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Une Souris et des Hommes

31 décembre 2014

France/Rhône-Alpes/Ain - Une journée à Ambérieu-en-Bugey

Il est pafois sympathique de réfléchir aux stéréotypes qu'on peut avoir sur un territoire, à toute échelle : de la ville au pays, en passant par la région ; des espaces ruraux au centre-ville des métropoles, en passant par les banlieues ; Dépasser ces représentations est souvent possible lorsqu'on a l'occasion d'aller vivre dans ces lieux. C'est depuis longtemps que je me posais la question de mes capacités de socialisation et d'intégration en milieu rural; Ayant eu la possibilité de m'installer à Ambérieu-en-Bugey dans le cadre d'un emploi, ce questionnement allait pouvoir être mûri ! En effet, Ambérieu est une petite ville d'environ 18 000 habitants située au sein d'un territoire rural : comment s'y adapter ? Revenons à nos outils utilisés à Dublin et Cayenne : école de langues, couchsurfing, colocations. A Ambérieu : niet ! Plusieurs raisons : une dynamique couchsurfing vierge, idem pour l'offre de colocation, ou presque. L'âge joue aussi un rôle : la trentaine entamée, pas forcément les mêmes envies qu'à 20 ans, âge de la majorité des personnes rencontrées dans les quelques pubs où se retrouvent les jeunes ambarrois n'étant pas partis dans les villes universitaires. Bref, rien d'extraordinaire, finalement. Mais cette simple constatation oblige à d'autres approches pour tenter de se créer une vie sociale en dehors des rencontres faîtes via le travail.

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Un lieu stratégique du socializing ambarrois : le jacuzzi de l'espace Laure Manaudou ! Oui, à défaut de se faire des potes à l'aide des moyens traditionnels, essayons le sport. La piscine en tant que telle, cela ne marche pas. Mais l'espace Manaudou offre aussi un espace détente, composé notamment d'un jacuzzi : que de rencontres dans ses bulles ; des gitans dans un jacuzzi : "pourquoi roulez-vous avec de vieilles mercedes"? Pas de réponse, tanpis ; des rugbymen dans un jacuzzi : "non, non, je ne suis pas l'un des vôtres". De nombreuses autres rencontres, mais pas vraiment de lien crée finalement. Force est de constater que l'intégration dans une petite ville rurale de France métropolitaine, quand on est seul, en début de trentaine, est bien plus difficile qu'à Dublin ou Cayenne. Et encore, j'avais la voiture...de quoi découvrir les petits chemins perdus et prendre quelques photos des beaux couchers de soleils locaux.

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Ah, la voiture ! En milieu rural et périurbain, la dispersion de l'habitat, la concentration des services dans les bourgs-centre et par conséquent l'allongement des distances parcourues tendent à créer une forte dépendance à l'égard du véhicule personnel. Les ménages ne disposant pas de moyens de locomotions propres, par choix ou par nécéssité (absence de permis de conduire, incapacité à conduire, contrainte financière etc) sont dépendants des transports publics ou des systèmes de solidarité. Or, dans les zones peu denses, les transports publics réguliers ne proposent pas toujours un maillage assez fin ou une fréquence suffisante pour permettre à l'ensemble de la population demandeuse d''accéder aux services selon les modalités que l'on peut trouver en milieu urbain (arrêt de bus trop éloigné, horaire inadapté à certaines démarches). L'absence de véhicule personnel, qui touche principalement les jeunes, les personnes âgées en perte d'autonomie et certaines personnes en parcours d'insertion professionnelle, contribue à créér localement des situations d'isolement, voire d'exclusion. Concernant les jeunes habitants des milieux ruraux, si le transport scolaire est bien pris en compte, les besoins de déplacements pour accéder aux loisirs sont réels. L'accès aux activités extrascolaires relève du transport privé. Le transport est principalement assuré par les parents. En cas d'impossibilité ou d'absence de système de solidarité, la pratique de telles activités peut être exclue. C'est pourquoi la liaison vers les pôles de loisirs et d'activités culturelles et vers les équipements sportifs est fortement demandée de la part des jeunes. C'est pour pallier à ces difficultés de transport que la commune de Grenay, dans le Nord-Isère, avait travaillé avec l'association dans laquelle je baigne sur mon temps libre, Concordia, en 2011, pour réaliser un chantier international atypique: l'aménagement intérieur et extérieur d'un bus, en partenariat avec le Point Enfance Jeunesse de la communauté de communes, pour aller à la rencontre des jeunes sur leur territoire et leur proposer activités et autres projets. Au programme : atelier graf, pose du parquet, création de mobilier.

