France/Guyane - Remerciements
Ce premier article en guise de conclusion, je le consacre à toutes les personnes qui m'ont aidé à la réalisation de ces projets dont je parle sur ce blog depuis maintenant de 3 ans. Tout d'abord, par envie de transparence, je tiens à remercier mes parents qui ont eu un rôle important en m'aidant à m'installer en Irlande. En m'avançant le financement de mes cours d'anglais en avril-mai 2007, ils m'ont permis de m'installer plus tranquillement et surtout de me laisser le temps de trouver un emploi de qualité, donc d'avoir diverses une expérience professionnelle et de valider un séjour de presque un an sur l'île d'Emeraude...ce séjour ayant été primordial dans l'obtention de ce poste en Guyane française et dans la réalisation de cette expérience parfaitement dans la lignée de la construction d'un projet personnel et professionnel. Merci beaucoup à mes parents donc, qui ont en plus fait la démarche de venir découvrir la Guyane, ce qui leur a surement fait autant plaisir qu'à moi. Il est certain que cette aide m'a été précieuse en 2007, mais de faibles ressources ne doivent pas empêcher quelqu'un de partir vivre une expérience loin de ses cadres. Je pense que le plus important est de garder un peu d'argent sur un compte à part pour financer un éventuel retour en cas de pépin dans le pays expat ou dans le pays d'origine. J'ai rencontré des personnes qui sont arrivées en Irlande avec environ 500 euros. Ça fait peu, c'est certain, mais avec un brin de détermination et de débrouillardise, elles sont arrivées à s'installer et à trouver un job, dans une économie certes très favorable à l'époque. Dans tous les cas, partir travailler ailleurs vaut vraiment le coup.
Ce séjour en Guyane m'a permis de rencontrer de nombreuses personnes avec qui j'ai noué des relations de qualité. Je pense à ma colocataire durant 8 mois, et dont le parcours professionnel m'inspire particulièrement, je pense à Hervé, mon compère bénévole avec qui j'ai parcouru les plages, je pense à Eric qui aura été toujours là et en particulier le week-end ou j'avais besoin de lui, je pense à Steph et Lola, qui m'ont hébergé à deux reprises. Je me suis fait un groupe de potes grâce au couchsurfing, et ai pu découvrir de super personnes: Dave et Ophélie, Claude, Delphine, Elisa, Audrey, Jody pour ne citer qu'eux.
Il y a aussi Marc et Alain, deux ingénieurs civil guyanais avec qui je travaillais et qui ont su m'intégrer au service et me faire apprécier ce département, il y a bien sur les kouroutiens (Ludo, Caro, Kamal, Sandra, Alexandra, Joachim pour ne citer qu'eux). Et puis je n'oublie pas Raph, Juliana, rencontrée à Dublin et recroisée à Cayenne, Marie, Sylvia, Eddy et toutes les personnes avec qui j'aurai partagé quelque chose à un moment ou un autre. Et un petit clin d'oeil aussi à Babzy, commentatrice de choc ! Travailler sur des projets sur un territoire donné, que ce soit en France métropolitaine, dans les DOM ou dans n'importe quel pays, nécessite un minimum d'engagement dans son projet professionnel. Dans ce sens, j'ai eu une chance de rencontrer des personnes passionnées et passionnantes tout au long de cette expérience professionnelle. Je pense à deux Inspecteurs de l'Education Nationale avec qui j'ai partagé la pirogue m'emmenant sur le Maroni et l'Oyapock et pleinement investies dans leur tâche de superviser et d'améliorer l'enseignement du premier degré dans leurs circonscriptions. Comprendre le fonctionnement de l'Education Nationale, qui plus est dans le contexte guyanais, est particulièrement utile. Ajouter une brique aux constructions scolaires du département le plus jeune de France, comprendre la relative critique de nos compatriotes guyanais vis-à-vis de l'État, avoir une première perception de l'Amérique du Sud, et tout simplement avoir une vision plus complète de la France, sur les plans historiques, géographiques et culturels, fait partie de ce que peut apporter une expérience en Guyane. Merci à vous tous pour tous les moment de qualité passés en votre compagnie !
France/Guyane - Retours au vieux port de Cayenne
Le vieux port, beau site pour l'observation des oiseaux limicoles des vasières et mangroves.
Moucherolles pies en train de faire la maison (à gauche) et les bébés (à droite)
Chaque passage sur ce site m'offrit la possibilité de quelques observations de qualité. Voilà une aigrette neigeuse.
Mais une sortie me fit vivre des émotions particulièrement forte. 9 octobre 2009. La saison sèche est là, et cette soirée, le soleil couchant nous offre un cadre d'observation absolument splendide. Des milliers d'oiseaux limicoles -oui, des milliers - passent autour de nous, observateurs avides de clichés et de moments intacts, remontant les vasières, longeant cette côte mobile pour le plus grand plaisir des yeux.
Vol d'ibis rouges, observation géniale sur fond de soleil couchant
Le soleil enveloppe la surface de l'eau de tout son éclat, et cette sortie hasardeuse illumine une année guyanaise remplie d'expériences très fortes. Mais voilà, mon contrat d'un an s'est terminé, et même si certains objectifs de ce projet n'ont pas aboutis, d'autres objectifs et une certaine réalité m'incitent à un retour en France métropolitaine, pour une durée indéterminée. Pas de boulot, plus d'appart, pas de moyen de déplacement, et toute la vie devant moi pour revenir un jour peut-être travailler dans ce département intéressant et accueillant. En ce 9 octobre, je laisse mes émotions vibrer à la vue de ce paysage naturel paradisiaque, et revisualise intérieurement nombre de moment vécues durant ce séjour qui restera gravé pour sa richesse tant sur les plans personnels que professionnels. En ce 9 octobre, j'ai la satisfaction d'avoir réussi de nombreuses choses mais la sensation que cette expérience guyanaise n'est qu'une première étape d'un projet professionnel et personnel plus conséquent qui me verra probablement reposer un pied ici. Car au bonheur d'avoir fait des rencontres si enrichissantes s'ajoute celui de mieux percevoir son histoire et son identité, en tant qu'individu mais aussi en tant que personne française parmi tous les citoyens du monde. En ce 9 octobre, le moment est gravé, les conclusions s'imposent et le retour en France métropolitaine se décide progressivement...
