir quelques animaux parmi les plus grands prédateurs d'Amérique du Sud. Hé oui, en effet il n'est pas si habituel de découvrir de beaux serpents, caïmans et autres félins dans la nature, mais quelques anecdotes, entendues de mes propres oreilles, valent le détour.

Le Jaguar. Plus grand félin d'Amérique, il est un des autres animaux sur lequel travaille l'association kwata. Se rappeler qu'il s'agit d'un des prédateurs de la tortue luth, à même les plages, laisse l'interlocuteur l'imaginer au bout de son jardin, à l'orée de la forêt. Et ce n'est pas faux. Combien d'anecdotes ai-je entendu à propos de rencontres entre l'homme et le jaguar? Parmi les plus étonnantes, les plus inquiétantes devrait-on dire, que penser de cette histoire d'école, ou l'ensemble des gamins sortant de leur classe, dans une école du fleuve Maroni, se retrouvèrent dans la cour en compagnie d'un jaguar? ou comment ne pas vivre l'émotion d'une personne se retrouvant face à lui. L'homme et le jaguar...Mon pote de kwata n'en a pas peur, même s'il le dit: entre nous, c'est lui le maître. En ayant  "bénévolé" avec des tortues, moi je me disais plutôt: entre nous, c'est moi le maître. Hé hé ! Ceci dit, la palme de l'anecdote reviendra à cet autre salarié, qui, courant novembre 09, lors d'une sortie "jaguar" justement (pose d'appareils photos selon un échantillonnage précis en forêt) tomba nez à nez avec un spécimen l'observant à quelques mètres alors qu'il était accroupi, le pantalon baissé... Ce jour là, il a dû, pendant quelques secondes certainement très longues, se rappeler du sketch de Bigard, "les grands moments de solitude"! Plus sérieusement, certains connaisseurs, dont mon pote technicien de kwata, affirment que ce félin n'est pas réellement à craindre. Plus curieux qu'autre chose, il est fréquent qu'il ait été pris par les appareils photos de kwata seulement quelques minutes après que ceux ci aient été installés...regarde bien derrière toi, car le jaguar, lui, sait où tu es !

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L'anaconda. Autre grand prédateur sud-américain, le plus grand serpent du monde peut en effet être très grand, comme le montre cette photo trouvée sur la toile (ici).

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Aucun spécimen observé en un an de Guyane, mais ce n'est pourtant pas si rare que cela...pour le voir, il faut savoir vivre près des criques! Aussi, lorsque vous sentez une odeur de poisson à proximité d'une rivière, pensez "anaconda à proximité" et non pas "acoupa sauce maracudja"! Hé oui, il dégagerait une odeur typique. Bon à savoir donc ! Dans le village amérindien de Trois-Sauts, reculée en pleine forêt et ou j'ai eu l'inestimable chance d'aller dans le cadre de mon année de volontaire civil, il est assez fréquent de voir ces serpents sources de légendes. Mais, pour relativiser les "on dit" ou plutôt les "on suppose après avoir vu un énième film épouvante à la con", il n'y a pas eu d'attaques de l'espèce sur les habitants du village depuis des années, alors que l'ensemble des personnes s'approchent des eaux du fleuve probablement quotidiennement. De quoi relativiser le danger. Le spécimen du zoo était quand à lui bien réveillé...même pas peur ! 

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Deux grands prédateurs d'Amazonie, rencontrés au fil de la balade parmi de nombreuses espèces de la faune de cette région à grande biodiversité: tortues, serpents et autres reptiles, mammifères (tapir, tamanoir, coatis roux etc), singes (atèles, tamarins, capucins etc).

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Podocnémide géante, plus grande tortue du sous-continent sud-américain

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  Coatis roux, cousins sud-américains du raton laveur

Et puis bien sur, de nombreux oiseaux, allant des perroquets aux grands aigles amazoniens. Parmi ceux-ci, citons tout particulièrement le Harpie féroce, énorme aigle de la forêt amazonienne et oiseau emblématique de la Guyane, au même titre que l'ibis rouge ou les toucans. Emblématique, mais difficile à observer dans la nature. Ce rapace, l'un des plus puissants, splendide, est capable de dévorer des proies de tailles acceptable: aras, iguanes, agoutis...et même paresseux. Pour le naturaliste, un appeau possible du paresseux peut justement être le cri de cet aigle.

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Harpie féroce, un des plus puissants aigles du monde

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Caïque Maïpourri, petit perroquet amazonien

Cette petite commune rurale du bassin de Cayenne offre ainsi un certain nombre d'opportunités au visiteur d'un jour: baignade en crique ou fleuve, balades dans le bourg, en savane ou en forêt, gastronomie de qualité et zoo. Une étape à ne pas manquer, pour tout habitant et tout vacancier de passage.

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2 janvier 2010

France/Guyane - Ecologie: les salines de Montjoly

Les salines de Montjoly: une diversité d'écosystèmes connectés sur une faible distance, pour le plus grand plaisir des promeneurs, naturalistes et autres écologues! Située à 10 km du centre-ville de la préfecture, cette zone de promenade habituelle des habitants de l'île de Cayenne permet en effet de découvrir plusieurs milieux protégés. Cette zone n'a jamais été aménagée pour l'exploitation de sel, malgré son nom, et est préservée notamment grâce aux actions du Conservatoire du littoral. Zone humide remarquable, elle peut être découpée transversalement selon le schéma suivant (provenant d'un mémoire étudiant):

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Alors c'est parti pour une balade accompagnée de commentaires issus notamment du site web consacré aux salines...C'est tout d'abord en longeant le sentier situé en bout du cordon dunaire, constitué d'une végétation typique, que la balade commence...végétation typique des milieux sableux, notamment ces fameuses ipomées très présentes sur les plages de Cayenne, et qui jouent un rôle important dans la stabilisation du cordon, à la fois sur les plans géotechnique et éolien.

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Ipomées. Les racines, qu'on aperçoit grâce à la tortue qui a creusé le trou, stabilisent l'ensemble du cordon dunaire, peu ou pas attaqué par l'érosion des vagues.

Le sentier, situé en plein cordon sableux, offre la possibilité d'observer une faune et une flore intéressante. Ipomées donc, mais aussi divers types de palmiers. La faune est également particulière, tant l'avifaune (anis, tyrans) que l'on peut observée à  gauche, ou cette tortue olivâtre à droite.

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Faune et flore du cordon dunaire ne seront pas identiques à celles de la mangrove ou des marais

Le sentier continue et nous amène progressivement au marais d'eau douce situé plus à l'intérieur des terres. Au moment de la balade, en début de saison sèche, le marais prédominant est un marais à Eleocharis mutata (lagune). Il est possible d'y voir une flore composée de nénuphars, de jacinthes d'eau ou encore de lentilles d'eau. La faune y est également différente, avec de nombreux limicoles (aigrettes par exemple) et des passereaux. Le deuxième  type de marais rencontré est tourbeux à végétation herbacée.

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Le chemin se poursuit et nous amène maintenant sur une voie aménagée en plein cœur d'une mangrove. La seule voie aménagée au cœur d'une mangrove en Guyane. Cet écosystème abrite plusieurs espèces de palétuviers, et a la particularité d'être soumis aux flux de marées. Aussi, elle présente un substrat gorgé d'eau, instable, salée et pauvre en oxygène.

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Cet écosystème est étroitement lié aux bancs de vase. Forêt mobile couvrant la majorité du littoral guyanais, elle disparait en même temps que les mouvements du substrats vaseux, pour se former plus loin, à partir de la dissémination des graines de palétuviers par flottaison.

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Un moment saisissant, qui nous amène à l'exutoire ouvert, liant les eaux des salines aux eaux océaniques, et ainsi à la fin du sentier. Le retour par la plage peut être, en ce mois d'août, l'occasion d'observer des émergences. Cette balade est très intéressante. Facile d'accès, très tranquille, elle offre une belle solution de promenade du dimanche pour petits et grands. Elle permet également d'observer différents milieux liés en termes écologiques et hydrauliques, comme le montre les schémas ci-dessous. A ne pas manquer.

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Fonctionnement hydraulique (saison des pluies)

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Fonctionnement hydraulique (saison sèche)

13 février 2010

France/Guyane - Les îles du Salut: enfer, Club Med et paradis tropical

Le courant des Guyanes transporte jusqu'à 20% de la charge sédimentaire de l'Amazone et entraîne la formation des bancs de vase qui donnent naissance à la couleur chocolat des eaux du littoral guyanais. Mais à quelques kilomètres de ces littoraux marrons surgissent trois petites îles déchargées de sédiments mais chargées d'histoire. Aujourd'hui sources de sorties dominicales, les îles du Salut furent aussi un lieu de rétention, de souffrance et de mort durant plusieurs décennies, en accueillant une partie des bagnards envoyées en Guyane. D'où la qualification d'Albert Londres à propos de ces îles: l'enfer dans le paradis. Toutefois, en 2009, les îles du Salut offre à l'habitant de Guyane une solution intéressante de dépaysement et de détente, tout en alliant promenade culturelle (visite guidée du bagne) et naturelle (balade possible sur deux îles sur trois). Après un transfert d'environ 1 heure par catamaran, durant lequel il est parfois possible d'observer dauphins et tortues, l'arrivée sur l'île royale se fait en douceur et laisse présager du dépaysement que peut procurer la plus grande des trois îles.

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Les îles sont propriétés et donc entretenues par le CNES, le Centre National d'Etudes Spatiales, depuis 1971. Les bâtiments du bagne de l'île royale ont été réhabilités en partie et permettent aux pensionnaires quotidiens de visiter ces lieux à l'histoire terrible. Guidés par un historien amateur passionné, c'est ainsi que nous débutons cette journée du 2 août 2009, après une première série de photos animalières et paysagères. Les deux splendides aras sont apprivoisés, tout comme l'était ce beau toucan échappé d'une cage et qui ne peut voler jusqu'au continent. Un réel plaisir que de le voir boire en compagnie d'iguanes, dans une marre à caïmans.

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La visite du bagne de Guyane offre une opportunité passionnante de mieux comprendre cette terrible sentence. En plus du guide passionné, c'est surtout la revue Géo n°93 de novembre 1986 qui explique bien cette période terrible, à travers l'histoire de l'un des bagnards, nommé Dubuz, relaté par un journaliste de l'époque. "En fait, l'histoire de Dubuz était banale. Fin de la première guerre mondiale. Un jeune libéré rentre dans son petit village de Normandie. Bientôt, il s'imagine dans les bras de sa femme, la couvrant de baisers. Mais un autre est là. A ce moment du récit, le vieil homme avait plié les doigts en forme de revolver: "j'ai tiré! L'homme est tombé tout de suite, mort, complètement mort." Vrai crime passionnel, ou, comme souvent chez les anciens bagnards, biographie inventée de toute pièce pour donner une cause plus noble à sa condamnation. Peu importe. Dubuz s'est retrouvé en Guyane, dans l'enfer du bagne, un cliché littéraire auquel je ne peux échapper qu'en ayant recours à l'argot coloré des forçats: Dubuz s'est vu condamné à la guillotine sèche, numéro parmi les numéros. Dubuz et son tricycle demeurent une photographie à jamais gravée dans mon cerveau. Lui et la poignée de "vieux blancs" qui s'éteignent l'un après l'autre dans les hôpitaux de Cayenne, aujourd'hui préfecture de la Guyane française, ou de Saint-Laurent-du-Maroni, sont les éclopées en loque d'une armées vaincue. Le savent-ils eux mêmes ? En venant en Guyane, ils arrivaient pour purger leur peine, se mettre en règle avec la société et, si possible, avec leur conscience. Mais ils étaient aussi les soldats d'une troupe qui avait reçu mission de transformer la Guyane en eldorado."..."Au total, entre 1852 et 1938, soixante-dix mille hommes furent convoyés en Guyane. Comme toutes les troupes en campagne, cette armée eut ses morts. Une véritable hécatombe: plus de la moitié des effectifs !" Ma tête et internet complètent cette brève synthèse: Alfred Dreyfus (1894), Guillaume Seznec (1923) furent les prisonniers les plus célèbres du bagne. Francis Lagrange, bagnard artiste, peint une série de toiles sur ce terrible monde. L'abolition du bagne de Guyane fut proclamée en 1938 mais réellement mise en oeuvre en 1947. 1947 ? Dans le contexte de la découverte de camps de concentration nazis, il devint délicat de tolérer l'existence de ce camp équatorial dont le taux de mortalité était du même ordre de grandeur.  

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Hôpital du bagne des îles du Salut

Un changement n'arrivant jamais seul, la fin du bagne en 1938 correspondît à la création des congés payés en France, et par effet domino, le développement du tourisme de masse. Après le départ des gardiens du bagne et de tout ce qu'il générait, violence, maladies et mort, le tourisme s'est petit à petit développé sur les îles du Salut ! Et d'autres gardiens ont été embauchés, pour s'occuper de ces venues dominicales ! D'où ce doux surnom donné aux postes de gendarmerie des îles du Salut, comparé à la réalité de la Guyane continentale et à celle du bagne: le club-med de la gendarmerie en Guyane !  

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C'est bel et bien dans un endroit paradisiaque que les hommes débarquent en 2009. Laissons le passé au passé, et promenons-nous un peu sur l'île royale, la plus grande et la plus fréquentée des trois îles. Une balade aux alentours de l'auberge débute par l'observation des agoutis, ces rongeurs comestibles, du toucan ainsi que de l'île du diable, sur laquelle à séjourné Dreyfus.