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Chantier international "Point Jeunesse mobile", Grenay 2011

Mais revenons à nos réfléxions ambarroises...deux ans en Bugey...et pas un seul ami. Voilà une réalité de l'intégration dans une petite ville de province: trop peu de personnes en recherche de nouvelles amitiés, et une quasi-impossibilité de rentrer en contact avec elles; pas assez d'outils permettant de créer le lien social avec des personnes en besoin. Beaucoup de trentenaires, certes, mais avec une vie de famille construite et n'étant pas dans un besoin de sociabilisation. C'est un fait, le Bugey, que j'évoque ponctuellement dans ce blog, est une belle région...une région assez authentique, car préservée du tourisme de masse, à la différence du Beaujolais par exemple. Mais c'est un autre fait, venir s'installer dans un territoire à dominante rurale nécessite de réfléchir à ses attentes. Pour faire le lien avec les autres espaces géographiques que j'évoque dans ce blog, est-il rééllement pertinent de partir vivre et travailler dans les villages intérieurs de Guyane, tels que Grand-Santi sur le Maroni, ou Camopi sur l'Oyapock, quand on vient de France métropolitaine et qu'on baigne dans une culture plutôt urbaine ? Bien sûr, loin de moi toute généralisation, mais de ma petite expérience de l'époque, enrichie d' échanges avec de nouveaux habitants et professionnels des fleuves, il me semble que la question doit être mûrement réfléchie par les recruteurs et recrutés; "On n'envoie pas n'importe-qui à Trois-Sauts", commune amérindienne la plus reculée de Guyane, ai-je entendu lors d'une réunion. La Guyane est traditionnellement une terre d'accueil, et les gens y sont majoritairement accueillants; mais si je devais extrapoler mon expérience ambaroise à mes expériences irlandaise et guyanaise, j'en conclurais : "wow, qu'est-ce-qu'on est bien dans une bonne ville !"

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Le Bugey, c'est bien, Lyon, c'est mieux !

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18 décembre 2014

France/Rhône-Alpes/Ain - Une journée à Cerdon

Dispositif de mobilité internationale. Voilà un terme qui m'était inconnu lors de mon départ en Irlande, en 2007, relaté dans les pages historiques de ce blog. Il faut dire qu'en 7 ans, il s'en passe des choses. Alors que l'Irlande fonctionnait dans une économie en plein emploi, la crise financière est passée par là, et le pays est revenu à une croissance dans "la normale". Et puis quand on sort tout juste des études, il n'est pas forcément évident de connaître les dispositifs qui existent à côté du célèbre Erasmus...enfin, partir dans un pays anglosaxon pour affiner sa connaissance de la langue de Shakespeare et s'ouvrir à une nouvelle culture passe par un emploi, qui même s'il n'est pas toujours très utile à moyen terme, permet au moins de pratiquer un peu le pays et ses gens. Mais voilà. Comment partir en Lituanie, pendant quelques mois, sans avoir à apprendre cette langue à priori peu utile en dehors du pays !? L'Union Européenne offre cette possibilité via un dispositif, le Service Volontaire Européen. Et c'est via ce dispositif qu'Evgeniya, Bielorusse originaire de Pinsk et vivant à Minsk, se retrouve pour 6 mois à Lyon. Pourquoi faire un SVE ? Une question, plusieurs réponses : "j'ai décidé d'utiliser ce dispositif de mobilité internationale car je ressentais le besoin de partir du Belarus, et en quelque sorte de davantage me trouver" Et c'est donc pour 6 mois qu'Evgeniya rejoint Concordia Rhône-Alpes pour apporter une pierre à la vie de la structure, en compagnie de Giselle, d'Italie. Quelques mois après son arrivée, elle confie avoir affiner les objectifs de son expérience expatriée en France : apprendre sur le montage de projets Erasmus+; apprendre sur la culture française, et la vie de tous les jours. Et pour apprendre sur la vie des habitants d'un territoire au jour le jour, un des outils les plus puissants n'est-il pas l'échange avec eux ? Dans un centre-ville mondialisé comme celui de Lyon, ou dans un village reculé de ce que le géographe Christophe Guilluy appelle la France périphérique, ou du moins d'une France plus rurale et moins mondiale ? Oui, mais pour pouvoir échanger, il faut aller les voir. Et pour pouvoir aller les voir, il faut une voiture ! Et pour avoir une voiture, on fait quoi ? On demande à la pop loc ! Ben oui, bien sûr ! C'est donc en cette belle journée du 8 novembre 2014 qu'Evgeniya et Giselle profitent de leur première expérience d'expatriée en France pour s'en aller visiter quelques jolies places du Bugey : Pérouges pour commencer.