Un coucher de soleil comme clôture d'un séjour faisant rayonner les envies
France/Guyane - Excursion dans l'Ouest
Le paradis existe, il suffit d'ouvrir les yeux. Cette affirmation est particulièrement vraie lorsqu'on dors en Hamac au gîte Angoulême, sur la route de l'ouest guyanais, et qu'au petit matin une multitude de chants d'oiseaux réveille l'homme de passage pleinement assoupi au milieu de la forêt.
Coucher de soleil sur la forêt
Lever du jour sur la forêt
Cette forêt est toujours aussi envoutante et surprenante. Le gîte est un point de départ idéal pour une balade dans ses alentours, et c'est surveillé par le païpayo que nous nous y aventurons. un petit sentier, une rivière, des arbres majestueux, welcome to Amazony!
Le gite est sur une clairière aux nombreux arbres et arbustes fruitiers. Quant aux serpents collectionnés dans l'alcool, ils proviennent des alentours...
L'ouest, c'est aussi Saint-Laurent du Maroni et son marché aux multiples couleurs. Le marché le plus sympa que j'ai réalisé en Guyane, duquel on sent le Suriname. Il y a aussi ces petites cases sur le bord des routes, où des personnes, souvent bushinengés, vendent leur production de fruits et légumes. Puis, la route nous fait traverser Mana et nous fait arriver au bout de la Guyane, dans la commune amérindienne d'Awala-Yalimapo. Une petite commune aux habitations typiques, et un petit moment fort sympathique. L'ouest guyanais, c'est encore une autre saveur, qui se termine à Awala ou en remontant le Maroni, fleuve majeur de ce département et autre source de rencontres et de découvertes enrichissantes.
Vente de fruits sur le bord de la route, ouest guyanais
France/Guyane - 10,9,8,7,6,5,4,3,2,1...0
La visite du Centre Spatial Guyanais (CSG) offre l'opportunité de découvrir les salles de lancement ou encore le musée de l'espace qui retrace l'histoire de l'industrie spatiale européenne. Cette visite, gratuite (site industriel), est intéressante et permet d'accéder aux salles de lancement et autres bâtiments permettant l'envol des lanceurs Ariane 5. L'industrie du spatial apporte probablement à l'économie guyanaise et a abouti au développement urbain de la ville de Kourou. Une ville particulière, une fraction de l'identité guyanaise. Un autre exemple de cette diversité culturelle du département.
Assister à l'envol d'une fusée est forcément marquant. Je pense notamment à ce premier vol, de nuit, où le ciel illuminé laissait découvrir une bande de flamme énorme, alors qu'un bruit assourdissant enveloppait mon tympan. Un moment mémorable. Ci-dessous quelques photos d'un deuxième vol auquel j'ai assisté durant cette expérience guyanaise.
France/Guyane - De la forêt !
Le bassin amazonien s'étend sur 650 millions d'hectares de forêt primaire répartie entre 9 pays. Située au coeur de ce bassin, la forêt du plateau des Guyane revêt un intérêt écologique et biologique universellement reconnu. Comment le prendre en compte pour assurer le développement économique de la Guyane dans le cadre d'une coopération régionale Amapa-Guyane-Suriname-Guyana sans réduire les fonctions capitales de ces forêts tropicales? Cet article, dont certains éléments sont repris sur la description d'un projet financé par l'Agence Française de Développement (AFD) de Guyane, se veut une introduction sur le financement international de la protection/gestion/valorisation durable de l'environnement. Il est agrémenté par des photos d'une sortie en forêt, à la montagne des singes, vers Kourou. La montagne des singes: une belle promenade qui nous amène à un carbet avec une vue imprenable sur le littoral et l'intérieur de la Guyane...de la forêt, de la forêt, encore de la forêt !
La forêt guyanaise, un morceau européen de l'Amazonie
L'Agence Française de Développement constitue l'organe français de distribution de l'Aide Publique au Développement, dans les Départements d'Outre-Mer et dans les pays dits "en voie de développement". Dans un monde de plus en plus globalisé, cette contribution financière, seule véritable politique publique à l'échelle internationale, peut avoir un rôle dans la protection de ces biens communs. Aussi, un apport financier du gouvernement français pour la gestion durable de la forêt du plateau des Guyanes prend tout sens. D'autres services de l'État prennent aussi en compte le financement de projets de développement local dont la prise en compte de critères environnementaux est importantes. On peut penser aux subventions de l'ADEME pour le financement de constructions publiques selon une architecture bioclimatique peu consommatrice d'énergie. Le financement du développement durable doit ainsi nécessairement prendre en compte ses trois composantes: la lutte contre la pauvreté, le développement sanitaire et social (santé, éducation), et la protection de l'environnement. Ainsi, l'aide publique au développement peut, par des actions ciblées et peu onéreuses, encourager des pays dits "en voie de développement", selon une expression critiquable, à réduire le rythme de la déforestation, aujourd'hui responsable de 20% des émissions mondiales de CO2.