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Vue de l'île du Diable depuis l'île royale

Puis, après ce petit tour autour de l'auberge, c'est le tour de l'île que nous faisons maintenant. un tour par des petits chemins de terre bordés de cocotiers, à côté d'une eau bleu-verte à 29°C. Des sentiers très photogéniques, une petite baignade agréable, et un bel après-midi au fil de l'eau.

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Cette promenade est très sympa. Le microclimat, légèrement plus sec, devient plus agréable que sur le continent, pourtant à quelques kilomètres. La possibilité de plonger dans cette eau chaude est verte offre est aussi un petit plaisir. Mais voilà, pour avoir pris un aller-retour sur une journée, il nous est impossible de rester plus longtemps, et notamment de visiter l'île Saint-Joseph, sur laquelle les vestiges du bagne n'ont pas été réhabilités. Aussi, c'est en redescendant tranquillement vers le port que je tombe nez-à-nez avec une bande de sapajous. Habitués à l'homme, ils sont preneurs de toute friandise que le promeneur peut laisser. Ces îles sont une étape incontournable de la Guyane touristique. Plus accessibles sur le plan financier que d'autres sites naturels du département, elles assurent un dépaysement garanti à toute personne, de Guyane ou d'ailleurs. A visiter, sans oublier le hamac, bien sur !

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Sapajous, une des espèces de singe présente sur l'île

4 avril 2010

France/Guyane - L'orpaillage illégal, vu par la presse guyanaise

L'orpaillage illégal en Guyane est particulièrement médiatisé pour la double pollution qu'il génère: matières en suspension et mercure. Il n'est pas rare également d'entendre parler, dans certains documentaires, de l'insécurité liée aux attaques de mines légales par des garimperos. L'opération Harpie 2 a eu lieu en 2009. "La semaine guyanaise" a écrit de nombreux articles. Extraits choisis.

N°1332, 4-10 juillet 2009. "C'est une guerre des nerfs, une guerre d'usure que vit Saint-Elie. D'un côté, les gendarmes, constamment présents, à 9 ou 10, selon la relève. De l'autre les travailleurs clandestins de l'or qui - apparemment - ont déserté le bourg. Parmi ces étrangers en situation irrégulière, certains vivaient sur Saint-Elie depuis plus de 10 ans et pas exclusivement des Brésiliens. Avec ces dernières années, comme unique activité économique, l'orpaillage clandestin, ses commerces, ses emplois et son marché noir. "A leur arrivée mi-avril, les gendarmes ont d'abord mené une campagne d'information en prévenant les gens", raconte Rose Alexander, ancienne adjointe au maire, ex-agent de santé au dispensaire fermé depuis janvier 2006. Elle revient régulièrement dans la commune dont elle est originaire et possède une maison. J'ai vu trois phases de reconduite ces dernières semaines. Une fois les gendarmes en ont pris 20, une fois 12, une fois 17. En fait, ce sont les brésiliens qui viennent se livrer", indique-t-elle. Ce qu'un gendarme confirme: la plupart viennent d'eux mêmes car ils ont faim. On ne court pas après. Dans le bourg, une poignée de Brésiliens (à priori moins d'une vingtaine) restée sur place, connaît la chanson: "Segunda feira, seixta feira!": "lundi et vendredi" sont les deux jours de reconduites à partir de Saint-Elie. On les ramène en camion sur Petit Saut puis en pirogue", explique un gendarme. "Je suis venu me rendre", nous a indiqué, dimanche 28 juin, un Brésilien qui cueillait des oranges en attendant le lendemain. Selon les informations recueillies sur place, bon nombre d'illégaux se sont spontanément livrés pour repartir gratuitement au Brésil. (...)

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Lac artificiel de Petit Saut. Nombre de sites d'orpaillage sont en amont.

Echange entre Frédéric Farine, journaliste, et une femme garimpero. "En forêt, nous avons tous le palu, à tour de rôle. J'ai eu encore une crise, il y a huit jours. Il ne nous reste qu'une tablette d'Artecom au camp. A la prochaine crise de l'un d'entre nous, plus de tablette." explique t'elle un brin fataliste. J'interroge Latidinia sur cette propension des ressortissants brésiliens à choisir l'aventure en Guyane. "Il faut comprendre les difficultés des classes défavorisées au Brésil. Qu'est-ce qu'il est possible de faire au Brésil pour des hommes qui ne savent ni lire ni écrire? De la maçonnerie, des charpentes: des travaux très mal payés là-bas. C'est une amie d'Altamira, ma ville d'origine au Para, qui m'a parlé de la Guyane en 2004" raconte encore Latidinia. "Elle venait d'en être expulsée après y avoir passé 2 ou 3 ans. Elle y vendait des vêtements, de la nourriture pour les sites d'orpaillage. Cela a bien marché pour elle en Guyane".

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Lac de Petit Saut - Forêt noyée lors de la mise en eau du barrage

N° 1337 du 8 au 14 août 2009. Entretien entre ce même journaliste et un orpailleur du village clandestin de Zohia (région de Saul), secteur illustré sous le nom de "guérilla". "La plupart des gendarmes sont très bien entraînés, très bien éduqués. Mais pour une minorité d'entre eux, ce n'est pas le cas. Enfin, c'est sûr, ils ne sont pas violents, ils n'ont jamais tués personne sur un site" reprend Janilton qui explique travailler dans le secteur de Guérilla "depuis 2006". Pour lui, Guérilla n'existe plus. Alors qu'un an en arrière "en comptant l'ensemble des sites de ce secteur, on pouvait produire 12 à 15 kilos d'or en une journée! C'est fini maintenant. Et tout est cher ici.(...) Sur le problème de la violence entre garimperos sur Guérilla, Janilton dément: "il n'y a pas de violence, pas de meurtres à Guérilla, les villes de Guyane sont plus violentes que les sites d'orpaillage." Une affirmation contredite par l'instruction judiciaire en cours sur les crimes de Guérilla. "On a retrouvé 6 à 7 cadavres, dont certains abattus de balles dans le dos en 2007 et 2008" souligne une source judiciaire. Tout au plus, Janilton admet-il "des accidents, nombreux, dans les galeries qui s'effondrent". La galerie la plus profonde creusée à Guérilla ? "32 mètres", indique t'il.  On apprend sur place comment les faire, puis on creuse à la pelle et à la pioche...Au Brésil, j'étais "motoboy" je faisais des courses en scooter pour une boutique à Manaus avant de venir en Guyane. Mais je refuse que mes frères viennent, c'est trop dur" poursuit-il. Sur la question écologique, Janilton a une parade: "Si on nous laissait faire, à notre départ, il n'y aurait ni trace de notre passage, ni de notre corotel (village d'orpailleurs)."(...) Sa présence en Guyane ? Il l'explique par le manque de perspective chez lui: "Au Brésil, il y a des terres avec de l'or mais le gouvernement n'autorise pas les garimperos à l'exploiter. J'ai étudié mais je n'ai pas eu l'opportunité d'avoir un bon travail dans mon pays" regrette-t-il.

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Village sur le rivage brésilien de l'Oyapock. Un corotel ?

24 avril 2010

France/Guyane - De la forêt !

Le bassin amazonien s'étend sur 650 millions d'hectares de forêt primaire répartie entre 9 pays. Située au coeur de ce bassin, la forêt du plateau des Guyane revêt un intérêt écologique et biologique universellement reconnu. Comment le prendre en compte pour assurer le développement économique de la Guyane dans le cadre d'une coopération régionale Amapa-Guyane-Suriname-Guyana sans réduire les fonctions capitales de ces forêts tropicales? Cet article, dont certains éléments sont repris sur la description d'un projet financé par l'Agence Française de Développement (AFD) de Guyane, se veut une introduction sur le financement international de la protection/gestion/valorisation durable de l'environnement. Il est agrémenté par des photos d'une sortie en forêt, à la montagne des singes, vers Kourou. La montagne des singes: une belle promenade qui nous amène à un carbet avec une vue imprenable sur le littoral et l'intérieur de la Guyane...de la forêt, de la forêt, encore de la forêt ! 

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La forêt guyanaise, un morceau européen de l'Amazonie

L'Agence Française de Développement constitue l'organe français de distribution de l'Aide Publique au Développement, dans les Départements d'Outre-Mer et dans les pays dits "en voie de développement". Dans un monde de plus en plus globalisé, cette contribution financière, seule véritable politique publique à l'échelle internationale, peut avoir un rôle dans la protection de ces biens communs. Aussi, un apport financier du gouvernement français pour la gestion durable de la forêt du plateau des Guyanes prend tout sens. D'autres services de l'État prennent aussi en compte le financement de projets de développement local dont la prise en compte de critères environnementaux est importantes. On peut penser aux subventions de l'ADEME pour le financement de constructions publiques selon une architecture bioclimatique peu consommatrice d'énergie. Le financement du développement durable doit ainsi nécessairement prendre en compte ses trois composantes: la lutte contre la pauvreté, le développement sanitaire et social (santé, éducation), et la protection de l'environnement. Ainsi, l'aide publique au développement peut, par des actions ciblées et peu onéreuses, encourager des pays dits "en voie de développement", selon une expression critiquable, à réduire le rythme de la déforestation, aujourd'hui responsable de 20% des émissions mondiales de CO2. 

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Ce projet de gestion durable des forêts du plateau des Guyanes, mis en oeuvre par le WWF, qui concerne le Guyana, le Suriname, la Guyane et l'Amapa, comprend 6 composantes, dont la gestion des aires protégées, la réduction des impacts de l'orpaillage, la mise en place d'une gestion forestière durable, la gestion et la conservation des écosystèmes aquatiques, la gestion et conservation des espèces, et une composante de communication et d'éducation à l'environnement. Aussi, la préservation des ressources naturelles, la réduction des effets négatifs des activités économiques, la préservation des services environnementaux ainsi que des savoirs et techniques des habitants des pays et de la Guyane sont autant d'éléments qui contribuent au développement socio-économique de la région. En matière environnementale, le projet contribue à la préservation de la biodiversité encore intacte de la zone.

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Ce projet est un bel exemple de ce que ce petit livre accessible à tous traite: le financement du développement international. A l'heure du bilan de cette expérience professionnelle et personnelle, certaines réflexions sur ce que j'ai pu comprendre, notamment en travaillant avec deux ingénieurs civils guyanais qui m'auront fait aimé ce département, me semblent intéressantes à être échangées.

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"La constatation que la Chine est devenu le premier pays émetteur de CO2 au monde ne doit pas faire oublier la responsabilité historique des sociétés industrialisées dans la consommation de ressources naturelles finies et la dégradation de l'environnement mondial. Ainsi, les émissions de CO2 de la Chine ont beau avoir dépassé celles des Etats-Unis, ses émissions par habitant restent encore très inférieures à celles des sociétés développées: moins de 4 tonnes de CO2 contre 20 tonnes par Nord-Américain, 10 tonnes par Japonais ou Allemand". Une première conclusion très simple est à mettre en valeur: dans les sociétés "développées" du Nord, il existe des disparités réelles entre les productions de gaz à effet de serre et l'empreinte écologique moyenne des pays. Un danois, soumis à une flexsécurité du travail et allant à son travail en vélo se sent-il pour autant moins heureux qu'un américain sans assurance-santé de qualité et qui utiliserait régulièrement de l'eau pour laver sa voiture? L'irlandais de 2010, vivant dans un pays devenu un des plus riches d'Europe en 20 ans, est il réellement contrarié de ne pas avoir d'autoroute 4 voies reliant Dublin à Galway, mais au contraire des routes simples, plus proches des pays dits "en voie de développement"? Il existe autant de modèle de développement qu'il existe de pays et la qualité de vie voire la croissance dans un pays n'est pas directement lié au niveau de développement de ses infrastructures. 

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La naissance de la politique d'aide au développement est souvent datée par le plan Marshall, qui oeuvra à la reconstruction des pays d'Europe de l'Ouest après la seconde guerre mondiale. W.W Rostow, dans son livre intitulé Les étapes de la croissance - Un manifeste non communiste, exprimait les différentes étapes de développement d'un territoire, de la société traditionnelle à l'ère de consommation de masse.

>> Prochaine étape: développement durable, décroissance, crise majeure, guerre?

La prise en compte de la composante environnementale tant dans les modèles de développement territoriaux que dans la vie de chaque individu devientindispensable en Occident et dans les pays industrialisés. Bien plus qu'une tendance à la mode, elle passe tant par l'orientation des politiques publiques vers un financement de projets durables (consommations énergétiques, énergies renouvelables, mobilité douce, agrandissement des parcs naturels, réduction des consommations d'eau etc) que par une évolution des moeurs à l'échelle individuelle. Car comme l'idée de base de la micro-finance d'assurer le développement d'un territoire à partir du financement de l'entrepreneur individuel du PVD, c'est aussi l'évolution des comportements à l'échelle individuelle qui aura des conséquences sur le développement durable d'un territoire dans son ensemble, et cette évolution sera d'autant plus forte si elle a impact limité sur le portefeuille de chaque individu ! Dans une Europe où nombre de sourires sont partis avec le précédent métro, dans une Europe en recherche d'identité et de sens, nombre de démarches collectives et individuelles se mettent en place, à l'image de cette démarche de covoiturage intéressante d'un ami annécien ou à celle d'une amie de ne plus manger de viande le soir pour limiter les gaz à effets de serre, provenant de son intestin comme de ceux de la vache :).