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Giselle, elle, a 19 ans. Son désir : exploiter ce dispositif de mobilité pour partir dans un pays de langue inconnue. Pas en France, dont la langue lui est connue, mais plutôt un pays du Nord : Danemark, Norvège, Suède. Malheureusement, les différentes organisations d'accueil dans ces pays ne fournissent aucune réponse positive, et c'est à Lyon qu'elle se retrouve. Et finalement, elle en est très heureuse ! Même si son français est déjà excellent, elle utilise cette possibilité de mobilité pour se déplacer en divers points du pays, affiner sa conscience de la diversité géographique et humaine de la France métropolitaine. Par exemple, en allant visiter le joli village de Cerdon.

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Puis vient la fin de journée...qui nous laisse le temps d'aller observer le coucher de soleil depuis le mont Balvay, sur la commune de Leyssard. Une belle journée, qui est rendu possible grâce à l'existence de ces programmes de volontariat européen...et des systèmes de "solidarité" locale, via le véhicule individuel notamment. De quoi continuer à intégrer le concept de la vertu de la mobilité entre quartiers, entre régions, ou entre milieux urbains et ruraux...permettant l'échange interculturel, le choc culturel, tant pour les citoyens étrangers que français.

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6 décembre 2014

Grèce/Macédoine centrale - Une journée à Thessalonique

En ce beau mois de septembre 2014, je me retrouve pour un week-end de travail à Théssalonique, Grèce, dans le cadre d'un engagement bénévole que j'ai pris au sein du groupe de travail "environnement" de l'Alliance des organisations européennes du service volontaire, réseau permettant d'organiser les échanges internationaux comme celui de Laurenan.

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En effet, chaque année est financé un week-end permettant aux différents membres des groupes de travail de se retrouver et travailler physiquement ensemble, alors que le reste de l'année les échanges se font seulement par conférence skype et mails. Cette année, c'est l'association Citizens In Action, qui propose à ses adhérents les dispositifs types du programme européen Erasmus+ (Service Volontaire Européen, échanges de jeunes, formations) et l'accès aux chantiers internationaux en Grèce ou à l'étranger, qui organise le week-end de travail. Théssalonique (520 km au Nord d'Athènes) est la deuxième plus grande ville de Grèce, construite le long du front de mer. La ville est composée de personnes de cultures variées, mais malgré son histoire multiculturelle, les dernières décénnies sont caractérisées par son profil xénophobe et conservateur. Toutefois, ce profil s'adoucirait depuis 5 ans. Depuis le début de la crise économique en 2008, la ville a montré une grande augmentation d'initiatives citoyennes, dont certaines nous sont présentées dans le cadre de visites de terrain organisées en matinées. C'est ainsi qu'une matinée est consacrée à la visite du premier jardin communal auto-géré de Macédoine centrale. Ce jardin a été créé par le groupe PERKA. Celui-ci a été formé au début de l'année 2011 par des habitants de Théssalonique dont le but était la culture communale, saisonnière, des légumes, fruits, fleurs et herbes, dans les champs dans ou à proximité de Théssalonique. Avec le soutien du Club Cultural local, le groupe a commencé à cultiver une petite partie de l'étendue des 68.9 hectares de l'ancien camp militaire Karatasou. La culture n'est pas destiné au profit, mais couvre une partie des besoins des membres de PERKA et est basée sur les principes de l'agriculture biologique ou biodynamique.