Ce projet de gestion durable des forêts du plateau des Guyanes, mis en oeuvre par le WWF, qui concerne le Guyana, le Suriname, la Guyane et l'Amapa, comprend 6 composantes, dont la gestion des aires protégées, la réduction des impacts de l'orpaillage, la mise en place d'une gestion forestière durable, la gestion et la conservation des écosystèmes aquatiques, la gestion et conservation des espèces, et une composante de communication et d'éducation à l'environnement. Aussi, la préservation des ressources naturelles, la réduction des effets négatifs des activités économiques, la préservation des services environnementaux ainsi que des savoirs et techniques des habitants des pays et de la Guyane sont autant d'éléments qui contribuent au développement socio-économique de la région. En matière environnementale, le projet contribue à la préservation de la biodiversité encore intacte de la zone.
Ce projet est un bel exemple de ce que ce petit livre accessible à tous traite: le financement du développement international. A l'heure du bilan de cette expérience professionnelle et personnelle, certaines réflexions sur ce que j'ai pu comprendre, notamment en travaillant avec deux ingénieurs civils guyanais qui m'auront fait aimé ce département, me semblent intéressantes à être échangées.
"La constatation que la Chine est devenu le premier pays émetteur de CO2 au monde ne doit pas faire oublier la responsabilité historique des sociétés industrialisées dans la consommation de ressources naturelles finies et la dégradation de l'environnement mondial. Ainsi, les émissions de CO2 de la Chine ont beau avoir dépassé celles des Etats-Unis, ses émissions par habitant restent encore très inférieures à celles des sociétés développées: moins de 4 tonnes de CO2 contre 20 tonnes par Nord-Américain, 10 tonnes par Japonais ou Allemand". Une première conclusion très simple est à mettre en valeur: dans les sociétés "développées" du Nord, il existe des disparités réelles entre les productions de gaz à effet de serre et l'empreinte écologique moyenne des pays. Un danois, soumis à une flexsécurité du travail et allant à son travail en vélo se sent-il pour autant moins heureux qu'un américain sans assurance-santé de qualité et qui utiliserait régulièrement de l'eau pour laver sa voiture? L'irlandais de 2010, vivant dans un pays devenu un des plus riches d'Europe en 20 ans, est il réellement contrarié de ne pas avoir d'autoroute 4 voies reliant Dublin à Galway, mais au contraire des routes simples, plus proches des pays dits "en voie de développement"? Il existe autant de modèle de développement qu'il existe de pays et la qualité de vie voire la croissance dans un pays n'est pas directement lié au niveau de développement de ses infrastructures.
La naissance de la politique d'aide au développement est souvent datée par le plan Marshall, qui oeuvra à la reconstruction des pays d'Europe de l'Ouest après la seconde guerre mondiale. W.W Rostow, dans son livre intitulé Les étapes de la croissance - Un manifeste non communiste, exprimait les différentes étapes de développement d'un territoire, de la société traditionnelle à l'ère de consommation de masse.
>> Prochaine étape: développement durable, décroissance, crise majeure, guerre?
La prise en compte de la composante environnementale tant dans les modèles de développement territoriaux que dans la vie de chaque individu devientindispensable en Occident et dans les pays industrialisés. Bien plus qu'une tendance à la mode, elle passe tant par l'orientation des politiques publiques vers un financement de projets durables (consommations énergétiques, énergies renouvelables, mobilité douce, agrandissement des parcs naturels, réduction des consommations d'eau etc) que par une évolution des moeurs à l'échelle individuelle. Car comme l'idée de base de la micro-finance d'assurer le développement d'un territoire à partir du financement de l'entrepreneur individuel du PVD, c'est aussi l'évolution des comportements à l'échelle individuelle qui aura des conséquences sur le développement durable d'un territoire dans son ensemble, et cette évolution sera d'autant plus forte si elle a impact limité sur le portefeuille de chaque individu ! Dans une Europe où nombre de sourires sont partis avec le précédent métro, dans une Europe en recherche d'identité et de sens, nombre de démarches collectives et individuelles se mettent en place, à l'image de cette démarche de covoiturage intéressante d'un ami annécien ou à celle d'une amie de ne plus manger de viande le soir pour limiter les gaz à effets de serre, provenant de son intestin comme de ceux de la vache :).
Comment faire pour que la planète supporte 8 milliards d'individu sans que de graves conflits, voire une guerre mondiale, apparaissent? Quand un débat sur l'identité nationale en France est lancé dans une visée électoraliste alors que si le niveau de l'océan monte vraiment, l'Europe devra se serrer les coudes pour accueillir bien plus de monde et le Monde se brasser de plus en plus, va t'on encore nous baratiner sur des discours nationalistes à visée électoraliste? Quand va t'on réellement apprendre aux métropolitains que d'autres concitoyens peuplent le Monde, ou encore que dans le passé, des ultramarins ont eu des postes très importants dans le gouvernement? Pourquoi ne pas parler de la malbouffe américaine, qui elle, a un réel effet sur la santé et la diminution des identités culturelles européennes? Bref, passons et revenons à des extraits de ce livre. "Les sociétés en développement occupent une place centrale dans la crise environnementale globale à un troisième titre: en tant que pourvoyeur de solutions. En effet, c'est en partie sur leurs territoires - qui abritent l'essentiel des "puits à carbone", des réserves de biodiversité et des sources inexploitées d'énergie propre à la planète - que se mènera demain la bataille écologique. Celle-ci est déjà engagée: des projets sont par exemple en cours pour favoriser l'exploitation durable des forêts tropicales grâce à des rythmes de coupes d'arbres compatibles avec la régénérescence des espèces végétables et la préservation de l'habitat des espèces animales. (...) Pour être victorieuse, cette vaste bataille pour l'avenir de la planète devra être menée via une collaboration active entre pays du Nord et du Sud. Car ces derniers hébergent, il ne faut pas l'oublier, l'essentiel du patrimoine environnemental menacé. La protection du patrimoine naturel qu'ils hébergent vaudra à certains pays en développement des ressources considérables sur longue période qui, intelligemment investies, pourront alimenter la croissance économique. Ce type de collaborations Nord/Sud est ce qui permettra aux voies de développement de s'émanciper des trajectoires de croissance non soutenables empruntées par les sociétés industrialisées". Ok, cet extrait peut être une source de débats légitimes et "violents", car l'Occident reste le principal pollueur, et les solutions doivent tout d'abord venir de changements importants en Amérique du Nord et en Europe. Mais développement et conservation de l'environnement ne sont pas incompatibles. Le Costa-Rica, pays développé d'Amérique latine, propose un modèle de développement particulièrement intéressant. L'ensemble de ses parcs nationaux et réserves environnementales représentent 26% de la surface de son territoire ! Voilà une synthèse de ce leadership mondial dans le développement durable, assurant la préservation de ses ressources naturelles et un écotourisme apportant des ressources financières indéniables. Un pays stable, démocratique, et dont la suppression constitutionnelle de l'armée en 1949 a permis l'apport de nouveaux financements pour la conservation de son environnement. Un modèle pour le futur ?