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Comment faire pour que la planète supporte 8 milliards d'individu sans que de graves conflits, voire une guerre mondiale, apparaissent? Quand un débat sur l'identité nationale en France est lancé dans une visée électoraliste alors que si le niveau de l'océan monte vraiment, l'Europe devra se serrer les coudes pour accueillir bien plus de monde et le Monde se brasser de plus en plus, va t'on encore nous baratiner sur des discours nationalistes à visée électoraliste? Quand va t'on réellement apprendre aux métropolitains que d'autres concitoyens peuplent le Monde, ou encore que dans le passé, des ultramarins ont eu des postes très importants dans le gouvernement? Pourquoi ne pas parler de la malbouffe américaine, qui elle, a un réel effet sur la santé et la diminution des identités culturelles européennes? Bref, passons et revenons à des extraits de ce livre. "Les sociétés en développement occupent une place centrale dans la crise environnementale globale à un troisième titre: en tant que pourvoyeur de solutions. En effet, c'est en partie sur leurs territoires - qui abritent l'essentiel des "puits à carbone", des réserves de biodiversité et des sources inexploitées d'énergie propre à la planète - que se mènera demain la bataille écologique. Celle-ci est déjà engagée: des projets sont par exemple en cours pour favoriser l'exploitation durable des forêts tropicales grâce à des rythmes de coupes d'arbres compatibles avec la régénérescence des espèces végétables et la préservation de l'habitat des espèces animales. (...) Pour être victorieuse, cette vaste bataille pour l'avenir de la planète devra être menée via une collaboration active entre pays du Nord et du Sud. Car ces derniers hébergent, il ne faut pas l'oublier, l'essentiel du patrimoine environnemental menacé. La protection du patrimoine naturel qu'ils hébergent vaudra à certains pays en développement des ressources considérables sur longue période qui, intelligemment investies, pourront alimenter la croissance économique. Ce type de collaborations Nord/Sud est ce qui permettra aux voies de développement de s'émanciper des trajectoires de croissance non soutenables empruntées par les sociétés industrialisées". Ok, cet extrait peut être une source de débats légitimes et "violents", car l'Occident reste le principal pollueur, et les solutions doivent tout d'abord venir de changements importants en Amérique du Nord et en Europe. Mais développement et conservation de l'environnement ne sont pas incompatibles. Le Costa-Rica, pays développé d'Amérique latine, propose un modèle de développement particulièrement intéressant. L'ensemble de ses parcs nationaux et réserves environnementales représentent 26% de la surface de son territoire ! Voilà une synthèse de ce leadership mondial dans le développement durable, assurant la préservation de ses ressources naturelles et un écotourisme apportant des ressources financières indéniables. Un pays stable, démocratique, et dont la suppression constitutionnelle de l'armée en 1949 a permis l'apport de nouveaux financements pour la conservation de son environnement. Un modèle pour le futur ? 

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1 mai 2010

France/Guyane - Excursion dans l'Ouest

Le paradis existe, il suffit d'ouvrir les yeux. Cette affirmation est particulièrement vraie lorsqu'on dors en Hamac au gîte Angoulême, sur la route de l'ouest guyanais, et qu'au petit matin une multitude de chants d'oiseaux réveille l'homme de passage pleinement assoupi au milieu de la forêt.

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Coucher de soleil sur la forêt

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Lever du jour sur la forêt 

Cette forêt est toujours aussi envoutante et surprenante. Le gîte est un point de départ idéal pour une balade dans ses alentours, et c'est surveillé par le païpayo que nous nous y aventurons. un petit sentier, une rivière, des arbres majestueux, welcome to Amazony!

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Le gite est sur une clairière aux nombreux arbres et arbustes fruitiers. Quant aux serpents collectionnés dans l'alcool, ils proviennent des alentours...

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L'ouest, c'est aussi Saint-Laurent du Maroni et son marché aux multiples couleurs. Le marché le plus sympa que j'ai réalisé en Guyane, duquel on sent le Suriname. Il y a aussi ces petites cases sur le bord des routes, où des personnes, souvent bushinengés, vendent leur production de fruits et légumes. Puis, la route nous fait traverser Mana et nous fait arriver au bout de la Guyane, dans la commune amérindienne d'Awala-Yalimapo. Une petite commune aux habitations typiques, et un petit moment fort sympathique. L'ouest guyanais, c'est encore une autre saveur, qui se termine à Awala ou en remontant le Maroni, fleuve majeur de ce département et autre source de rencontres et de découvertes enrichissantes.

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Vente de fruits sur le bord de la route, ouest guyanais

2 mai 2010

France/Guyane - Retours au vieux port de Cayenne

Le vieux port, beau site pour l'observation des oiseaux limicoles des vasières et mangroves.

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Moucherolles pies en train de faire la maison (à gauche) et les bébés (à droite)

Chaque passage sur ce site m'offrit la possibilité de quelques observations de qualité. Voilà une aigrette neigeuse.

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Mais une sortie me fit vivre des émotions particulièrement forte. 9 octobre 2009. La saison sèche est là, et cette soirée, le soleil couchant nous offre un cadre d'observation absolument splendide. Des milliers d'oiseaux limicoles -oui, des milliers - passent autour de nous, observateurs avides de clichés et de moments intacts, remontant les vasières, longeant cette côte mobile pour le plus grand plaisir des yeux.

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Vol d'ibis rouges, observation géniale sur fond de soleil couchant

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Le soleil enveloppe la surface de l'eau de tout son éclat, et cette sortie hasardeuse illumine une année guyanaise remplie d'expériences très fortes. Mais voilà, mon contrat d'un an s'est terminé, et même si certains objectifs de ce projet n'ont pas aboutis, d'autres objectifs et une certaine réalité m'incitent à un retour en France métropolitaine, pour une durée indéterminée. Pas de boulot, plus d'appart, pas de moyen de déplacement, et toute la vie devant moi pour revenir un jour peut-être travailler dans ce département intéressant et accueillant. En ce 9 octobre, je laisse mes émotions vibrer à la vue de ce paysage naturel paradisiaque, et revisualise intérieurement nombre de moment vécues durant ce séjour qui restera gravé pour sa richesse tant sur les plans personnels que professionnels. En ce 9 octobre, j'ai la satisfaction d'avoir réussi de nombreuses choses mais la sensation que cette expérience guyanaise n'est qu'une première étape d'un projet professionnel et personnel plus conséquent qui me verra probablement reposer un pied ici. Car au bonheur d'avoir fait des rencontres si enrichissantes s'ajoute celui de mieux percevoir son histoire et son identité, en tant qu'individu mais aussi en tant que personne française parmi tous les citoyens du monde. En ce 9 octobre, le moment est gravé, les conclusions s'imposent et le retour en France métropolitaine se décide progressivement...

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Un coucher de soleil comme clôture d'un séjour faisant rayonner les envies

29 mars 2008

Irlande/Leinster - Dublin, il y a 23 ans

Parfois, il est utile de conserver de bons magazines. C'est ainsi qu'en ce week-end de Pâques, je suis allé jeté un oeuil à la collection de Géo de mes grands parents. Et c'est ainsi que j'ai trouvé un Géo consacré à l'Irlande, datant de juin 1985. Certains articles, notamment celui sur les îles d'Aran, sont superbes. Voila un article sur le Dublin des années 80, avant le boom économique donc, et de ses écrivains, écrit par Alain Hervé, grand journaliste français. Je le ponctue de nouvelles photos de la ville.

Flâneries. Drôles de drames à Dublin.

D'abord, vous entendrez dans le lointain une chanson: "Dans Dublin la belle ville, où les filles sont si jolies, j'ai rencontré Molly Malone. Elle vendait des poissons comme père et mère. Elle est morte d'une fièvre que nul n'a pu guérir et maintenant son fantôme pousse sa charrette..." Même si vous rencontrez ni Molly ni san fantôme à Dublin, la mélancolie sera toujours au rendez-vous avec la pluie. Ville aux murs noirs, usés par l'histoire, se reflétant dans les eaux noirs de jus de tourbe de la rivière Liffey. Six heures du soir dans Dame Street: des hommes et des femmes se sont abrités sous la marquise d'un ancien théâtre. Portrait de groupe avec manteaux humides, Heinrich Boll nous avait prévenus dans son "journal d'Irlande": "En Irlande, il pleut sur la pauvreté". Dix heures le lendemain matin: les bâtiments de Trinity College brillent au soleil neuf d'un ciel lavé à grande eau. Des centaines d'Américains en chapeau rose et en casquette verte attendent en une interminable file d'avoir accès à la bibliothèque. Venus du fin fond du Minnesota, ces O'Connell et ces O'Flaherty, ces Reagan et ces Kennedy, dont les pères sont partis, il y a longtemps, chercher et trouver fortune de l'autre côté de l'Atlantique, vont bientôt avoir accès, quelques secondes, aux fragiles souvenirs de leurs ancêtres. Les voilà. Le livre de Kells...le livre de Durrow. 

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Danseuses, spectacle Riverdance 
 
Il n'aurait que 103 ans: James Joyce est né en 1882 à Dublin. Ecrivain, Irlandais, Dublinois: triple pléonasme, sur cette île ou la littérature est plus réelle que la vie. Dans un pays arraché par ses écrivains à la stupeur qui suivit la sanglante colonisation anglaise, Joyce dit un jour: "si Dublin était détruite, on pourrait la reconstruire en lisant mon oeuvre, qu'il s'agisse de "gens de Dublin" ou d'"Ulysse". Ne vous laissez jamais raconter que ce sont des livres difficiles. La preuve, on peut visiter Dublin avec l'un ou l'autre à la main.
 
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Swift, lui, était anglais, mais vivait en Irlande, dont il embrassa la cause. Pour le rencontrer, allez à Saint Patrick, la cathédrale sans charme de Dublin, dont il fut le doyen, et où il fut enterré en 1745. Son épitaphe est toujours d'actualité: "Swift a fait voile vers son repos. Là, la sauvage indignation ne peut plus lacérer son coeur. Imitez-le si vous osez, voyageur désabusé. Il s'est battu pour la liberté." Bonne occasion pour relire "les voyages de Gulliver" ou la recette pour cuire les enfants d'Irlande et les empêcher d'être une charge pour leur pays. N'oubliez pas en sortant de la cathédrale de suivre le trottoir sur la gauche, jusqu'à la bibliothèque Marsh, la plus vieille bibliothèque publique d'Europe. La publicité touristique n'a pas tort: l'Irlande est un pays vert et charmant qui se visite avec un imperméable, mais, pour l'apprécier, il faut s'en remettre à l'humour féroce des irlandais. N'essayez pas de séparer l'Irlande des Irlandais. Il ne resterait rien. En vol vers Dublin, vous découvrirez dans la revue de la compagnie nationale ce slogan: "Les Irlandais sont à l'Irlande ce que le champagne est à la France".

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Le temps passe, et Dublin a bien changé en 25 ans…

22 décembre 2011

Une souris et...Kayoung, Saena et Agnes: " C'est triste "

La conscience internationale, la compétence interculturelle, une meilleure compréhension de notre Monde. Quelques exemples de ce que peuvent apporter des expatriations, des rencontres internationales, des chantiers de bénévoles, internet, les lectures, les conférences etc. Mais une chose est plus puissante que les autres pour la tolérance entre les peuples: le partage de moments de vie avec des personnes d'autres lieux. Oh que cela n'est pas toujours valorisé en France, et que la direction actuelle tend plutôt vers davantage de communautarisme, à première vue. L'échange avec des coréens et coréennes, il est aisé en Europe, tant ceux-ci s'expatrient plus qu'auparavant. La naissance d'amitiés a eu lieu, amitiés éphémères physiquement, mais qui restent dans un coin de cerveau. Alors que j'avais commencé à écrire ce message il y a quelques mois, et que, faute de motivation, le brouillon était resté en l'état, voilà que le dictateur nord-coréen meurt, et que les vidéos des habitants endoctrinés, en pleurs, apparaissent au monde entier. C'est il y a quelques jours seulement que j'ai davantage mesuré l'acquisition de cette conscience internationale, quand, pensant à Kayoung, cette petite coréenne qui a partagé un chantier international en ma compagnie, une légère insomnie s'est déclarée suite aux images de Corée du Nord. Une bonne raison de finaliser cet article sur des échanges avec ces copains coréens.

Août 2010: soirée en refuge. Une bougie. Une flamme. Un au-revoir. Un adieu ? Kayoung et Saena terminent d'écrire leur perception du jour ou de la semaine. Comme beaucoup de coréens à l'étranger, elles tiennent à jour un journal personnel de leurs expériences et de leur vécu. L'écriture coréenne est fine, esthétique, et même élégante. Pourquoi ne pas l'apprendre un jour ?

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L'écriture du soir se termine doucement. Les deux volontaires ont passé du temps ensemble, et l'entente fut bonne. L'une partira peu de temps au Portugal, faire un nouveau chantier. L'autre finira sa formation dans l'hotellerie en France. Deux parcours très différents, mais qu'un élément rapproche: leur origine sud-coréenne. Le silence est d'or. Plus un bruit. Seul un léger mouvement de la flamme. Un an et demi plus tard, le souvenir est flou, un peu illusoire. Ces journeaux intimes, sans doute plein de belles anecdotes de vie, des remarques sur les lieux découverts. Kayoung a t'elle aimé la tartiflette savoyarde ? Je ne le saurai pas. Nous parlons plutôt d'un sujet nettement plus intéressant, mais aussi beaucoup plus sensible; La Corée du Nord. La séparation de la Corée en deux blocs. C'était en 1953. Une éternité quand on a 10 ans, récemment quand on en a 30, le jour de ses 10 ans quand on en a 70. 60 ans, la guerre froide et cet autre monde. La Corée du Nord sera communiste, la Corée du Sud rattachée à l'économie de marché. Et les coréens alors ? Certains perdront de vue des membres de leur famille, de l'autre côté. La folie des puissants de ce Monde. Je ne rentrerai pas dans le détail de l'histoire des Corées, trop inconnue et sans doute très bien expliquée sur la toile. Mais ce sujet, Kayoung le résume dans cette phrase: c'est triste.