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 Plantations dans le 1er jardin communal auto-géré de Macédoine centrale

Bien sûr, chacun d'entre nous a une sensibilité plus ou moins forte à ce genre d'actions citoyennes, et plus généralement aux démarches d'actions sociales au sein d'un territoire ou d'un pays, fonction de son background socio-culturel et de ses valeurs. Mais la réappropriation d'un espace public en voie d'abandon par des groupes d'habitants est un acte particulièrement intéressant à souligner. La deuxième matinée, nous visitons notamment une société de design graphique, qui est construite selon le modèle économique de la société coopérative, un des quatre modèles de ce qu'on appelle en France l'économie sociale et solidaire (avec les associations, mutuelles et fondations), secteur économique important et bien plus vaste que celui de l'action sociale au sens strict du terme.

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 Société de design graphique organisée selon le modèle de coopérative

Et puis après les après-midi de travail, il est alors possible de découvrir la magnifique vieille ville de Théssalonique. De quoi s'imprégner un peu de cette atmosphère méditérannéenne agréable et qui donne envie d'en savoir plus sur cette ville et ses habitants.

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20 novembre 2014

France/Bretagne/Côtes d'Armor - Une journée à Laurenan

Un samedi matin à Laurenan, Eva, Vénitienne de 18 ans, prend Monica, Barcelonaise de 20 ans, dans ses bras, pour un au-revoir chaleureux. Deux semaines plus tôt. En ce vendredi 15 août 2014, la petite commune de Merdrignac est d'un calme étonnant. Dans un des rares bus circulant en ce jour ferié, 9 Terriens. Le bus stoppe, ils descendent et retrouvent 2 compères, formant ainsi un groupe aussi puissant que temporaire : un groupe de volontaires participant à un chantier international. Pour les accueillir, les 2 animateurs du groupe, Madame le Maire de Laurenan, Valérie, et Bernard, 1er adjoint : "Good evening everybody. Here we are, here you are" ! la phrase est lancée...le chantier suit.

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"Terriens 2014" découvrant le résultat du travail volontaire du groupe de 2013

Premier repas très calme. un bon café, quelques échanges et la nuit s'installe doucement...il fait froid, le ciel est étoilé et les pieds...gelés. Samedi, jeux de présentation, échanges, rires...la dynamique du groupe est lancée. L'après-midi, balade dans le village et découverte des résultats des précédents chantiers réalisés par d'autres volontaires, d'ici où là : le mur de l'école ; le lavoir ; le four à pain. Le dimanche, rallye-patate au sein du village, pour permettre les premiers échanges entre habitants et volontaires. Ici est le premier objectif de ce chantier: faire découvrir le travail volontaire aux habitants, leur permettre d'échanger avec des personnes de différents pays. D'une patate, échange après échange, se forge la suite: rencontres, implication des habitants, venue à la porte ouverte du lundi soir. Une porte ouverte où chaque volontaire se présente, dans sa langue d'origine, en anglais, avec traduction en français. S'ensuit une première semaine de travaux pour valoriser le chemin de l'Etrat, une ancienne voie romaine, sur une distance de 300 mètres au sein de la forêt. Davantage d'informations sur le site web du chantier, ici. Première semaine ponctuée par des animations, la découverte de danses bretonnes, la participation aux jeux inter-villages etc.

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 La deuxième semaine, l'aventure continue : dimanche à la plage d'Erquy ; visite d'une ferme laitière ; atelier de fabrication d'un pain biologique ; découverte du centre-ville de Rennes.

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Pour les animateurs, ça fait du bien, un chantier qui roule comme ça. Où tout le monde est globalement content. Faut dire, quand on baigne, sur son temps libre, dans le monde de l'éducation populaire et des mouvements de jeunesse, on se rend compte qu'on peut en proposer, des choses, lorsqu'on anime un chantier de bénévoles internationaux. Pour discuter, par exemple. Un outil, le débat mouvant. L'idée : trouver une affirmation clivante, une phrase simple résumant une position sur un sujet dont on suppose qu'elle divisera le groupe en "pour" et "contre". Puis proposer l'affirmation et enjoindre les participants à choisir leur camp par rapport à une ligne au sol laissant l'espace en 2 parties. Chaque camp a alors alternativement la parole pour exposer un argument ; les personnes convaincues peuvent alors changer de camp, d'où le nom de cet outil d'animation. L'affirmation débattue à Laurenan : "il est plus important de s'investir sur des activités/projets d'où l'on est, plutôt qu'à une autre échelle, typiquement internationale". De quoi débattre, dans cette logique qu'est celle du travail volontaire, avec Ayumi par exemple, 19 ans, qui sortait du Japon pour la première fois pour aller donner un coup de main à cette communauté bretonne.