France/Guyane - Excursion aux marais de Kaw
Les marais. Nom à connotation péjorative chez nombre de personnes. Dans l'imaginaire populaire européen, n'étaient-ils pas associé à la maladie, l'insalubrité, aux moustiques voire au banditisme? D'où un certain nombre de mesures pour les détruire sur le vieux continent, avant que leurs multiples valeurs soient enfin comprises. Mais revenons à nos marais de Kaw, qui forment une des six réserves naturelles crées par l'État en Guyane. Cette réserve est la troisième plus grande de France de par sa superficie (94700 hectares) après celle des terres australes et celle des Nouragues (Guyane), et la plus vaste zone humide de France. Elle a été crée le 13 mars 1998 par décret à cheval sur les communes de Roura et Regina et englobe le petit village de Kaw. Etant classée comme Zone Humide d'importance internationale (convention RAMSAR), elle est aussi connue pour son fort endémisme et sa biodiversité exceptionnelle.
Emplacement des marais de Kaw (carte provenant du site web de la réserve)
Après avoir parcouru la longue route menant de Roura à Kaw, le genre de route dont on se demande si elle a une fin, nous voilà arrivant à 9h00 à l'embarcadère des marais de Kaw, où nous attendent un guide et un couple de métros bien sympas. Du 05 août à 9h00 au 6 août à la même heure. 24 heures pour visiter le petit village de Kaw, remonter le canal drainant la savane, photographier les zébus, oiseaux typiques, espérer voir un caïman, discuter avec les guides passionnés, puis s'endormir, écouter le bruit des marais et de la forêt...et se réveiller, au milieu de vagues d'humidité réveillant tous les habitants du marais...puis repartir.
Embarquement dans la pirogue...
La visite de la maison du marais permet la présentation des différents écosystème présents. La montagne de Kaw est formée, sur un plateau du sommet, d'une végétation basse qui devient haute et dense sur les versants souvent abrupts. Forêt typique intacte, la montagne de Kaw regroupe un certain nombre d'espèces endémiques. Toutefois, les marais et savanes couvrent l'essentiel de la réserve. Au centre de la plaine de Kaw, le marais que nous allons remonter, puis autour, des savanes arbustives plus ou moins inondées selon la pluviométrie et la période de l'année. N'oublions pas également les forêts marécageuses, qui forment souvent d'étroits couloirs le long des cours d'eau guyanais. Dans un premier temps, c'est le petit village de Kaw que nous visitons.
Puis voilà notre petite équipe débutant la remontée des marais, en découvrant la faune et la flore, tout en discutant des mesures de gestion et des liens entre l'homme et les marais, notamment à travers la pêche de l'Atipa. La remontée nous permet de découvrir nombre d'oiseaux typiques, tout comme cet élevage extensif de zébus. Un beau troupeau, un des rares troupeaux de bovins en Guyane.
Ces zébus vivent dans les zones de savane, en cours de drainage naturel en ce début de saison sèche, et au milieu des moucou-moucous, plante invasive qui a la particularité d'avoir une fleur thermogène (produisant de la chaleur), comme toutes les aracées. Une plante agréable à l'oeil, mais dont l'impact sur l'écosystème de la plaine de Kaw est à évaluer.
La remontée se poursuit à travers un très beau paysage de savane et de forêt. Nombre d'espèces d'oiseaux sont observables: aigrettes, cormorans, nombreux passereaux, ou encore les hoazin huppés, oiseaux dont les juvéniles possèdent des griffes les aidant à s'accrocher, tels certains oiseaux préhistoriques (photo 1 et 2: caciques cul-jaune, photo 3: grandes aigrettes, photo 4: moucherole à tête blanche, photo 5: hoazin, photo 6 et 7: cormorans viguas)
La remontée nous permet d'arriver au splendide carbet flottant et d'y déguster un ti-punch ainsi qu'un délicieux repas composé de plats guyanais. Installation dans le hamac, baignade, et sieste sont ensuite aux programmes de cette splendide journée.
Une nuit en hamac s'attend à nous, mais avant, profitons de l'après-midi !
L'après-midi débute par la remontée de la crique Wapou, l'une des sources des marais, puis de profiter pleinement du carbet, en se baignant, en observant, en pédalant sur les vélos flottants à disposition.
Coucher de soleil sur les Marais de Kaw
La nuit arrive et nous permet alors de vivre une très belle expérience: la découverte des caïmans. Les caïmans sont courants dans la réserve. Il en existe plusieurs espèces: le caïman à lunettes, le plus commun autour de la zone touristique, qui possède une aire de répartition large, du Mexique au nord de l'Argentine. On le retrouve en Guyane dans des milieux très variés, y compris dans les retenues des agglomérations du littoral, tels que les salines de Montjoly. Une autre espèce est le caïman noir, gravement menacé à cause de sa chasse intensive pour sa peau, et dont la présence dans les marais de Kaw est totalement protégée. C'est sur une pirogue que nous partons à la recherche de caïmans, autour du carbet duquel nous plongions dans la même journée :). La solution pour les attraper ? Les éblouir avec les lampes-torches, sans les laisser s'échapper de la lumière. Après quelques petites captures de petits spécimens, notre guide, arrêté au bord du canal, s'exclame d'un coup: "un caïman avec un anaconda dans la gueule". Dans ce moment mémorable, mon imagination débordante d'envie me laisse imaginer ça:
"Un caïman avec un anaconda dans la gueule !"