Cette phrase je m'en souviens bien. Cette méconnaissance du sujet que j'avais aussi. La discussion qui s'en suivi, sur le budget d'armement des nord-coréens, les tentatives de fuite, les frontières ultrabarricadées, la folie du dictateur. Cette vision par deux habitantes locales du Sud, la plus profonde, la plus importante à écouter. C'est sans doute pour cela qu'il y a quelques jours, Kayoung était omniprésente dans mon esprit. Le temps d'une nuit, comme la forte envie de lui envoyer un mail, sans nouvelle d'elle depuis un an et demi. Juste avant, j'ai écrit à Agnes, coréenne en Service Volontaire Européen à la délégation Auvergne de l'association Concordia. Nos chemins s'étaient croisé une petite semaine en 2010, dans le cadre d'une formation d'animateurs. Une jolie asiatique pleine d'humour.

Agnes Kim

J'approche la conclusion de ce petit article sans prétention par le petit échange de mail avec Agnes.

Moi. " Hello Agnes. How r u ? I'm wondering how you are doing and a bit "sad" for my corean friends cause of what happens in North Korea. I mean, the videos we can see on youtube are really impressive. What is your opinion ? "

Agnes. " I'm doing great! How are you doing?  Well, I'm not in the Korea now but when I read the news it seems like many s.korean people is afraid cuz no body know what is gonna happen.. Our president is (it's really easy if you think he's like a president of France) very negative to N.Korea so. Anyway, I saw that video too.. It was really impressive. but it's kind of scary that everyone cried like their family died.. I know it's sad but I could feel there is a lot of propagonda... Hopefully, we gonna reunited in a peaceful way someday, but sadly, many s.korean people doesn't want it anymore.. sad. really.  Thanks to ask anyway. Peace!" Best wishes Emmanuel! "

Cette séparation entre les deux corées, non réunies après 60 ans, Agnes le vit comme Kayoug et sans doute beaucoup d'autres de leurs compatriotes. Et c'est ce sentiment de tristesse qui revient dans les échanges.

30 décembre 2011

France/Rhône-Alpes/Ain - Est-elle Nature, la vache ?

La vision que l'on a des choses est en partie liée à notre parcours individuel, lui même fonction de choix selon des goûts et envies et des contraintes suivant la réalité du moment. Prenons l'exemple de ce pâturage jurassien photographié en août 2010. Alors qu'une connaissance, en école d'infirmier, signalait, selon sa vision, qu' "un champ de vâches, c'est la nature", Il existe mille est une façon de percevoir ce pâturage bovin. Exemples.

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Troupeau de vâches dans un pâturage jurassien, les Moussières, août 2010

1. L'éleveur propriétaire du troupeau: "le Ministère de l'Agriculture a officiellement annoncé la mesure permettant de garantir à tous les producteur un dépassement de quota de 2% sans en être pénalisé. Cela va me permettre de produire un peu plus et profiter de la bonne tenue du marché laitier".

2. Le fromager: "Le lait de ces vâches et pâturages est de très bonne qualité pour la production de nos fromages locaux. Mais suite aux décès de plusieurs dizaines de personnes en Europe en 2011 à cause de contaminations par E.Coli, on risque de devoir faire davantage de contrôle sur nos produits."

3. L'ingénieur Analyste du Cycle de Vie: "Dans le cadre des expériences d'affichage des caractéristiques environnementales des produits de grande consommation, il est impératif que je prenne en compte le fait que la vâche ne produit pas uniquement du lait, mais aussi de la viande. Ah là là, ces allocations !"

4. Le végétarien: "Ah là là, que ce système de production bovin est mauvais: d'une part, un amateur de cuisine sait que la majorité du goût de la viande se situe dans la sauce. En plus, la consommation de viande n'est pas très bonne pour la santé, et une trop grosse consommation à l'échelle mondiale n'est pas tenable écologiquement. Pourvu que le végétarisme se développe en Europe !"

5. Le gestionnaire des espaces naturels: "Ce qui est notamment intéressant dans la gestion d'un site classé Natura 2000, c'est de travailler en collaboration avec les agriculteurs, notamment pour qu'ils adoptent une gestion plus douce des surfaces d'alpages exploitées."

6. L'ingénieur agro-alimentaire: "L'alimentation bovine en France est composé à près de 80% de fourrages. Il y a sans doute des améliorations à faire à ce niveau là pour diminuer les impacts que génèrent cette consommation sans baisser la qualité du lait ou de la viande."

7. L'ingénieur en agriculture: "il est important de maintenir une agriculture de qualité dans ces zones ou l'urbanisation est à forte pression. J'espère que mes conseils aux collectivités sur leurs plans d'occupation des sols seront suivis par le maintien en zone agricole de surfaces importantes dans le pays de Gex".

8. Le promeneur à son enfant: "Dis moi la couleur des choses suivantes: une feuille de papier ? la vâche là-bas ? la neige ? La tapisserie de ta chambre ? La voiture de maman ? L'enfant: Blanc. Blanc. Blanc. Blanc. Blanc. Le promeneur: "qu'est ce qu'elle boit la vâche ?". L'enfant: "Du lait".

9. Un cadre de la communauté de communes du Pays de Gex, parlant à un volontaire international: "s'il n'y avait pas de réserve, il y aurait sans doute des parkings bétonnés, une plus grande station de ski, plus de maisons, davantage de trafic, etc".

10. Le promeneur retraité: "Ah, ces champs me rappellent mon enfance. Dans le passé, il y avait aussi du bétail, et ces zones servaient de transhumance au bétail avant la montée en alpage sur la haute-chaîne. Ce patrimoine historique, il ne faut pas l'oublier."

11. L'écologue: "Il est particulièrement intéressant d'étudier les espèces se développant dans les zones de refus du bétail, à savoir des surfaces du pâturage non broutées et ou les fèces vont davantage être déposées. Ces zones permettent à des espèces végétales de se développer, alors qu'ailleurs elles ne le pourraient pas". 

12. Le bénévole sur un chantier de bénévoles internationaux en 2010: A quoi ça sert de débrousailler ces surfaces de prairies sêches ? Parce que c'est un peu chian au bout d'un moment. L'animateur: "A préserver ces habitats importants pour de nombreuses espèces."

Comme quoi, il existe mille manière de "comprendre" une chose à priori banale comme ce pâturage bovin ! Quand aux volontaires venus de ces quatre coins du Monde, ils ont même pu assister à la traite de vâches laitieres. Naturel, non ? 

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7 avril 2012

France/Rhône-Alpes/Ain - Une journée à Saint-Jean-Le-Vieux

L'Ain recèle de nombreux villages charmants, de régions économiques diverses et de paysages variés. Mais qui connait Ambérieu-en-Bugey et sa région, n'y verra souvent que la fameuse gare SNCF à laquelle de nombreux TER et TGV font un arrêt sur la ligne de Lyon. D'autres, plus sportifs, feront le lien avec les nageurs olympiques de la famille Manaudou. Ambérieu et le Bugey est, malgré une faible attractivité touristique apparente, une région où il fait bon vivre, agréable, dynamique sur le plan économique et marquée d'une identité locale assez forte. Les villages aux alentours sont riches d'une histoire et d'un patrimoine qui intéressera tout amateur d'art, d'histoire économique ou de photographie. Et les monts du Bugey, une extrémité géologique du Jura, ne sont jamais bien loin. Un dimanche d'avril, le temps grisatre ou ensoleillé, est une opportunité de découverte pour tous ceux aimant la marche et le patrimoine. Et alors que dans le passé, des habitants d'Irlande ou de Guyane m'avaient montré avec enthousiasme leurs lieux de vie, alors que le Couchsurfing se base sur le principe que "le meilleur guide d'un lieu ne peut être que l'habitant local", cette découverte en cours du Bugey ne serait-elle pas mieux partagée? Transmise? Expliquée, dans la mesure d'un champ de connaissances même limité. Imen et Amira, deux soeurs tunisiennes rencontrées à Lyon, Nadja et Rémy, nouveaux habitants rhône-alpins, Stefano, Italien fraîchement débarqué du Piemont, et moi-même décidions de découvrir un peu mieux le Bugey. Un point commun nous rassemble: le besoin de lien amical en dehors des heures de travail. Un outil fédérateur de lien social, une association de bénévoles faisant vivre un projet. Une rencontre à une sortie de métro, et le plaisir de faire découvrir un peu la France rurale à deux Tunisiennes rarement sorties de la cité des Gones.  

Lyon. 10h00. Un signe de main à l'autre bout de la place Charpennes. Imen et Amira s'approchent, pétillantes, heureuses de partir à la découverte d'une France rurale mal connue de ces deux doctorantes tunisiennes. Le regard curieux, l'envie de prendre l'air, sortir d'une ville agréable à la rencontre de la ruralité toujours difficile d'accès lorsqu'on est sans guide et sans voiture. 

Ambérieu. 11h00. Les nuages masquent un soleil que l'on devine rayonnant. Une légère épaisseur brumeuse, augmentant l'incertitude sur le déroulement de la journée. Pluie ou soleil ? Stefano, récemment arrivé à Lyon depuis l'Italie, Nadja et son ami Rémy nous retrouvent à la gare d'Ambérieu. Direction Saint-Jean-Le-Vieux, petite bourgade bugiste où au milieu coule une rivière. L'idée de la journée: un décrassage dans les chemins de ce village, près de la nature, près des champs, pour dérouiller le corps avant d'autres aventures plus escarpées. Le chemin de Cheminant relie l'entrée de Saint-Jean à Jujurieux, village voisin, en traversant Varey et son chateau, le long de champs, pâturages bucoliques, traversant quelques hameaux s'éveillant dans la tranquillité d'un dimanche de printemps.

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Imen et Amira dans la brume printanière d'un village bugiste

Les chemins escarpés offrent une vue sur le chateau de Varey, un des chateaux composants le paysage des alentours, parmi d'autres. A gauche, une haie de forcicias fleuris rappellent la fin de l'Hiver. Mais ces chemins de traverse ne sont pas faciles à connaître pour un lyonnais. L'habitant local et sa fine connaissance des environs est, s'il se veut accueillant, le meilleur guide possible pour le promeneur de passage. Outre l'accueil de la personne étrangère à son territoire, il peut affiner son ouverture sur le Monde et sa tolérance vis-à-vis de personnes venant "de l'extérieur". Cette démarche se retrouve via le projet du Couchsurfing ou des chantiers de bénévoles. Faire vivre ces villages dans lesquels l'été rime avec "ennui" pour la jeunesse rurale, dynamiser la saison estivale, nouer les liens sociaux entre habitants et personnes de passage, permettre à des personnes extérieures de rencontrer l'autochtone. Chacun de ceux qui apprécient la découverte de nouveaux territoires connaissent le plaisir qu'est la découverte de parties profondes de celui-ci. Les îles d'Aran en Irlande, par exemple.

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Le retour par Jujurieux, puis la visite guidée de l'Abbaye d'Ambronay, concluaient le premier dimanche de sortie pédestre de l'année. L'occasion pour chacun de mieux connaître les alentours lyonnais et à tous de souffler un air campagnard avant une nouvelle semaine de travail.

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15 novembre 2014

France/Guyane - l'Oyapock : le pont, extraits choisis

Oiapoque est la ville brésilienne frontalière de la Guyane française et de la commune de Saint-Georges de l'Oyapock. Entre les deux communes s'est vu construire un pont, source de discorde. Ce petit article sans prétention synthétise quelques témoignages de personnes qui sont concernés d'une manière ou d'une autre par ce pont. Par exemple, Mael Cabaret, réalisateur breton dont vous trouverez le portrait en cliquant sur le lien précédent, a réalisé un beau reportage d'environ 1 heure, Oyapock, sur cette frontière fluviale davantage médiatisée depuis quelques années. De ma découverte des lieux, soit dans le cadre professionnel (Saint-Georges), soit dans le cadre personnel (Oiapoque), il n'est qu'une envie qui me dessine : continuer à apprendre sur ce territoire interragissant au jour le jour que compose les deux communes. Apprendre par la lecture, ou par l'écoute, et bien sûr,  dans l'idéal, par l'échange avec les habitants.

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 Pont sur l'Oyapock (photo du web)

Avant d'inaugurer le pont, les autorités veulent d'abord trouver un nouvel accord transfrontalier pour les habitants de la vallée. Car pour beaucoup comme pour Rona, guide touristique, la notion de frontières, sur le fleuve Oyapock, c'est tout neuf. "On avait pas besoin de ce pont. On dit ici qu'ils sont en train de construire un nouveau mur de Berlin". Retour à Saint-Georges de l'Oyapock. De ce côté-ci, on commence aussi à être agacé par ce pont. Comme cet habitant, qui indique qu'il ne peut plus faire de parties ou jeux avec ses amis d'Oiapoque. Lors de l'annonce du projet, ni la population, ni les élus locaux n'ont été consultés. Chacun s'apprête à vivre avec un pont majestueux, mais jamais désiré...toutefois, Fabienne Mathurin, ex-maire de Saint-Georges, propose que s'il y a bien un ouvrage qui symbolise l'intégration de la Guyane en Amérique du Sud, c'est bien ce pont sur l'Oyapock. Pour Gérard Police, docteur en civilisation brésilienne interrogé dans ce reportage vidéo, les 50 millions d'euros dépensés pour la construction de ce pont ne représentent en réalité que très peu d'argent, par rapport aux enjeux économiques, financiers et militaires entre la France et le Brésil. Il y avait besoin d'un symbole de ces partenariats : ce pont.