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Et voilà le départ. Deux semaines, c'est rapide. Mais intense. Et forcément, on est un peu triste de se séparer. Même si on le sait, il sera possible de se recroiser. Un jour. Peut-être. C'est entre nos mains. Espérons-le, du moins. Finalement, mûrissant ma connaissance sur le thème de l'animation, je concluerai ce petit article par une citation issu de l'ouvrage "Equiper et animer la vie sociale" de 1966 : "Animer, c'est susciter ou activer un dynamisme qui est à la fois biologique et spirituel, individuel et social : c'est engendrer un mouvement qui passe par l'interieur des êtres, et donc par l'intérieur de leur liberté. De l'extérieur, on peut contraindre et diriger, mais sans communication par le dedans, on ne peut animer. C'est dire du même coup que l'animateur n'est jamais neutre, car le dedans des hommes n'est jamais atteint lorsqu'on ne veut pas sa préoccuper des valeurs auxquelles ils tiennent profondément."

15 novembre 2014

France/Guyane - l'Oyapock : le pont, extraits choisis

Oiapoque est la ville brésilienne frontalière de la Guyane française et de la commune de Saint-Georges de l'Oyapock. Entre les deux communes s'est vu construire un pont, source de discorde. Ce petit article sans prétention synthétise quelques témoignages de personnes qui sont concernés d'une manière ou d'une autre par ce pont. Par exemple, Mael Cabaret, réalisateur breton dont vous trouverez le portrait en cliquant sur le lien précédent, a réalisé un beau reportage d'environ 1 heure, Oyapock, sur cette frontière fluviale davantage médiatisée depuis quelques années. De ma découverte des lieux, soit dans le cadre professionnel (Saint-Georges), soit dans le cadre personnel (Oiapoque), il n'est qu'une envie qui me dessine : continuer à apprendre sur ce territoire interragissant au jour le jour que compose les deux communes. Apprendre par la lecture, ou par l'écoute, et bien sûr,  dans l'idéal, par l'échange avec les habitants.

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 Pont sur l'Oyapock (photo du web)

Avant d'inaugurer le pont, les autorités veulent d'abord trouver un nouvel accord transfrontalier pour les habitants de la vallée. Car pour beaucoup comme pour Rona, guide touristique, la notion de frontières, sur le fleuve Oyapock, c'est tout neuf. "On avait pas besoin de ce pont. On dit ici qu'ils sont en train de construire un nouveau mur de Berlin". Retour à Saint-Georges de l'Oyapock. De ce côté-ci, on commence aussi à être agacé par ce pont. Comme cet habitant, qui indique qu'il ne peut plus faire de parties ou jeux avec ses amis d'Oiapoque. Lors de l'annonce du projet, ni la population, ni les élus locaux n'ont été consultés. Chacun s'apprête à vivre avec un pont majestueux, mais jamais désiré...toutefois, Fabienne Mathurin, ex-maire de Saint-Georges, propose que s'il y a bien un ouvrage qui symbolise l'intégration de la Guyane en Amérique du Sud, c'est bien ce pont sur l'Oyapock. Pour Gérard Police, docteur en civilisation brésilienne interrogé dans ce reportage vidéo, les 50 millions d'euros dépensés pour la construction de ce pont ne représentent en réalité que très peu d'argent, par rapport aux enjeux économiques, financiers et militaires entre la France et le Brésil. Il y avait besoin d'un symbole de ces partenariats : ce pont.