La réalité est toute autre...un petit caïman à lunette ayant attrapé un petit serpent d'eau. Les arrêts sur les berges sont fréquents, et après avoir attrapé un petit spécimen, notre guide part pieds-nus sur la rives pour revenir avec un animal de taille respectable...qu'il nous laisse prendre ! Drôle de sensation, beau souvenir et peu voire pas de risques, l'animal restant immobile...mais attention tout de même à ne pas laisser traîner ses mains !
Puis vint une nuit très agréable dans ces hamacs au coeur des marais, puis ce réveil inoubliable au milieu d'une brume mystérieuse, qui affirme cette sensation d'une Guyane envoutante et sauvage.
Une atmosphère particulière qui me rappelle, 8 mois après cette excursion, l'émotion qu'elle a pu généré. La visite des marais de Kaw est une étape intéressante d'un séjour en Guyane, elle réserve de belles découvertes et une nuit en carbet très agréable. La savane étant inondée en saison des pluies, il est parait-il intéressant d'y retourner à cette période et d'avoir une autre vue sur ce biotope. Malheureusement, le point négatif de cette sortie est le prix d'une excursion. les 24 heures avec nuit en carbet flottant coûte tout simplement...150 euros/personne. Le coût d'une visite de la Guyane: un des facteurs limitant tant les habitants du département que le touriste amateur d'Amazonie.
France/Guyane - L'orpaillage illégal, vu par la presse guyanaise
L'orpaillage illégal en Guyane est particulièrement médiatisé pour la double pollution qu'il génère: matières en suspension et mercure. Il n'est pas rare également d'entendre parler, dans certains documentaires, de l'insécurité liée aux attaques de mines légales par des garimperos. L'opération Harpie 2 a eu lieu en 2009. "La semaine guyanaise" a écrit de nombreux articles. Extraits choisis.
N°1332, 4-10 juillet 2009. "C'est une guerre des nerfs, une guerre d'usure que vit Saint-Elie. D'un côté, les gendarmes, constamment présents, à 9 ou 10, selon la relève. De l'autre les travailleurs clandestins de l'or qui - apparemment - ont déserté le bourg. Parmi ces étrangers en situation irrégulière, certains vivaient sur Saint-Elie depuis plus de 10 ans et pas exclusivement des Brésiliens. Avec ces dernières années, comme unique activité économique, l'orpaillage clandestin, ses commerces, ses emplois et son marché noir. "A leur arrivée mi-avril, les gendarmes ont d'abord mené une campagne d'information en prévenant les gens", raconte Rose Alexander, ancienne adjointe au maire, ex-agent de santé au dispensaire fermé depuis janvier 2006. Elle revient régulièrement dans la commune dont elle est originaire et possède une maison. J'ai vu trois phases de reconduite ces dernières semaines. Une fois les gendarmes en ont pris 20, une fois 12, une fois 17. En fait, ce sont les brésiliens qui viennent se livrer", indique-t-elle. Ce qu'un gendarme confirme: la plupart viennent d'eux mêmes car ils ont faim. On ne court pas après. Dans le bourg, une poignée de Brésiliens (à priori moins d'une vingtaine) restée sur place, connaît la chanson: "Segunda feira, seixta feira!": "lundi et vendredi" sont les deux jours de reconduites à partir de Saint-Elie. On les ramène en camion sur Petit Saut puis en pirogue", explique un gendarme. "Je suis venu me rendre", nous a indiqué, dimanche 28 juin, un Brésilien qui cueillait des oranges en attendant le lendemain. Selon les informations recueillies sur place, bon nombre d'illégaux se sont spontanément livrés pour repartir gratuitement au Brésil. (...)
Lac artificiel de Petit Saut. Nombre de sites d'orpaillage sont en amont.
Echange entre Frédéric Farine, journaliste, et une femme garimpero. "En forêt, nous avons tous le palu, à tour de rôle. J'ai eu encore une crise, il y a huit jours. Il ne nous reste qu'une tablette d'Artecom au camp. A la prochaine crise de l'un d'entre nous, plus de tablette." explique t'elle un brin fataliste. J'interroge Latidinia sur cette propension des ressortissants brésiliens à choisir l'aventure en Guyane. "Il faut comprendre les difficultés des classes défavorisées au Brésil. Qu'est-ce qu'il est possible de faire au Brésil pour des hommes qui ne savent ni lire ni écrire? De la maçonnerie, des charpentes: des travaux très mal payés là-bas. C'est une amie d'Altamira, ma ville d'origine au Para, qui m'a parlé de la Guyane en 2004" raconte encore Latidinia. "Elle venait d'en être expulsée après y avoir passé 2 ou 3 ans. Elle y vendait des vêtements, de la nourriture pour les sites d'orpaillage. Cela a bien marché pour elle en Guyane".