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Comme on peut le lire dans cet article d'Hervé Théry,  pourquoi un pont aussi grandiose alors que l'on attend un trafic très limité, qui aurait très probablement pu être absorbé sans difficulté, à un coût moindre, en renforçant le service des bacs qui assuraient déjà la traversée. Cela ne s'explique que dans une perspective géopolitique régionale de liaison entre le Brésil et ses voisins du Nord. Ces voisins se sont longtemps méfiés de son expansionnisme, notamment la France qui s'est abstenue de construire la liaison routière de 80 km entre Régina et Saint-Georges. Ce n'est que plusieurs années après le retour de la démocratie au Brésil, après la période de la dictature militaire (1964-1985), que les travaux ont été entrepris en achevés en 2003. Avec leur conclusion, l'axe RN1/RN2 assure désormais la liaison de 450 km entre Saint-George et Saint-Laurent-du-Maroni à la frontière du Suriname. Avec la construction du pont, la route côtière constitue donc désormais un maillon d'une panaméricaine atlantique. Il faut toutefois noter que le Brésil n'avait pas attendu de se doter d'une autre sortie vers les Caraïbes, via l'ouverture de la route Manaus-Caracas...

Ainsi va le Monde, la vie qui avance dans ces deux communes d'Amazonie...alors que plusieurs années après sa construction, de l'eau en a coulée...sous ce fichu pont !

5 novembre 2014

Une souris et...Lery Laura, mi-muse, mi-poète

Lery Laura est une amie. Une "amie du Monde", comme il est facile d'en avoir de nos jours. Je la contacte en été 2013 après être quelque peu tombé par hasard sur son profil linkedin: "Lery Laura es periodista, egresada de la Escuela de Comunicación Social de la Universidad Catolica Santo Domingo. Sus intereses están vinculados a la investigación periodistica, el arte, la comunicación social y las ciencias sociales en general. Trouvant que discuter avec elle pourrait être chouette, nos premiers échanges sont dans un spanglish moderne : "Hi I am seeing you are periodista (in linkedin) and I would really be pleased of speaking with you about life, work, etc...would you be interested ? Kind regards, Emmanuel from France." C'est alors qu'elle me répond : "Hola, sí, soy periodista. Trabajo en una revista dominicana, escribo artículos de economía y sociedad. Mi trayectoria no ha sido extenso, pero algo tengo para compartir. Empiezo contándote que me cuesta mucho escribir en inglés, pero you can translate this with google. Gracias por interesarte."

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Lery Laura, par Manu

Depuis ce jour, nous échangeons régulièrement sur la vie, le travail, la République Dominicaine, La France, les Alpes, les grenouilles, les fleurs...et quelle chance, Lery Laura et moi avons quelques centres d'intérêt en commun : la nature, la photo, l' écriture par exemple. Il est peu habituel d'entendre parler de cette île des Caraïbes dans les médias français, en dehors du tourisme. Alors pourquoi ne pas dépasser un peu les clichés et affiner sa connaissance du pays via cet échange interculturel ?

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Plage de Cabrera, République Dominicaine...et si on dépassait les clichés ?

Mais après cette brève introduction, je dois vous dire quelque chose...Lery Laura est aussi un peu poète. Mais ne le dites pas, hein, c'est un secret ! Et dans nos échanges, elle m'envoie notamment un de ses poèmes, XXX. Extrait choisi :

"...Y hablo de tristeza

No por estar triste - Lo juro.

sino porque es una palabra bellisima :

Tristeza, 

la tristeza,

Tristeza.

Es un cristal creciendo

en estos ojos cerrados

y temerosos de las sombras

y otros ojos que son apenas posibles."

Mais comme le dit José Marmol, poète dominicain né en 1960, au jour d'aujourd'hui, on ne vit pas de la poésie en République Dominicaine. Alors Lery Laura, pour palier à cet idéal, écrit sur la société dominicaine, dans le cadre de son travail...travail qui ponctuellement peut l'emmêner dans l'autre partie de l'île Hispaniola, en Haïti, comme à ce moment là.

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 Excursion professionnelle de Lery Laura en Haïti

Ces échanges interculturels entre une Dominicaine lambda et un Français lambda sont particulièrement variés, et permettent à chacun d'affiner un peu sa conscience internationale. Récemment, une des rares actualités de l'île commentée dans les médias français a été lié à la décision du gouvernement dominicain de dénationaliser une partie de sa population d'origine haïtienne. Historiquement, les relations entre les deux Etats de l'île sont tumultueuses, au niveau des politiques d'Etats en tout cas. En est-il de même au niveau de la population...Humm peut être, mais dans une moindre mesure sans doute. En tout cas, on pouvait lire quelques articles il y a un an dans les médias français. "En 1937, le dictateur dominicain Rafael Trujillo ordonna le massacre de plus de 15 000 migrants haïtiens noirs pour « blanchir la race ». L'année suivante, pour se faire pardonner par la communauté internationale, le tyran sanguinaire ouvrit les portes de son pays aux juifs allemands, blancs, persécutés par Hitler. Soixante-quinze ans plus tard, la décision du plus haut tribunal dominicain de retirer la nationalité dominicaine aux descendants d'Haïtiens provoque à nouveau la préoccupation de la communauté internationale et l'indignation des défenseurs des droits humains. Fin septembre, le Tribunal constitutionnel a jugé, de manière rétroactive, que les descendants des migrants « en transit », nés depuis 1929, ne pouvaient prétendre à la nationalité dominicaine." Concrètement, cette décision retire la nationalité dominicaine pour plus de 250 000 hommes et femmes d'origine étrangère [haïtienne]. Du discours de Grenoble...en République Dominicaine. Lery Laura, mon amie, m'a évoqué cette situation il y a un an. Bien sûr, elle n'est pas spécialiste de cela, mais en tant que citoyenne dominicaine, elle peut se sentir directement concernée par cette décision. Et on peut voir cette photo sur sa page facebook.

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Et puis parfois nous parlons aussi voyages. Lery Laura est notamment allé au Guatemala, et a passé plusieurs jours dans un village indigène du pays. Nous avons échangés sur ce thème, et elle m'a envoyé quelques textes décrivant cette expérience. Extraits choisis : "27 de noviembre de 2009. Estoy en un pueblo indígena y para mí todavía resulta muy impresionante el encuentro con esta cultura. Es gente muy silenciosa y tranquila. Los hombres y las mujeres mayores siempre caminan como quien va meditando. Desde niñaslas mujeres usan el huipil, un corte muy colorido que debe decir mucho sobre sus creencias pero que yo no entiendo muy bien todavía. La mayoría lleva muy largo el pelo, aunque en algunas jóvenes se puede notar una tendencia a abandonar esta costumbre. Las más viejas sí lucen con orgullo el pelo canoso que cae sobre sus espaldas. Se ven hermosas y no sé por qué encuentro que hay tanto sosiego en las arrugas formadas sobre sus rostros. Yo pocas veces miro la vejez como algo natural, como algo justo o con lo que yo estaría conforme, pero aquí con frecuencia le encuentro algo de encanto. Supongo que es igual de triste aquí que allá, y que mi encantamiento se debe a que de todos modos estoy más distante de este pueblo y todavía soy incapaz de verlos como algo más que un patrimonio cultural. No sé si digo lo que quiero decir. Me refiero a que sé la miseria que hay detrás de los rostros arrugados que se suben a la guagua en que voy del trabajo a mi casa, allá en Santo Domingo, o al menos eso creo. Conozco a mi gente y sus penas, pero de aquí casi no conozco nada. Sé que esta gente padece de muchas cosas, pero no soy capaz de ver esos dolores en sus rostros, como hago cuando veo a un dominicano. En fin…Ya dije que son gente muy reservada, pero un saludo no falta nunca cuando una se cruza con ellos por la calle o algún camino. Se limitan a decir buenos días o buenas tardes, pero lo dicen con una voz muy alegre, sobre todo las mujeres y niñas."

Enfin, nos discussions ne sont pas non plus trop politiques, et il est parfois tout aussi sympathique de comparer les formes et couleurs naturelles !

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Dans un jardin de Saint Domingue...(photos de Lery Laura)

18 décembre 2014

France/Rhône-Alpes/Ain - Une journée à Cerdon

Dispositif de mobilité internationale. Voilà un terme qui m'était inconnu lors de mon départ en Irlande, en 2007, relaté dans les pages historiques de ce blog. Il faut dire qu'en 7 ans, il s'en passe des choses. Alors que l'Irlande fonctionnait dans une économie en plein emploi, la crise financière est passée par là, et le pays est revenu à une croissance dans "la normale". Et puis quand on sort tout juste des études, il n'est pas forcément évident de connaître les dispositifs qui existent à côté du célèbre Erasmus...enfin, partir dans un pays anglosaxon pour affiner sa connaissance de la langue de Shakespeare et s'ouvrir à une nouvelle culture passe par un emploi, qui même s'il n'est pas toujours très utile à moyen terme, permet au moins de pratiquer un peu le pays et ses gens. Mais voilà. Comment partir en Lituanie, pendant quelques mois, sans avoir à apprendre cette langue à priori peu utile en dehors du pays !? L'Union Européenne offre cette possibilité via un dispositif, le Service Volontaire Européen. Et c'est via ce dispositif qu'Evgeniya, Bielorusse originaire de Pinsk et vivant à Minsk, se retrouve pour 6 mois à Lyon. Pourquoi faire un SVE ? Une question, plusieurs réponses : "j'ai décidé d'utiliser ce dispositif de mobilité internationale car je ressentais le besoin de partir du Belarus, et en quelque sorte de davantage me trouver" Et c'est donc pour 6 mois qu'Evgeniya rejoint Concordia Rhône-Alpes pour apporter une pierre à la vie de la structure, en compagnie de Giselle, d'Italie. Quelques mois après son arrivée, elle confie avoir affiner les objectifs de son expérience expatriée en France : apprendre sur le montage de projets Erasmus+; apprendre sur la culture française, et la vie de tous les jours. Et pour apprendre sur la vie des habitants d'un territoire au jour le jour, un des outils les plus puissants n'est-il pas l'échange avec eux ? Dans un centre-ville mondialisé comme celui de Lyon, ou dans un village reculé de ce que le géographe Christophe Guilluy appelle la France périphérique, ou du moins d'une France plus rurale et moins mondiale ? Oui, mais pour pouvoir échanger, il faut aller les voir. Et pour pouvoir aller les voir, il faut une voiture ! Et pour avoir une voiture, on fait quoi ? On demande à la pop loc ! Ben oui, bien sûr ! C'est donc en cette belle journée du 8 novembre 2014 qu'Evgeniya et Giselle profitent de leur première expérience d'expatriée en France pour s'en aller visiter quelques jolies places du Bugey : Pérouges pour commencer.

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Giselle, elle, a 19 ans. Son désir : exploiter ce dispositif de mobilité pour partir dans un pays de langue inconnue. Pas en France, dont la langue lui est connue, mais plutôt un pays du Nord : Danemark, Norvège, Suède. Malheureusement, les différentes organisations d'accueil dans ces pays ne fournissent aucune réponse positive, et c'est à Lyon qu'elle se retrouve. Et finalement, elle en est très heureuse ! Même si son français est déjà excellent, elle utilise cette possibilité de mobilité pour se déplacer en divers points du pays, affiner sa conscience de la diversité géographique et humaine de la France métropolitaine. Par exemple, en allant visiter le joli village de Cerdon.

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Puis vient la fin de journée...qui nous laisse le temps d'aller observer le coucher de soleil depuis le mont Balvay, sur la commune de Leyssard. Une belle journée, qui est rendu possible grâce à l'existence de ces programmes de volontariat européen...et des systèmes de "solidarité" locale, via le véhicule individuel notamment. De quoi continuer à intégrer le concept de la vertu de la mobilité entre quartiers, entre régions, ou entre milieux urbains et ruraux...permettant l'échange interculturel, le choc culturel, tant pour les citoyens étrangers que français.

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12 janvier 2016

Une souris et...Manu & co, expérimentateurs de territoires

Une expérience de mobilité régionale, nationale et internationale, que ce soit celles présentées et réfléchies dans ce blog ou celle de quiconque, revêt une dimension d'expérimentation territoriale, pour reprendre une expression utilisée dans une étude récemment survolée. Par territoire, utilisons la définition classique de l'étendue de surface terrestre sur laquelle vit un groupe humain. Ce qui fait territoire, c'est l'ensemble des interactions entre le groupe humain dans toutes ses composantes, et l'étendue de la surface terrestre concernée, dans toutes ses diversités. Le territoire s'aborde donc de façon globale : spatiale, humaine, économique, sociale, politique.