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Comme on peut le lire dans cet article d'Hervé Théry,  pourquoi un pont aussi grandiose alors que l'on attend un trafic très limité, qui aurait très probablement pu être absorbé sans difficulté, à un coût moindre, en renforçant le service des bacs qui assuraient déjà la traversée. Cela ne s'explique que dans une perspective géopolitique régionale de liaison entre le Brésil et ses voisins du Nord. Ces voisins se sont longtemps méfiés de son expansionnisme, notamment la France qui s'est abstenue de construire la liaison routière de 80 km entre Régina et Saint-Georges. Ce n'est que plusieurs années après le retour de la démocratie au Brésil, après la période de la dictature militaire (1964-1985), que les travaux ont été entrepris en achevés en 2003. Avec leur conclusion, l'axe RN1/RN2 assure désormais la liaison de 450 km entre Saint-George et Saint-Laurent-du-Maroni à la frontière du Suriname. Avec la construction du pont, la route côtière constitue donc désormais un maillon d'une panaméricaine atlantique. Il faut toutefois noter que le Brésil n'avait pas attendu de se doter d'une autre sortie vers les Caraïbes, via l'ouverture de la route Manaus-Caracas...

Ainsi va le Monde, la vie qui avance dans ces deux communes d'Amazonie...alors que plusieurs années après sa construction, de l'eau en a coulée...sous ce fichu pont !

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5 novembre 2014

Une souris et...Lery Laura, mi-muse, mi-poète

Lery Laura est une amie. Une "amie du Monde", comme il est facile d'en avoir de nos jours. Je la contacte en été 2013 après être quelque peu tombé par hasard sur son profil linkedin: "Lery Laura es periodista, egresada de la Escuela de Comunicación Social de la Universidad Catolica Santo Domingo. Sus intereses están vinculados a la investigación periodistica, el arte, la comunicación social y las ciencias sociales en general. Trouvant que discuter avec elle pourrait être chouette, nos premiers échanges sont dans un spanglish moderne : "Hi I am seeing you are periodista (in linkedin) and I would really be pleased of speaking with you about life, work, etc...would you be interested ? Kind regards, Emmanuel from France." C'est alors qu'elle me répond : "Hola, sí, soy periodista. Trabajo en una revista dominicana, escribo artículos de economía y sociedad. Mi trayectoria no ha sido extenso, pero algo tengo para compartir. Empiezo contándote que me cuesta mucho escribir en inglés, pero you can translate this with google. Gracias por interesarte."

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Lery Laura, par Manu

Depuis ce jour, nous échangeons régulièrement sur la vie, le travail, la République Dominicaine, La France, les Alpes, les grenouilles, les fleurs...et quelle chance, Lery Laura et moi avons quelques centres d'intérêt en commun : la nature, la photo, l' écriture par exemple. Il est peu habituel d'entendre parler de cette île des Caraïbes dans les médias français, en dehors du tourisme. Alors pourquoi ne pas dépasser un peu les clichés et affiner sa connaissance du pays via cet échange interculturel ?

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Plage de Cabrera, République Dominicaine...et si on dépassait les clichés ?

Mais après cette brève introduction, je dois vous dire quelque chose...Lery Laura est aussi un peu poète. Mais ne le dites pas, hein, c'est un secret ! Et dans nos échanges, elle m'envoie notamment un de ses poèmes, XXX. Extrait choisi :

"...Y hablo de tristeza

No por estar triste - Lo juro.

sino porque es una palabra bellisima :

Tristeza, 

la tristeza,

Tristeza.

Es un cristal creciendo

en estos ojos cerrados

y temerosos de las sombras

y otros ojos que son apenas posibles."

Mais comme le dit José Marmol, poète dominicain né en 1960, au jour d'aujourd'hui, on ne vit pas de la poésie en République Dominicaine. Alors Lery Laura, pour palier à cet idéal, écrit sur la société dominicaine, dans le cadre de son travail...travail qui ponctuellement peut l'emmêner dans l'autre partie de l'île Hispaniola, en Haïti, comme à ce moment là.

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 Excursion professionnelle de Lery Laura en Haïti