Lac de Petit Saut - Forêt noyée lors de la mise en eau du barrage
N° 1337 du 8 au 14 août 2009. Entretien entre ce même journaliste et un orpailleur du village clandestin de Zohia (région de Saul), secteur illustré sous le nom de "guérilla". "La plupart des gendarmes sont très bien entraînés, très bien éduqués. Mais pour une minorité d'entre eux, ce n'est pas le cas. Enfin, c'est sûr, ils ne sont pas violents, ils n'ont jamais tués personne sur un site" reprend Janilton qui explique travailler dans le secteur de Guérilla "depuis 2006". Pour lui, Guérilla n'existe plus. Alors qu'un an en arrière "en comptant l'ensemble des sites de ce secteur, on pouvait produire 12 à 15 kilos d'or en une journée! C'est fini maintenant. Et tout est cher ici.(...) Sur le problème de la violence entre garimperos sur Guérilla, Janilton dément: "il n'y a pas de violence, pas de meurtres à Guérilla, les villes de Guyane sont plus violentes que les sites d'orpaillage." Une affirmation contredite par l'instruction judiciaire en cours sur les crimes de Guérilla. "On a retrouvé 6 à 7 cadavres, dont certains abattus de balles dans le dos en 2007 et 2008" souligne une source judiciaire. Tout au plus, Janilton admet-il "des accidents, nombreux, dans les galeries qui s'effondrent". La galerie la plus profonde creusée à Guérilla ? "32 mètres", indique t'il. On apprend sur place comment les faire, puis on creuse à la pelle et à la pioche...Au Brésil, j'étais "motoboy" je faisais des courses en scooter pour une boutique à Manaus avant de venir en Guyane. Mais je refuse que mes frères viennent, c'est trop dur" poursuit-il. Sur la question écologique, Janilton a une parade: "Si on nous laissait faire, à notre départ, il n'y aurait ni trace de notre passage, ni de notre corotel (village d'orpailleurs)."(...) Sa présence en Guyane ? Il l'explique par le manque de perspective chez lui: "Au Brésil, il y a des terres avec de l'or mais le gouvernement n'autorise pas les garimperos à l'exploiter. J'ai étudié mais je n'ai pas eu l'opportunité d'avoir un bon travail dans mon pays" regrette-t-il.
Village sur le rivage brésilien de l'Oyapock. Un corotel ?
France/Guyane - C'est rare, non, la nostalgie ?
Parlons un peu de quelques groupes de personnes présentes en Guyane, à travers quelques anecdotes, réflexions et moments vécus. J'enrichis ces textes par quelques photos sans rapport.
>> Une pépite d'or pour la perle des Antilles
La Guyane possède tant par l'histoire que par l'actualité, certains liens forts avec Haïti, la "perle des Antilles" mais aussi un des pays les plus durement touchés par les catastrophes naturelles, dans un contexte de grandes difficultés pour sa population de satisfaire ses besoins de base. Malheureusement, notre Guyane n'est pas différente de tous les autres territoires, départements ou pays du monde, et j'ai compris à travers des discussions et la lecture des journaux guyanais qu'il existe au sein d'une partie de sa population une certaine méfiance voire une discrimination envers les Haïtiens. C'est toujours la même chose, quelque soit le territoire que j'ai côtoyé (la Suisse avec les Kosovars, l'Irlande avec les polonais): dès que dans un territoire donné une population étrangère ou d'origine étrangère est un peu trop nombreuse et un peu trop pauvre, elle est un peu trop mal vue et discriminée. J'ai vraiment le sentiment que c'est une réalité universelle. Aussi, dans le contexte d'explosion démographique que connaît la Guyane et avec toutes les difficultés et la peur que cela engendre, la politique d'immigration voulue par une partie de la population se devine facilement à travers les titres réguliers de l'hebdomadaire "la semaine guyanaise", avec l'exemple du N°1336 (août 2009): "Immigration: des chiffres et des affaires...Plus de 50 000 étrangers "non expulsables" en Guyane...Harpie fait chuter le nombre de reconduites!" Il est légitime que l'immigration fasse peur aux habitants de Guyane. Mais une autre chose est sûre, certains renvois sont terriblement injustes. Je vous laisse découvrir le blog lié dans la colonne de droite pour avoir un exemple frappant de ce qui peut se produire.
Partie de football à Suzini, Cayenne
>> Le Monde doit respecter le Brésil
Phrase interpellante, et d'autant plus frappante qu'elle était le slogan du gouvernement fédéral lors d'une publicité coupant la comédie romantique hollywoodienne "Shall We Dance ?", dans laquelle l'homme d'affaire Richard Gere, riche, élégant, blanc, décidait de se mettre à danser...la question existentielle du film étant: "va t'il quitter sa femme pour sa prof de danse?" Drôle de moment, difficile confrontation entre la réalité d'Oiapoque et celle d'Hollywood. Oiapoque, nouvel an 08-09, une ville d'orpailleurs, une ville aux infrastructures pires que celles des favelas de Rio (d'après une copine de la ville des J.O), une ville aux nombreuses princesas sirotant une caïpirinha, se disant peut-être qu'elle voudraient être cette prof de danse quand certains Français se disaient peut-être vouloir devenir Richard Gere, au même moment, en Europe. Hollywood, symbole de la culture de masse occidentale, reflet du rêve américain et de tout ce qu'il peut générer, de l'espoir à la souffrance, de la souffrance au sourire, du sourire à l'espoir. Ces princesas, certaines s'en vont traverser la frontière pour espérer trouver leur Richard Gere guyanais ou métropolitain, et du moins pour essayer d'obtenir un avenir un peu plus doré. Ces personnes brésiliennes, c'est une chance que j'ai eu de les côtoyer, notamment le dernier mois à Kourou, et je retiendrai cette triste comparaison d'une copine du moment connaissant l'Hexagone et la Guyane: "Ici, les hommes sont bien moins respectueux de nous, les Brésiliennes, qu'en France." Drôle de couples, entre le chercheur européen venu participer aux projets de la base spatial, ou entre le légionnaire parfois aussi, et la femme brésilienne. C'est une des réalités de la ville spatiale de Kourou.
Partie de football sous la pluie de Cayenne
>> C'est rare, non, la nostalgie ?