Une année à vivre et travailler en Irlande ou en Guyane représente une belle forme d'expérimentation territoriale. Passons ce stage de quelques mois à la DCU un peu limité au niveau social, même s'il m'aura permis de travailler au jour le jour avec des habitants irlandais, et prenons plutôt l'exemple de la vie en famille irlandaise (quelques semaines pendant les cours d'anglais, dans cette "autre époque" pourtant déjà relatée dans ce blog), ou, encore plus, de mon emploi dans un grand magasin au centre-ville de Dublin : servir des centaines de clients par jour et voire défiler l'intégralité de la société dublinoise du feu tigre celtique; du papy à l'accent incompréhensible à la bimbo venant se faire bronzer plusieurs fois par semaine. Où alors de Philippe, coloc amateur de bons films à Juliana, Brésilienne rencontrée à Dublin et recroisée à Cayenne.

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Expérimenter Phibsboro et Dublin...à faire, lecteur (jeune) adulte !

Expérimenter un territoire, c'est ce que permet aussi un chantier international, en amenant un jeune adulte, 18-30 ans le plus souvent, à découvrir d'autres environnements en participant de manière volontaire à la réalisation d'un travail d'intérêt général. A Laurenan, Peiye, jeune Chinoise de la vingtaine habitant au Japon depuis l'âge de 11 ans, et souhaitant s'installer en milieu rural, a ainsi pu expérimenter ce joli village en y rencontrant quelques habitants apportant, via leur engagement politique ou associatif, un peu de vie à la commune. Et puis à Laurenan, il y a aussi des jeunes qui pourraient être contents de rencontrer une habitante du Japon. Expérimenter d'autres territoires, même durant un cours laps de temps (quelques semaines à une année), a pour origine et conséquence une certaine motilité, soit une capacité à être mobile. Et cette motilité est un phénomène vertueux : la motilité progressive va crescendo, selon trois piliers : appétences, aptitudes, moyens. Elle repose sur des pré-requis, s'acquiert, se développe, s'apprend et se transmet. Les expériences accumulées au long de la jeunesse participent de cet apprentissage tant elles ouvrent une capacité d'adaptation, installent des repères, consolident les savoir-faire, favorisent l'anticipation devant les contraintes et les situations incertaines ou inconnues qui accompagnent la mobilité. Elles permettent de prendre confiance et d'appréhender la mobilité avec apétence et sans crainte. Elles sont propices à la prise d'initiative...ainsi, de petites expériences en petites expériences, quiconque le souhaite peut se former, développe des savoirs et capacités organisationnels, intègre une compétence sinon une culture de la mobilité.

Expérimenter un territoire permet aussi de doucettement réfléchir aux quelques représentations initiales qu'on a de celui-ci, puis de les dépasser. Sans oublier que les habitants qui y vivent peuvent aussi avoir des représentations nous concernant. Et c'est bien par l'échange et le respect réciproque qu'on peut facilement faire valser intelligemment ces quelques représentations. N'est-ce pas ce que dit un peu Giyeong-Jin, quand elle affirme que sa rencontre avec quelques jeunes habitants d'Europe lui a permis de se rendre compte qu'à quelques nuances culturelles et identitaires près, on peut s'entendre avec beaucoup d'autres Terriens, au niveau idéologique.

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Expérimenter le village de Mouleydier,

en rencontrant et aidant ses habitants, souhait d'Olivier,

jeune adulte congolais arrivé en France en 2014

Alors, oui, expérimenter d'autres territoires est une expérience que chacun devrait faire, un jour ou l'autre. Pour se rendre compte que même à l'échelle de Rhône-Alpes, beaucoup de choses sont accessibles. Passer d'Annemasse à Lyon, par exemple, permet typiquement de s'engager plus facilement dans une vie associative riche et variée, pour s'éduquer tout au long de la vie et faire de belles rencontres. Mais voilà. Comme pour toute nouvelle chose, il y a quelques freins. Matériels, cognitifs, psychologiques. Dans ce derniers cas, les déplacements seraient alors de plus en plus perçus comme une confrontation à l'inconnu exprimant une difficulté et souvent  une crainte à sa projeter hors de son territoire de référence. Et il y aurait quelques profils types de jeunes par rapport à la mobilité...du jeune mobile au jeune décroché. Mais dans ce domaine là, comme dans beaucoup d'autres, résilience il y a. Alors, ami lecteur, je t'en conjure : n'ai pas peur, ose, et expérimente les mobilités régionales, nationales et internationales !

1 mai 2016

France - Une journée à...Adissan, Malestroit, Rennes, Grenoble, Grenay, Le Mans...et tant d'autres !

23 janvier 2010. Un samedi après-midi à faire la sieste au fond du lit. A peine rentré de mon expérience guyanaise, je m'installe temporairement à Lyon. Autant dire qu'après une année en Amazonie, les premières semaines lyonnaises sont grisâtres, dans le ciel et dans l'esprit. En ce jour, voilà qu'il y a un forum de l'emploi dans l'ESS dans une salle à proximité de mon lieu de vie. J'y vais ? J'y vais pas ? Allez, rien à perdre, ce peut être intéressant. 16 heures. Au détour d'un couloir, j'aperçois un stand : "bonjour. Qu'est-ce que vous faîtes ? - Notre association propose à toute personne de réaliser des volontariats, notamment des chantiers internationaux. - Ah, sympa. J'étais en Irlande puis en Guyane précédemment, donc j'imagine bien l'utilité de ce projet pour les jeunes adultes. Ok, laissez moi un CV. Ok ! Bye." Juin 2010. Un dimanche soir. Il fait nuit. Il pleut. J'arrive à Pierre-Bénite, près de Lyon, au Petit Perron. Suivre une formation d'animateur. L'animation ? En voilà un thème nouveau. Car durant ma vie étudiante, je ne l'associais qu'aux centres de vacances et de loisirs, et oh non, cela ne m'intéressait pas. Mais là, c'est différent. Animer un chantier, dans un espace naturel, avec des adultes de différents pays. Pourquoi pas. C'est original, ça change, ça permet d'apprendre de nouvelles choses. Et animer un groupe, cela peut être utile dans pas mal de boulots, a priori. Une semaine. Intense. Du bonheur. Du plaisir. Des oies dans le jardin. De la pluie. Des rires. Des animations, notamment une un peu choquante sur l'interculturel : le jeu de l'Albatros.

PHOTO WEEK-END 13 NOVEMBRE

Soutien aux victimes des attentats du 13 novembre

Juillet et août 2010. Deux chantiers. Guissény, petit bijou que son site naturel et ses plages. Gex, la Haute-Chaîne. Une semaine en refuge. Novembre 2010. Il pleut à Amiens. Nous écoutons l'excellent spectacle de Franck Lepage. C'est parti, je me propose pour rentrer au CA de l'asso. Pour gérer. Pour apprendre. Pour rencontrer. Pour réfléchir. Et si on osait ? J'ose. Pourquoi pas. Peut-être. Une première année de formation, et là je vois toutes ces personnes passionnées par ce beau projet. Des bénévoles, des volontaires, des salariés...des soirées à débattre, à discuter de ce monde difficile. De l'embauche d'un salarié à la préparation des temps de vie associative. C'est cela, rejoindre la vie associative, c'est se former, en plus de rencontrer. Des espaces d'engagement pour tous, par tous. Mais au final, tellement à y gagner. Et tellement d'échanges riches et variés. Quelques exemples. Léa, octobre 2011: pour moi c'est ça Concordia, amener à se poser des questions sur comment on a vu le monde et la société jusqu'ici et comment on aimerait la voir et comment on se positionne par rapport aux autres avis. Benoît. décembre 2011: Mon texte de référence à moi, ce n'est pas la Constitution française, c'est notre Projet éducatif. Mon projet de société à moi, ce n'est pas le travail, c'est l'Engagement. Ma capitale à moi, ce n'est pas Paris, c'est Avricourt. Hugo, juin 2012 :  que veut dire travailler à l'articulation éduc nationale - éduc populaire ? Serions nous les supplétifs de l’État ? Seuls des adeptes du tout État et du formatage des esprits peuvent être pour : l'educ pop est faite pour tous par tous, là où il y à faire, là où on veut la faire."

Août 2014. 4 ans plus tard, j'ai de nouveau un créneau estival pour animer. Avec 4 ans d'expérience et de vie en plus. Forcément, on évolue. Avec ce public de jeunes adultes, cette tranche d'âge bien particulière qu'est la période 18-25; Laurenan. Elisa, petite Italienne qui se lance dans la vie étudiante. Monica, de Barcelone. Et tous ces gens, ces habitants qu'on n'aurait pas pu rencontrer sans ce projet d'animation territoriale. Magnifique. Puis, Salonique. Eté 2015. Deux nouveaux projets, Pont-du-château et Mouleydier. Car je le sais, mon prochain poste salarié ne me permettra sans doute plus jamais d'animer...et car à 34 ans, la différence d'âge devient sacrément importante avec les 18-25. Une matinée à photographier la Dordogne se réveillant. Ah, ces rivières ! Puis un déplacement à Vienne, Autriche.

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Dans un tram de Vienne, avec des potes, partenaires internationaux du projet

Et sur 6 ans, des réunions, week-end de travail, projets dans 20 départements de France métropolitaine. 1/4 du territoire. Avricourt, Malestroit, Adissan, Grenay, Saint-Caprais de Bordeaux, pour citer quelques communes découvertes. De quoi voir un peu du pays. Découvrir le viaduc de Millau ou l'arrière pays montpelliérain. En ce mois de mai 2016 se termine cet engagement bénévole. Ouf ! Ce fût long, mais intense. Plus de CA. Plus de bureau. Plus de dimanche après-midi à rédiger un compte-rendu sous le soleil. Alors maintenant, que faire de ce temps libre ? Autre chose ! Et tellement de nouvelles envies. Toujours rester adhérent, bien sûr, car on ne se lasse pas d'un projet qui permet de se sentir un tout petit peu plus concerné par à peu près tout. Mais surtout, (presque) plus de bénévolat pour un (long) moment !  6 ans. Une belle page se tourne. Merci à tous. Et que vive l'éducation populaire et le service volontaire international, par tous, pour tous, tout au long de la vie.

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17 novembre 2017

Une souris et...Kero & Ocu, artistes roumains

Baigner dans le monde du travail volontaire permet notamment d'être au contact, sur des projets, avec des personnes exerçant une variété de métiers: tailleurs de pierre, charpentiers, animateurs professionnels...mais aussi artistes. En ce mois de septembre 2017, me voilà au contact de 2 artistes roumains venus participer à la réalisation d'une fresque au sein de la commune de Clermont-l'Hérault, dans le cadre d'un échange de jeunes Erasmus+: Kero et Ocu. Ce beau couple, originaire de Cluj-Napoca, est à Montpellier pour une dizaine de jours, dans le cadre d'une exposition et pour la réalisation de la fresque. C'est ensuite tout naturellement que je me penche sur leur page facebook pour m'évader un peu dans cet univers méconnu.

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Ces rencontres sont riches et elles proposent une autre manière de s'investir dans les sociétés humaines. Une autre manière de percevoir le monde. Une manière de s'engager avec plus de coopération, où, comme le propose le dernier editorial de Concordia, de devenir progressivement un esprit libre: "au départ, il y a toujours une impulsion individuelle, personnelle et singulière. Vouloir se rendre utile, aller à la rencontre de l'autre, voyager, intégrer un groupe et se découvrir des savoir-faire inédits. Se mettre en mouvement avec humanisme, voilà l'essentiel. Déplacer son centre de gravité vers un ailleurs, chercher le contact avec l'inconnu, pour mieux se comprendre ensuite soi-même. Devenir un esprit libre. Etre un esprit libre n'est pas aisé. Cela passe par la pratique, l'échange, sans relâche : afin que le mouvement initié se confronte à d'autres réalités vécues, y trouve de l'écho et puisse être encouragé.

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Les patrimoines historiques, environnementaux et sociaux sont nos biens communs. Ils ne se limitent pas à une commune, une région ou un pays. Ils sont des objets à défendre, à valoriser. Ils ont leur place dans l'espace social et nous devons poursuivre nos efforts pour les générations à venir. C'est l'intérêt général qui prime dans nos actions.

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Qu'en pensent Kero et Ocu ? Je ne sais pas. Ces deux compères sont allés peindre un mur ailleurs, laissant leur trace dans les jeunes esprits des héros de ces projets : Arpi d'Arménie ou Liza d'Allemagne. Il y a eu échanges sur le patrimoine historique des pays respectifs de chacun. Et aujourd'hui, les voilà sur un autre mur, quelque-part en Europe. Une vie de bohème sur les routes du vieux continent, dans les petits villages comme les métropoles mondialisées.

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Une belle rencontre, parmi tant d'autres, qu'offre le monde du travail volontaire.

27 décembre 2018

France/Guyane - Une journée dans la Guyane du Sud

10 ans se sont écoulés depuis cette année en Guyane. Déjà. Une autre époque. La vingtaine. Une autre réalité professionnelle. Mais avec cette chance infinie de vivre à l'époque du Web, il devient possible de continuer à lire et s'enrichir de ces petites expériences du quotidien. Via le web, il devient possible de se connecter à des activités humaines lointaines. Ecrivons une dernière fois sur la Guyane avec les photos des expériences et vécus de quelques copains de l'époque.

Débat mouvant par ici, débat mouvant par . Ou comment cet outil, fréquemment utilisé dans le monde de l'éducation populaire, l'est aussi dans ce petit coin d'Amazonie qu'est la commune de Maripasoula, par les agents du Parc amazonien de Guyane, dans le cadre de la semaine du développement durable. Les trente participants ont été invités à se positionner (physiquement!) en fonction de leur point de vue (d'accord/pas d'accord) vis-à-vis de sujets volontairement controversés:

- Un hôpital oui, payer non !