Ces échanges interculturels entre une Dominicaine lambda et un Français lambda sont particulièrement variés, et permettent à chacun d'affiner un peu sa conscience internationale. Récemment, une des rares actualités de l'île commentée dans les médias français a été lié à la décision du gouvernement dominicain de dénationaliser une partie de sa population d'origine haïtienne. Historiquement, les relations entre les deux Etats de l'île sont tumultueuses, au niveau des politiques d'Etats en tout cas. En est-il de même au niveau de la population...Humm peut être, mais dans une moindre mesure sans doute. En tout cas, on pouvait lire quelques articles il y a un an dans les médias français. "En 1937, le dictateur dominicain Rafael Trujillo ordonna le massacre de plus de 15 000 migrants haïtiens noirs pour « blanchir la race ». L'année suivante, pour se faire pardonner par la communauté internationale, le tyran sanguinaire ouvrit les portes de son pays aux juifs allemands, blancs, persécutés par Hitler. Soixante-quinze ans plus tard, la décision du plus haut tribunal dominicain de retirer la nationalité dominicaine aux descendants d'Haïtiens provoque à nouveau la préoccupation de la communauté internationale et l'indignation des défenseurs des droits humains. Fin septembre, le Tribunal constitutionnel a jugé, de manière rétroactive, que les descendants des migrants « en transit », nés depuis 1929, ne pouvaient prétendre à la nationalité dominicaine." Concrètement, cette décision retire la nationalité dominicaine pour plus de 250 000 hommes et femmes d'origine étrangère [haïtienne]. Du discours de Grenoble...en République Dominicaine. Lery Laura, mon amie, m'a évoqué cette situation il y a un an. Bien sûr, elle n'est pas spécialiste de cela, mais en tant que citoyenne dominicaine, elle peut se sentir directement concernée par cette décision. Et on peut voir cette photo sur sa page facebook.

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Et puis parfois nous parlons aussi voyages. Lery Laura est notamment allé au Guatemala, et a passé plusieurs jours dans un village indigène du pays. Nous avons échangés sur ce thème, et elle m'a envoyé quelques textes décrivant cette expérience. Extraits choisis : "27 de noviembre de 2009. Estoy en un pueblo indígena y para mí todavía resulta muy impresionante el encuentro con esta cultura. Es gente muy silenciosa y tranquila. Los hombres y las mujeres mayores siempre caminan como quien va meditando. Desde niñaslas mujeres usan el huipil, un corte muy colorido que debe decir mucho sobre sus creencias pero que yo no entiendo muy bien todavía. La mayoría lleva muy largo el pelo, aunque en algunas jóvenes se puede notar una tendencia a abandonar esta costumbre. Las más viejas sí lucen con orgullo el pelo canoso que cae sobre sus espaldas. Se ven hermosas y no sé por qué encuentro que hay tanto sosiego en las arrugas formadas sobre sus rostros. Yo pocas veces miro la vejez como algo natural, como algo justo o con lo que yo estaría conforme, pero aquí con frecuencia le encuentro algo de encanto. Supongo que es igual de triste aquí que allá, y que mi encantamiento se debe a que de todos modos estoy más distante de este pueblo y todavía soy incapaz de verlos como algo más que un patrimonio cultural. No sé si digo lo que quiero decir. Me refiero a que sé la miseria que hay detrás de los rostros arrugados que se suben a la guagua en que voy del trabajo a mi casa, allá en Santo Domingo, o al menos eso creo. Conozco a mi gente y sus penas, pero de aquí casi no conozco nada. Sé que esta gente padece de muchas cosas, pero no soy capaz de ver esos dolores en sus rostros, como hago cuando veo a un dominicano. En fin…Ya dije que son gente muy reservada, pero un saludo no falta nunca cuando una se cruza con ellos por la calle o algún camino. Se limitan a decir buenos días o buenas tardes, pero lo dicen con una voz muy alegre, sobre todo las mujeres y niñas."

Enfin, nos discussions ne sont pas non plus trop politiques, et il est parfois tout aussi sympathique de comparer les formes et couleurs naturelles !

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Dans un jardin de Saint Domingue...(photos de Lery Laura)

23 octobre 2014

Suriname - Paramaribo, mobilités multiculturelles

Paramaribo. Une ville particulièrement méconnue en France métropolitaine, mais dont l'atmosphère m'aura quelque peu interpellée lors des trois petites journées passées en son centre en 2009. Il faut dire que le Suriname n'est pas une destination très touristique. Mais continuant à lire sur cette belle région du Monde qu'est le plateau des Guyanes, je dois dire que capitaliser sur cette micro-expérience touristique de mai 2009 est un petit bonheur que la toile permet d'alimenter. Par exemple par la lecture du site d'information anglophone sur le Suriname, Devsur : our story, by us. Et puis en plus des médias traditionnels, sites d'information ou livres, se cachent des publications et études plus techniques mais pas moins inintéressantes. Notamment, un article consacré à la ville, rédigé par H.J.L.M (Hebe) Verrest, une géographe néerlandaise spécialiste des villes de la région carribéenne. Mixant quelques éléments de son travail à des articles lus ici ou là, cet article présente quelques traits de cette ville atypique d'Amérique du Sud.