Ma dernière envie est d'écrire un petit mot pour ces princesses dominicaines, rencontrées au fil de l'année dans les rues de Cayenne, dont certaines ont une histoire proche de celle de Zulema, racontée dans "Princesas", film espagnol splendide, réalisé par Fernando Léon de Aranoa en 2005. Extrait choisi.
"Il y a un jour, tu verras, un jour où c'est le pied. Ce jour-là, tout se passe bien.Tu vois ceux que tu veux voir, tu manges ton plat préféré. Et tout ce qu'il t'arrive, c'est ce que tu veux qu'il t'arrive. Si tu allumes la radio, il y a ta chanson préférée. Et si tu vas à un jeu télévisé ce jour-là, tu remportes tout(...) Ecoute bien ce que je te dis: tout (...) Ce jour n'arrive qu'une fois, mais quand ? On doit être vigilante, il faudrait surtout pas le rater. C'est comme une déviation. Comme quand sur la route il y a une déviation. Mais tu es peut-être au téléphone, ou tu discutes ou tu as la tête ailleurs et tu t'en rends pas compte, et t'es baisée, parce que tu ne peux pas revenir en arrière. Ce jour là, c'est la même chose, une déviation. C'est très important, car tu peux décider du cours que les choses emprunteront ou pas: Le chemin nouveau ou pas."
Arc-en-ciel, la vie est belle !
France/Guyane - Dirty Paradise, pour introduire l'orpaillage
Dirty Paradise, de Daniel Schweizer, cinéaste genevois, est un documentaire de haute qualité cinématographique, parlant de l'orpaillage clandestin et ses conséquences sur la vie des amérindiens wayana dans le haut-Maroni. Ce film a été diffusé dans le cadre du festival du film et forum international sur les droits humains, et c'est avec un peu de plaisir mais aussi un peu de peine que je le découvrais en ce triste dimanche grisâtre de mars. Un peu de plaisir, car la qualité cinématographique de ce documentaire est indéniable. Des images splendides, des entretiens de qualité et un traitement du sujet plutôt complet. Et de la peine car la lutte contre ce fléau environnemental et sanitaire pourrait avoir des conséquences irréversibles pour les villages concernés, et pour l'environnement autrement préservé du territoire guyanais. Je suis revenu de Cayenne il y a maintenant quelques mois. Quelque soit l'endroit et le poste concerné, un contrat d'un an est court, très court, mais comme il me reste près de 40 ans à cotiser, des opportunités pour retravailler dans ce beau département habitées par de chouettes personnes, il y en aura probablement d'autres !
Allez, je retranscris avec une précision approximative les grandes lignes du débat qui a suivi ce film et qui s'est déroulé en présence du réalisateur, de Michel, un amérindien wayana venu à Genève pour témoigner avec quelques autres compères, et de deux ou trois autres professionnels ayant consacré leur vie professionnelle au travail avec les petites communautés minoritaires au sein de nombreux pays en Europe, en Amérique du Sud ou ailleurs. Ce débat, d'environ 45 minutes, m'a semblé assez juste tant par les avis de Michel sur la situation des siens que par les réflexions sur les problèmes dans la vie de tous les jours des amérindiens du Haut-Maroni. J'en profite pour glisser quelques photos de cette région de Guyane, prises par mes collègues de l'époque.
Lutter contre l'orpaillage: quelles solutions ? C'est la première question sur laquelle le débat a porté. Pour Michel, la lutte est quasiment impossible compte-tenu du statut international des eaux du Maroni, de la passoire totale que constituent les frontières de la Guyane, du nombre important de chercheurs d'or (peut-être 10 000 garimperos), de la sporadicité des opérations de l'armée (Anaconda, Harpie etc).
Vue de Maripasoula (photo prise par mes anciens collègues)
Face à ces difficultés géographiques, tout le monde s'accorde à dire que la France ne pourra probablement pas s'en sortir seule pour supprimer ce fléau irréversible. Alors, quelles solutions ? la coopération, et pas qu'un peu. Cet argument, je l'avais déjà entendu régulièrement lors de ma présence en terre guyanaise. Une coopération renforcée entre les autorités françaises, brésiliennes et surinamaises. Il semblerait que ces opérations portent quelque peu leur fruit, et le président de la République Nicolas Sarkozy a dans ce sens confirmé que l'opération Harpie deviendrait permanente sur le territoire de la Guyane, alors que les négociations avec le Brésil pour une meilleure coopération sont en cours. Le débat souligne également l'opacité du circuit de l'or en Suisse, l'existence évidente de financeurs, réels mafieux tirant leur épingle du lot en exploitant la majorité de ces garimperos ouvriers à la simple recherche d'un avenir plus doré. Un milieu assez pourri, comme le synthétise cette dernière réalité: la Guyane exporte plus d'or qu'elle n'en produit !
France/Guyane - Les îles du Salut: enfer, Club Med et paradis tropical
Le courant des Guyanes transporte jusqu'à 20% de la charge sédimentaire de l'Amazone et entraîne la formation des bancs de vase qui donnent naissance à la couleur chocolat des eaux du littoral guyanais. Mais à quelques kilomètres de ces littoraux marrons surgissent trois petites îles déchargées de sédiments mais chargées d'histoire. Aujourd'hui sources de sorties dominicales, les îles du Salut furent aussi un lieu de rétention, de souffrance et de mort durant plusieurs décennies, en accueillant une partie des bagnards envoyées en Guyane. D'où la qualification d'Albert Londres à propos de ces îles: l'enfer dans le paradis. Toutefois, en 2009, les îles du Salut offre à l'habitant de Guyane une solution intéressante de dépaysement et de détente, tout en alliant promenade culturelle (visite guidée du bagne) et naturelle (balade possible sur deux îles sur trois). Après un transfert d'environ 1 heure par catamaran, durant lequel il est parfois possible d'observer dauphins et tortues, l'arrivée sur l'île royale se fait en douceur et laisse présager du dépaysement que peut procurer la plus grande des trois îles.