- N'importe quel Maripasoulien a le pouvoir de décider !

- L'abattis, c'est l'avenir !

Durant deux heures, ils ont débattus, défendu des arguments, se sont laissés parfois convaincre par le camp d'en face.

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Débat mouvant à Maripa Soula (photo d'ici)

Dave, un copain de l'époque, exerce une variété d'activités en lien avec l'animation socio-cuturelle en Guyane. L'une d'entre elle, présenté dans le numéro 21 de la revue "Une saison en Guyane", a consisté en la réalisation d'un documentaire présentant un rite de passage à l'age adulte d'un lycéen amérindien, au sein de la commune de Camopi: le Maraké. Comme l'indique sa page Wikipédia, le Marake est un rituel de passage de la puberté à l'âge adulte chez les jeunes Amérindiens du plateau des Guyanes, et constitue un moyen privilégié pour renforcer la cohésion du groupe et celle de la communauté. Son documentaire en est un beau témoignage...dans cette interview est présenté l'origine du documentaire: "pourquoi ce documentaire ? C'était une invitation de la part du chef coutumier Wayampi, Jacky Pawey, à filmer les danses Wayampi, pour conserver notre mémoire et pouvoir les montrer aux futures générations." En le regardant, on y voit une femme amérindienne expliquant la légende de la fourmi dans le Maraké : "c'est l'histoire d'un homme, un chasseur qui un jour avait tué des vautours...furieux, le grand chef des vautours descend de son royaume pour capturer l'homme. Il lui dit: maintenant, tu seras mon serviteur, va me chercher de l'eau. L'homme se rend à la rivière...en recueillant l'eau de la rivière, il constate que sa callebasse est percée de toute part. L'homme se demande : comment vais-je faire ? Sur son chemin, il rencontre la fourmi noire toucango. Il lui dit: je dois aller chercher de l'eau pour le chef des vautours, mais la callebasse est trouée. La fourmi prend la callebasse, la remplit d'eau et comme par enchantement l'eau reste à l'intérieur. L'homme se demande : quel est ce prodige ? Curieux, il touche l'eau et toute l'eau se renverse. Il se dit: comment vais-je faire maintenant ? Au loin, il aperçoit de nouveau la fourmi noire et il l'appelle, et de nouveau la fourmi vient l'aider. L'eau reste dans la callebasse, bien qu'elle soit trouée. L'homme rapporte donc la callebasse de nouveau, au grand-chef vautour. Depuis ce jour, la fourmi est l'alliée de l'homme. C'est elle qui lui transmet le savoir."

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Le Marake de Brandon, sur l'Oyapock

Un autre jour, Jody, un autre copain de l'époque, photographe (re)connu dans le département, est peut-être en train de couvrir une manifestation de ses belles photos dont certaines se retrouvent sur la toile.

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Jody

Et puis, ici ou là, une variété d'acteurs contribuent à la vie du Parc. Certains sont des scientifiques qui travaillent sur une variété de projets de recherche dans le but de mieux connaître les milieux naturels guyanais. D'autres sont des agents techniques divers et variés.

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Agents du parc amazonien de Guyane (photos du parc)

Photo Parc

Connaissez-vous cette espèce ?  Grenouille taupe-étoilée, crapaud fouisseur ou grenouille à nez de porc... autant de surnoms pour la Synapturanus sp. qui a la particularité de vivre sous terre. Elle a été découverte sur le Mont Itoupé en 2016.

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Voilà, clôturons cet article et la thématique "Guyane" en citant cette affirmation de mon manager de l'époque: "en un an ici, tu as juste dégrossi les grandes lignes du département. Il faut beaucoup plus de temps pour le connaître"...et laissons-nous imaginer quelques tranches de vie terrestre sur la base de ces petites rencontres internationales que le quotidien permet de faire facilement au jour d'aujourd'hui en Europe. A bientôt !

Photo Parc Guyane

7 juillet 2020

République dominicaine - Une journée à Saint-Domingue

Saint-Domingue, 05 Septembre 2019. Le Diario Libre, journal d'information dominicain, présente dans un de ses articles le proces de Maurice le coq, durant lequel le tribunal de Rochefort a donné raison ce jeudi à la propriétaire du coq Maurice, en déboutant de leur plainte les voisins qui l'avaient attaqué pour nuisance sonore. Une victoire pour la ruralité, d'après certains. Mon amie Lery Laura me contacte, amusée, comme son amie qui lui a transmis ce message, lui flânant qu'ils sont divertissants, les problèmes du Premier monde.

Lery Laura

Manu: par premier monde, elle fait référence au monde occidental ?

Lery Laura: en l'occurence, elle se réfère à l'Europe.

Manu: tu considères l'Europe comme le premier monde ?

Lery Laura: ben oui. C'est une expression qui se réfère à l'ensemble des pays dont les citoyens ont un niveau de vie élevé. Cela ne fait pas référence à son âge, exactement. Vous ne l'utilisez pas en français, ou veux-tu dire que le terme peut être questionné ?

Manu: non, pas vraiment, il me semble. Et me vient à l'esprit une  interrogation: Y a-t-il des ressentiments, en République dominicaine, vis-à-vis de l'Europe ?

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Plage El Valle

Lery Laura:  en général, non. Il y a de petits groupes qui, dans le juste désir de reconnaître la valeur de notre héritage afro, sont un peu polarisés contre la partie blanche. Mais ils sont très rares. Aussi les gens avec une position politique anti-impérialiste en général, qui vivent ceci très sérieusement. Mais je ne pense pas qu'il y ait du ressentiment. Le Dominicain "moyen" n'a pas assez de formation politique pour développer ce ressentiment :).

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Plage de la province de Pedenarles

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Rio Las Cuevas, près de la ville de Padre las casas, ville d'origine de Lery Laura

05 Juillet 2020. La République dominicaine élit son président en pleine pandémie. "Après huit années ans de mandat de Medina et huit de Fernandez, il y a une fatigue logique de la population, mais, surtout, un ras-le-bol face aux scandales de corruption et au manque de réponse de la justice" écrit le journal Le Monde. Un ras-le-bol qui s’était exprimé dès janvier 2017 lors de « marches vertes », quand des centaines de milliers de personnes étaient descendues dans la rue – du jamais-vu dans ce petit Etat insulaire de 11 millions d’habitants.

Manu: que penses-tu de ces manifestations ?

Lery Laura: la République dominicaine est mon pays. Je suis heureuse de vivre sur un beau territoire, plein de surprises naturelles et très riche en termes culturels. Mais notre peuple subit les conséquences d'une institutionnalité très faible. Cela se traduit par un niveau élevé de corruption dans l'administration de l'État et des services publics précaires. Pour changer cela, nous, Dominicains, avons une très grande tâche devant nous. Le chemin qui nous attend est immense, en termes d'autonomisation des citoyens, mais ces dernières années, nous avons pris des mesures très précieuses. Trois mouvements citoyens, principalement ou initialement animés par des jeunes, ont été d'une grande importance dans ce processus. Tout d'abord, celui des parapluies jaunes, qui visait à obtenir un engagement du gouvernement à accroître les investissements publics dans l'éducation et à améliorer la qualité de notre système public. Nous avons pris nos parapluies dans la rue jusqu'à ce que l'engagement soit pris. Depuis 2013, l'État alloue l'équivalent de 4 % du PIB à l'éducation. La qualité ne s'améliore toujours pas, nous avons cette partie de l'agenda en suspens. Nous savons également que cette tâche ne peut être accomplie du jour au lendemain. Il n'en reste pas moins que nous avons besoin d'un engagement plus important de nos dirigeants en faveur de l'éducation. Cet engagement ne doit pas se limiter à des ressources, il doit également impliquer un grand effort pour administrer efficacement ces ressources et ainsi parvenir à une meilleure éducation du public.

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Los sombrillas amarillas (photo du web)

Le second mouvement est né de l'indignation suscitée par la corruption publique. C'était la Marche verte.

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Lery Laura, à une marche verte

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De nombreuses personnes indignées par la corruption et l'impunité sont descendues dans la rue pour exiger que les fonctionnaires corrompus soient traduits en justice et même que le président de l'époque, Danilo Medina, démissionne en raison de son manque de volonté à lutter contre ce problème. Cette marche n'a pas eu de résultats concrets de type X nombre de soumissions ou X nombre d'arrestations pour corruption, et le président n'a pas démissionné. Mais elle a eu un poids politique important, car l'image de la corruption incontrôlée du gouvernement s'est imposée dans la population. De nombreuses personnes qui étaient autrefois plus ou moins tolérantes à l'égard de la corruption ont cessé de l'être. Le gouvernement dirigé par Medina a perdu de sa popularité, mais il est resté très fort. Les programmes sociaux d'aide économique et alimentaire ont eu un impact significatif sur la préférence électorale des populations les plus pauvres, de sorte que la possibilité que le parti au pouvoir quitte le pouvoir n'a pas été clairement prévue. Mais il y avait plusieurs articulations qui l'affaiblissaient.

Le troisième mouvement est apparu en février dernier, lorsque les autorités ont suspendu les élections municipales en raison de problèmes technologiques, semble-t-il. Alors les jeunes ont lancé un mouvement pour la démocratie. A cette occasion, les citoyens se sont habillés en noir et ont demandé que les raisons de la suspension soient clarifiées et que de nouvelles élections soient organisées le plus rapidement possible. L'événement (la suspension des élections) était si grave qu'il a scandalisé des personnes qui ne participaient généralement pas aux mouvements citoyens. Mais aussi parce que cela se passe dans une situation électorale, toute l'opposition politique manifestait, ce n'était plus seulement les habituels inquiets (la classe moyenne). De cette façon, l'ampleur du mouvement semblait plus grande que les deux précédents. Cette fois, parmi les moyens de manifester en faveur de la démocratie, il y avait les cacerolazos. À 8 heures du soir, nous sommes sortis sur les balcons pour jouer des casseroles pendant cinq minutes, et nous nous sommes tous sentis surpris et heureux de participer à ce grand concert que pratiquement toute la ville a offert. Les gens se sont sentis unis dans leur but, et le sens du village, de la communauté, est devenu plus fort. Le mécontentement était si fort que lors des élections d'hier, le candidat officiel a été battu malgré le fait que le gouvernement ait investi une quantité immense de ressources dans les programmes sociaux et l'aide, espérant obtenir des votes favorables des bénéficiaires et de leurs proches.Le nouveau président n'est pas particulièrement populaire. Beaucoup de gens le perçoivent comme la seule option qui pourrait faire sortir le LDP du pouvoir à ce stade, mais sans qu'on s'attende à ce qu'il mette en œuvre des transformations majeures. Je pense que l'œil du citoyen est plus fort et cela devrait mettre la pression sur le nouveau gouvernement.

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Mouvement pour la démocratie (photos du web)

D'une certaine manière, c'est une percée. J'espère que le nouveau gouvernement sera à la hauteur des exigences de ce peuple.

Manu: tu te sens militante politique ?

Lery Laura: non. Mais je suis une romantique et je soutiens des causes sans issue.

Manu: quel a été ton niveau de participation à ces trois mouvements citoyens ?

Lery Laura: je me suis très impliqué dans le mouvement des parapluies jaunes. Dans la marche verte, c'était moins. Je n'ai assisté qu'aux appels les plus importants des organisateurs. J'ai assisté à deux ou trois manifestations de ce mouvement. Dans le mouvement pour la démocratie, idem.  Soutenir le mouvement sans s'engager auprès des organisateurs.

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Tu aimes ton pays ? Oui. C'est ma maison.

5 décembre 2020

Canada/Quebec - Une journée à Chibougamau

Avril 2008. Sur un forum, je discute avec Helen, Québécoise de Chibougamau. Vous n’avez jamais entendu parler de ce nom ? Peut-être associez-vous le Quebec à ses deux principales villes, Montréal et Quebec ? Chibougamau est une petite bourgade de 7500 âmes située dans la région administrative du Nord-du-Québec. Un de ces bouts du monde dont on n’entend jamais parler en Europe. Alors aujourd’hui, parlons-en un peu ! Helen m’en parlera, elle, en Haute-Savoie. En effet, nous sympathisons rapidement, alors je lui propose de venir découvrir un petit coin du bassin lémanique pendant 10 jours. Et depuis cette autre époque, nous discutons fréquemment…mais les aléas de la vie ne nous ont pas encore permis de nous revoir. Comme ce blog se consacre aujourd’hui principalement à présenter des tranches de vie des copains de la planète, c’est aujourd’hui d’une tranche de vie québécoise dont nous allons parler.

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Chibougamau, Quebec, Canada

Helen naît en 1980 dans cette petite ville d’un père «blanc» et d’une mère «Cri». Avec ces « », prenons du recul concernant toutes ces catégorisations sociales tellement habituelles mais si malheureuses. D’autant plus malheureuses, qu’ elles sont en l’occurrence impactantes dans le Nord québécois. Le toponyme de Chibougamau contient les racines cries «Shabo» (au travers) et «Gamaw» (lac), de sorte que Chibougamau signifierait : lac traversé de bord en bord par une rivière. Certains penchent au contraire pour le sens innu «lieu de rendez-vous». Les «Cris» sont l’un des peuples algonquiens d’Amérique du Nord, Premières Nations (peuples amérindiens ni Inuits ni Métis) appartenant à un vaste ensemble autochtone du Canada et des Etats-Unis.

