France/Guyane - Excursion sur l'Oyapock: Camopi
"Après cela, tu pourras dire que tu es allé au fin fond de la Guyane !" C'est en ces mots que mon chef résumait cette mission de 5 jours sur le fleuve Oyapock, de Saint-Georges à Trois Sauts en passant par Camopi et son opposée, Vila Brasil.
Bien sur, mes tâches étaient nombreuses et je n'étais pas là pour faire du tourisme! Mais il est vrai qu'en ce lundi 2 février, c'est le cœur joyeux que je rejoins une équipe de la circonscription académique et m'en vais pour une excursion qui s'avérera mémorable. Le trajet de Cayenne à Saint-Georges peut paraître long et monotone...mais des divertissements existent. Typiquement: compter le nombre de voitures abandonnées aux mains des garimpeiros, ces clandestins brésiliens à la recherche d'or dans la jungle amazonienne, et particulièrement en Guyane...Cette route, relativement dangereuse la nuit en terme de sécurité, a vu l'installation d'un poste de contrôle de manière à baisser le nombre de braquages. Lors de mon aller-retour au Brésil pour le nouvel an, j'avais comptabilisé 52 voitures...les éclats de balle sur l'express du milieu font froid dans le dos, peut-être ont ils été tirés après-coup ?
Arrivée à Saint-Georges, petite commune que j'apprécie particulièrement pour son ambiance calme et latine. Je n'y vivrais probablement pas, mais c'est une commune à voir en Guyane. Comme à Cayenne ou Kourou, quelques chiens errants, ici ou là. Un cas de rage avait été diagnostiqué ces dernières années. Petit problème dans la gestion des déchets ici, semble t'il ?
J'arrive avec l'équipe au point de départ de l'excursion, saut maripa, considéré par certains comme le plus beau des sauts (rapides) de Guyane. C'est parti pour plusieurs heures de pirogue. L'Oyapock est le deuxième fleuve de Guyane par son importance et fait 370 km de longueur. Beaucoup moins habitées que celles du Maroni, les rives restent ainsi davantage sauvages...Quelques petits villages, souvent dépendant de l'orpaillage, existent tout de même sur la rive brésilienne.
Après quelques heures de trajet, arrivée en début de soirée à Camopi, découverte du village, réunion de travail et départ pour l'autre rive, Vila-Brasil, un village ou réside une cinquantaine de résidents permanents. Ce site explique que "tout n'y est que commerce: bars-dancings, épiceries, menuiseries, restaurants...il a dans un premier temps été construit pour alimenter les sites d'orpaillages en matériel, carburant et nourriture", et il profite maintenant de l'argent dépensé par les amérindiens (RMI et allocations familiales). Ainsi, ici, on paye en reis, en euros, ou en or. L'orpaillage clandestin, sujet que je traiterai dans ce blog, n'est pas une mince affaire...En tout cas, belle maison d'hôte et accueil très sympa du couple de brésiliens qui le tient. Quant à la vue, no comment !
Averse au cœur de l'Amazonie guyanaise
Que dire de Camopi ? Ce village isolé, ou les conditions de vie ne sont pas faciles pour les personnes du littoral ou de métropole, ne laisse pas indifférent. Certaines personnes, comme ce directeur d'école (la photo n'est pas celle du directeur) au sacré parcours, y sont depuis plusieurs années, et se battent remarquablement pour faire avancer l'école. Des personnes amérindiennes envers lesquels la politique sociale française a, d'après certaines études, artificiellement développé des besoins et intensifié la situation de "dépendance", avec comme conséquences possibles un alcoolisme croissant et des taux de suicides importants, même si d'autres facteurs sont probablement en cause. En effet, l'Etat a introduit le RMI et les allocations familiales dans la vie des personnes de ces villages. Une discussion intéressante avec le directeur guadeloupéen de l'école du village de Trois Sauts, explique l'évolution qu'il perçoit au sein du village. Il y a encore dix ans, les habitants ne cherchaient à descendre à Saint Georges qu'une fois par an...avec l'arrivée des aides sociales, il est devenu fréquent qu'ils descendent l'Oyapock une fois tous les deux mois, notamment pour utiliser cet argent dans l'achat de produits de consommation. Bien sur, je ne me permettrais pas de donner un avis sur ces politiques sociales de l'Etat. Mais vous imaginez les questions de fonds que cela pose, par exemple dans le cas de l'Education Nationale. Plus de 2000 enfants ne sont pas scolarisés en Guyane, (d'après le quotidien France-Guyane d'aujourd'hui) certains viennent de ces communes. Ces personnes amérindiennes sont eux aussi confrontés à cette globalisation de l'économie. Imaginez aussi qu'Internet arrive au sein des villages amérindiens. Quel sera l'effet sur la vie quotidienne des habitants de ces villages ? Je vous invite à lire cet article, écrit par un enseignant de Camopi, qui y explique son rôle, et la vie de tout les jours, avec en bonus quelques photos. Nous sommes en zone protégée du tourisme, et l'accès à Camopi et Trois Sauts nécessite une autorisation préfectorale. Photos de personnes interdites !