Les îles sont propriétés et donc entretenues par le CNES, le Centre National d'Etudes Spatiales, depuis 1971. Les bâtiments du bagne de l'île royale ont été réhabilités en partie et permettent aux pensionnaires quotidiens de visiter ces lieux à l'histoire terrible. Guidés par un historien amateur passionné, c'est ainsi que nous débutons cette journée du 2 août 2009, après une première série de photos animalières et paysagères. Les deux splendides aras sont apprivoisés, tout comme l'était ce beau toucan échappé d'une cage et qui ne peut voler jusqu'au continent. Un réel plaisir que de le voir boire en compagnie d'iguanes, dans une marre à caïmans.
La visite du bagne de Guyane offre une opportunité passionnante de mieux comprendre cette terrible sentence. En plus du guide passionné, c'est surtout la revue Géo n°93 de novembre 1986 qui explique bien cette période terrible, à travers l'histoire de l'un des bagnards, nommé Dubuz, relaté par un journaliste de l'époque. "En fait, l'histoire de Dubuz était banale. Fin de la première guerre mondiale. Un jeune libéré rentre dans son petit village de Normandie. Bientôt, il s'imagine dans les bras de sa femme, la couvrant de baisers. Mais un autre est là. A ce moment du récit, le vieil homme avait plié les doigts en forme de revolver: "j'ai tiré! L'homme est tombé tout de suite, mort, complètement mort." Vrai crime passionnel, ou, comme souvent chez les anciens bagnards, biographie inventée de toute pièce pour donner une cause plus noble à sa condamnation. Peu importe. Dubuz s'est retrouvé en Guyane, dans l'enfer du bagne, un cliché littéraire auquel je ne peux échapper qu'en ayant recours à l'argot coloré des forçats: Dubuz s'est vu condamné à la guillotine sèche, numéro parmi les numéros. Dubuz et son tricycle demeurent une photographie à jamais gravée dans mon cerveau. Lui et la poignée de "vieux blancs" qui s'éteignent l'un après l'autre dans les hôpitaux de Cayenne, aujourd'hui préfecture de la Guyane française, ou de Saint-Laurent-du-Maroni, sont les éclopées en loque d'une armées vaincue. Le savent-ils eux mêmes ? En venant en Guyane, ils arrivaient pour purger leur peine, se mettre en règle avec la société et, si possible, avec leur conscience. Mais ils étaient aussi les soldats d'une troupe qui avait reçu mission de transformer la Guyane en eldorado."..."Au total, entre 1852 et 1938, soixante-dix mille hommes furent convoyés en Guyane. Comme toutes les troupes en campagne, cette armée eut ses morts. Une véritable hécatombe: plus de la moitié des effectifs !" Ma tête et internet complètent cette brève synthèse: Alfred Dreyfus (1894), Guillaume Seznec (1923) furent les prisonniers les plus célèbres du bagne. Francis Lagrange, bagnard artiste, peint une série de toiles sur ce terrible monde. L'abolition du bagne de Guyane fut proclamée en 1938 mais réellement mise en oeuvre en 1947. 1947 ? Dans le contexte de la découverte de camps de concentration nazis, il devint délicat de tolérer l'existence de ce camp équatorial dont le taux de mortalité était du même ordre de grandeur.
Hôpital du bagne des îles du Salut
Un changement n'arrivant jamais seul, la fin du bagne en 1938 correspondît à la création des congés payés en France, et par effet domino, le développement du tourisme de masse. Après le départ des gardiens du bagne et de tout ce qu'il générait, violence, maladies et mort, le tourisme s'est petit à petit développé sur les îles du Salut ! Et d'autres gardiens ont été embauchés, pour s'occuper de ces venues dominicales ! D'où ce doux surnom donné aux postes de gendarmerie des îles du Salut, comparé à la réalité de la Guyane continentale et à celle du bagne: le club-med de la gendarmerie en Guyane !
C'est bel et bien dans un endroit paradisiaque que les hommes débarquent en 2009. Laissons le passé au passé, et promenons-nous un peu sur l'île royale, la plus grande et la plus fréquentée des trois îles. Une balade aux alentours de l'auberge débute par l'observation des agoutis, ces rongeurs comestibles, du toucan ainsi que de l'île du diable, sur laquelle à séjourné Dreyfus.
Vue de l'île du Diable depuis l'île royale
Puis, après ce petit tour autour de l'auberge, c'est le tour de l'île que nous faisons maintenant. un tour par des petits chemins de terre bordés de cocotiers, à côté d'une eau bleu-verte à 29°C. Des sentiers très photogéniques, une petite baignade agréable, et un bel après-midi au fil de l'eau.
Cette promenade est très sympa. Le microclimat, légèrement plus sec, devient plus agréable que sur le continent, pourtant à quelques kilomètres. La possibilité de plonger dans cette eau chaude est verte offre est aussi un petit plaisir. Mais voilà, pour avoir pris un aller-retour sur une journée, il nous est impossible de rester plus longtemps, et notamment de visiter l'île Saint-Joseph, sur laquelle les vestiges du bagne n'ont pas été réhabilités. Aussi, c'est en redescendant tranquillement vers le port que je tombe nez-à-nez avec une bande de sapajous. Habitués à l'homme, ils sont preneurs de toute friandise que le promeneur peut laisser. Ces îles sont une étape incontournable de la Guyane touristique. Plus accessibles sur le plan financier que d'autres sites naturels du département, elles assurent un dépaysement garanti à toute personne, de Guyane ou d'ailleurs. A visiter, sans oublier le hamac, bien sur !
Sapajous, une des espèces de singe présente sur l'île