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Helen et sa maman, Chibougamau, 1980

Sa maman avait la réputation d’être la plus belle femme Cri de la ville. Elle était analphabète, et du fait qu’elle était mariée à un homme non Cri, avait perdu ses droits autochtones. Elle faisait de l’artisanat, et s’occupait d’enfants des autres, un peu sous la forme des services sociaux mais de manière plus traditionnelle, non formelle. Enfant, lorsque les agents du Fédéral venaient ramasser de force les enfants des familles autochtones pour les amener aux écoles résidentielles, sa maman se sauvait dans le bois pour s’y cacher. Personne n’arrivait à fuir, ou presque. Sa maman, si. Ces écoles résidentielles correspondaient à l’enseignement public en internat destiné aux jeunes autochtones. Comme expliqué sur la toile, Il s'agissait d'institutions destinées à scolariser, évangéliser et assimiler les enfants autochtones. Au cours du XXe siècle, le Département des Affaires Indiennes encouragea les internats pour autochtones afin de favoriser leur assimilation. Cette pratique, qui séparait les enfants de leur famille, a été décrite comme le fait de « tuer l'indien dans l'enfant ».

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Canada - Localisation des écoles résidentielles

Enfant, Helen était une des rares Cri dans son établissement scolaire et a également subi beaucoup de racisme systémique. A 14 ans, Helen quitte Chibougamau pour vivre avec son petit ami au sein de la communauté d’Oujé-Bougoumou. Ensuite, elle part vivre à Alma avec sa sœur qui étudiait, et lui garde ses enfants. Après un retour à Chibougamau, elle reprit l’école, termina son secondaire 5 tout en travaillant dans un restaurant comme serveuse. Puis, départ à Montreal, avec des retours fréquents à Chibougamau pour y travailler l’été.

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Le grand-père d’Helen, Chibougamau, 1980

C’est pendant un de ces étés qu’elle travaille au département du service au patients cris, et qu’elle tombe alors en amour avec eux. Elle se lance alors dans l’obtention d’un certificat universitaire à distance et une technique en soins infirmiers.

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Groupe de "2e année" en soins infirmiers lors de la simulation extérieure au centre d'études collégiales, Chibougamau, 2014

Helen repart ensuite à Montreal en soins infirmiers, et s’oriente à ce moment-là dans une carrière dans l’administration des établissements hospitaliers. Aujourd’hui, elle fait une belle carrière en étant directrice du département du Conseil cri de la santé et des services sociaux de la Baie James. En effet, comme l’explique cet article le manque de services de santé dans le Nord engendre le déplacement de personnes Cris dans le Sud, à Montreal par exemple. Or, un simple voyage peut générer jusqu’à plusieurs années d’éloignement pour les personnes concernées.

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En 2018, il y a eu plus de 21 000 visites de patients cris dans le Sud, pour la consultation de médecins spécialistes. De nombreux patients cris envoyés au sud pour y être soignés ont le droit d'être accompagnés d'une personne, par exemple un membre de leur famille, pour avoir un soutien voire un interprète. Dans le département dirigé par Helen, une cuisine commune, une salle d’activités et une salle spirituelle ont été construites.  Quand ils vont dans ces espaces, ils sont ensemble et oublient qu'ils sont à Montréal, explique Helen, ajoutant que beaucoup de patients sont des survivants des écoles résidentielles. Aujourd’hui, Helen a trois enfants et est installée à Montreal. Et un jour sûrement, nous marcherons de nouveau ensemble sur les routes de France.

17 décembre 2023

France/Lorraine - Découvertes artistiques

Partager sur ce blog un souvenir de 4 années de découvertes lorraines en un article. Plusieurs approches sont possibles, et cette fois-ci la synthèse sera conduite sous un angle artistique, sans trop développer les habituels « must-see » touristiques bien mieux documentés sur la toile. Déambulons donc dans quelques sites de Lorraine pour nous représenter cette région à partir de découvertes créatives. Quel que soit le lieu, quelle que soit l’époque, quel que soit le style. Evadons-nous donc quelques minutes en Lorraine entre 2019 et 2023.

Momo est passé à Nancy, mais si ! Promenons-nous dans cette ville hôte en compagnie de Marine, guide locale sympathique et compétente. Celle-ci m’expliquera notamment que l’artiste américain Momo fût invité à Nancy pour y réaliser une fresque sur le bâtiment actuel de la caserne des pompiers. On peut dire que le Street Art peut être considéré comme un Art nouveau à Nancy : la première œuvre street art officielle de la ville se nomme Giulia et date de 2015. Celle-ci a été réalisée par David Walker, l’un des plus grands portraitiste contemporain de street art, qui travaille à main levée. Giulia représente ainsi une artiste berlinoise amie de Walker.

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Giulia, par David Walker (photo de l'office du tourisme)

Un autre jour dans cette Lorraine-ci, il est possible de voir, au Centre Pompidou de Metz, une œuvre étonnante. Celle de l’artiste Refik Anadol, Machine Hallucinations. Il s’agit d’une NFT, « Non Fungible Token » une sculpture de données d’intelligence artificielle (IA) en vidéo. On peut y lire quelques explications sur cette œuvre envoutante : "l’exploration de l’esthétique fondée sur l’intelligence artificielle par notre studio invite à rêver un univers alternatif où les machines collaborent avec les humains pour imaginer notre existence dans le temps et créer des environnements alternatifs et multisensoriels. Nous utilisons les méthodes les plus innovantes à notre disposition et imaginons un avenir plein d’espoir où une relation symbiotique avec les machines nous donnerait de nouvelles idées, la connaissance et le pouvoir, non seulement de rêver, mais aussi de créer un monde meilleur".

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Créer un monde meilleur. Que peut en penser Raeda Saadeh, née à Umm Al-Fahem en Israël en 1977, et qui vit à Jérusalem, et dont l’œuvre «Vacuum» fut présentée à la galerie Poirel de Nancy lors de l’exposition sur les Arts de l’Islam. Cette œuvre de 2007, conservée au Frac (Fonds régional d’art contemporain) Lorraine à Metz, a sans doute plusieurs interprétations. En effet, l’explication proposée indique que « le titre, Vacuum, peut se traduire de l’anglais soit par « vide », soit par « aspirateur » dans vacuum cleaner. L’œuvre joue de ce double sens. La projection vidéo montre d’un côté un désert montagneux et de l’autre Raeda en train d’aspirer la poussière de ce paysage, tâche absurde et infinie. L’artiste palestinienne en rupture avec la tradition, vivant en Israël, montre ainsi métaphoriquement le « vide » et le manque de sens de la place qui est dévolue traditionnellement aux femmes dans la société. Elle se donne aussi à voir « prêchant dans le désert » en utilisant les seuls moyens mis à disposition des femmes. Le Frac Lorraine a acheté cette œuvre à l’artiste en 2010.»

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Créer un monde meilleur. Qu’en auraient pensés les soldats de la guerre de 1870, que le joli musée de de la petite commune Gravelotte présente si bien. Une promenade à travers ce musée permet de se remémorer que le dormeur du val de Rimbaud faisait référence à cette guerre franco-prusse. Ce jour-là, la pluie ne tombait pas à Gravelotte. Mais « beaucoup de soldats, eux, sont tombés à Gravelotte et autour de Metz. A Gravelotte, le 16 Août, on peut compter environ 32 000 morts, blessés ou disparus, Français et Allemands. Plus de 75 000 pour l’ensemble des combats des 14, 16 et 18 août. L’ampleur des pertes et la violence des combats marquèrent les esprits. Il faudra attendre la Première Guerre mondiale, incomparablement plus meurtrière, pour atténuer le souvenir de la guerre de 1870.»

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La guerre aboutit à l’annexion de l’Alsace-Moselle. Nancy devient alors, pendant les décennies qui s’en suivent, la plus grande ville de cette région de France. Et c’est à cette période que Nancy devint le leader français de l’Art nouveau, à travers l’Ecole de Nancy, menée par Emile Gallé. Une grande période artistique de l’Art en France, même si l’Art nouveau fut longtemps mal aimé. Ce petit amour de musée, celui de l’Ecole de Nancy, restera gravé dans mon cœur d’ex-Nancéien.

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Mais le mouvement Art nouveau s’arrêtera principalement avec la première guerre mondiale…et laissera place progressivement à un style artistique appelé, depuis les années 1970, Art déco…dont une ballade nancéienne permet quelques découvertes, comme celle du bâtiment du musée aquarium de Nancy. La façade du bâtiment a été réalisé à l’initiative de Lucien Cuenot, chercheur qui souhaitait créer un institut de zoologie en complément de l’institut d’agronomie. Les frères architectes de la famille André furent choisi pour réaliser le bâtiment. Cette façade, très novatrice pour l’époque, choqua beaucoup.

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Retour au centre Pompidou de Metz, à la rencontre d’Eva Aeppli, et son univers étonnant. Eva grandit à Bâle, où elle suivit l’enseignement anthroposophique de l’école de Rudolf Steiner. Du traumatisme de la Seconde Guerre mondiale, qu’elle vit aux premières loges à la frontière suisse allemande, naît son inlassable quête pour la dignité humaine. Elle s’installe définitivement en France en 1952, avec Jean Tinguely, son marin d’alors, puis ils rejoignent la colonie artistique de l’impasse Ronsin, où Constantin Brancusi vit aussi. Connectée au monde de l’art à Paris, Eva Aeppli noue de fidèles amitiés et collaborations avec des artistes de son époque. Néanmoins, elle se refuse à rallier les mouvements en vogue – Nouveau Réalisme, Pop Art ou abstraction lyrique – pour créer un corpus profondément original, dont les sculptures textiles à taille humaine constituent l’aboutissement.

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Eva Aeppli, La table. 1965-1967. « Premier groupe rassemblant plusieurs figures individuelles, La Table s’inscrit dans une longue tradition de représentation de la Cène. Si la disposition s’inspire de la célèbre version de Léonard de Vinci, Eva Aeppli réinvente les codes de l’iconographie chrétienne. La Mort, qui a volé la place du Christ au centre de la composition, règne en maître. Représentant l’Humanité, les femmes et les hommes conviés à cette table nous font face dans un regard inquiet ou fuyant, conscients, peut-être de leur égalité face à la mort. »

Une autre représentation de la cène pouvait être vue dans cette période 2019-2023. Celle de l’œuvre « Feast of Fools », de l’artiste Mag Med, présentée au Musée des Beaux-Arts de Nancy. Cette œuvre spectaculaire de près de 9  mètres de long, a été « entièrement réalisée à la main, à la plume et à l’encre de Chine par cette artiste née à Lyon en 1976.

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Ce musée des Beaux-Arts, situé place Stanislas, recoupe quelques œuvres célèbres artistes lorrains, comme « la Toussaint » d’Emile Friand. Cette peinture représente une famille au Cimetière de Préville, à Nancy.

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En Lorraine se situent les Vosges. Passons par Epinal et son musée des images : « Images d’Epinal, d’Orléans, de Toulouse, d’Inde…du 17ième siècle au 21ième siècle…Religieuses, éducatives, narratives ou simplement joyeuses, les images en feuille sont issues d’une culture, d’un temps qui nous est désormais lointain. Les lire et les apprécier ne peut se faire sans connaître leurs modèles, leurs techniques d’impression, les imagier qui les ont imprimées, ou les gens qui les ont achetées et accrochées sur leurs murs. Le musée nous présente cette histoire.

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La Lorraine, c’est aussi évidemment la période des Ducs. Stanislas, qui a fait construire une des plus belles places d’Europe, sera le dernier. Mais que montre-t-il, du haut de son trône ? La réponse est peu connue des Nancéiens, et il s’agit de Louis XV, roi de France. Toute une Histoire très bien racontée sur la toile, et qui peut aussi se retrouver sur les ferronneries de Jean Lamour.

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Car la Lorraine est une terre de Fer…et découvrir le monde sidérurgique lorrain, par exemple au musée de l’Histoire du Fer, fait aussi partie de belles petites histoires du territoire.

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Alfred Renaudin. Longwy, 1936

N’oublions pas le monde la Faïence, comme quelques belles pièces du château de Lunéville.

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Rediscutons avec Marine, qui nous présente également une belle mosaïque située près de la place Stan. Celle-ci est, comme d’autres du même artiste, inspirée de la mythologie. On peut y voir une partition, qui constitue un extrait de la Walkyrie de Wagner, faisant référence à la mythologie nordique. On peut voir Odin être soumis à la tentation de prendre l’anneau rempli d’or.

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Finissons enfin cette introduction à la Lorraine avec une autre rencontre nancéienne pendant ces 4 ans, celle d’Hélène, dont le travail, composé de gravures, de monotypes et de céramiques, est à découvrir.  Son travail, expliqué sur son blog, invite à retrouver la fragilité du monde de l'enfance. Pour créer ces images, Hélène utilise un procédé d'impression non reproductible appelé monotype. Ce procédé atypique permet d'obtenir des effets de matière qui rappellent l'onirisme des rêves. Céramiques et bijoux sont autant de pièces autour du thème de l'enfance. Crées en faïence et décorées à la main aux oxydes, ces pièces en volume complètent les recherches graphiques d'Hélène.

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Cet article illustre donc, sur le thème de l'Art, 4 ans de vies professionnelle et personnelle à Nancy. Une ville attachante. Terminons cette expérience par un dernier café à la brasserie l'Excelsior. Une page se ferme. Bye-Bye la Lorraine...Bonjour l'Espagne !

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