La capitale surinamaise, principal pôle économique, social, politique et administratif du pays, ressemble, malgré sa position en Amérique du Sud, davantage à une ville carribéenne qu'une ville sud-américaine. Le Suriname est localisé sur la côte nord du continent sud-américain, et la grande majorité de ses habitants (environ 500 000) sont localisés sur les côtes. De 1667 à 1975 le Suriname était une colonie hollandaise. Durant le 20ième siècle, la production de bauxite remplaça rapidement l'agriculture comme principale ressource économique. Le Suriname intensifia son autonomie à partir de 1954 et devient indépendant en 1975. La croissance et composition de Paramaribo reflète son histoire turbulente. Des habitants d'origine ethnique, sociales, géographiques et éducatives variées peuplent la capitale surinamaise. L'arrivée de groupe variés a ainsi changé la structure ethnique de la population de la capitale. Alors que les personnes créoles formaient 80% de la population surinamaise, cette proportion n'a cessé de diminuée jusqu'au recensement de 2004, comme le met en évidence la figure ci-dessous. Ce métissage croissant des habitants surinamais est un processus en cours, changeant régulièrement le profil de la ville.

Population Suriname

Xie Da, lui, est d'origine chinoise. Son histoire est raconté dans l'avant-dernier numéro d' Une saison en Guyane. "En 2002, à 32 ans, Xie Da a quitté son foyer dans la province chinoise du Fujian pour rejoindre le Suriname. Un ami lui avait parlé de bonnes affaires à saisir dans ce pays néerlandophone. Au début, ce fut très difficile de trouver un emploi, et les postes proposés étaient très mal payés. Xie a débuté dans un supermarché. Xie Da est ensuite intérrogé: "au début, j'ai travaillé très dur, ne gagnant que 80 dollars américains par mois, juste de quoi m'en tirer et payer mes appels téléphoniques en Chine. Rêvant d'une vie meilleure, Xie ne s'en est pas laissé abattre pour autant, il a alors quitté son emploi, et tenu tour à tour trois petits restaurants, ne connaissant le succès qu'avec le dernier. Puis il a lancé son propre supermarché. Persuadé que la vie au Suriname lui sourirait un jour ou l'autre ainsi qu'à sa famille, Xie n'a jamais cessé de prendre des risques. "Partout dans le monde, les migrants chinois ont d'abord recours au commerce de produits chinois bon marché comme moyen de survie, et finissent par accompagner la filière, tout en abandonnant les marché saturés et en évitant d'entrer en concurrence avec d'autres migrants chinois, selon le sinologue Tjon Sie Fat. Au fil des années, les magasins bon marché ont fait place à des établissements, restaurants, hôtels et casinos de grande envergure. "Avec le temps, ces migrants chinois finiront par s'éloigner de l'emplacement de leur première installation, essaimant d'abord autour de la périphérie de Paramaribo, puis vers les régions voisines fragiles sur le plan institutionnel et offrant les meilleures perspectives de marché : de la périphérie surinamaise à la Guyana, et à un degré moindre vers la Guyane française. La migration en chaîne est un modèle d'immigration selon lequel un migrant déjà installé recrute quelqu'un d'autre de sa région natale, habituellement un proche, pour venir travailler dans son entreprise. Sur place le nouveau migrant apprend les ficelles du métier tout en payant sa dette de parrainage, et éventuellement lance sa propre entreprise, recrutant à son tour de nouveaux migrants comme travailleurs. Selon Tjon Sie Fat, l'intrégration a opéré dans les deux sens. Depuis plus d'une décénnie maintenant, un marché chinois fonctionne dans la capitale Paramaribo, les nouveaux migrants ont amené de leurs nombreuses régions une grande variété de légumes, produits alimentaires et autres en-cas. "Prenez le marché chinois du dimanche, qui a été adopté par la population locale, la tolérance conduit à l'intégration, et dans ce cas, l'intégration conduit à la tolérance, créant un cercle vertueux".

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Marché chinois du dimanche, Paramaribo, mai 2009

Louis Autar n'est plus. Vous racontant ses quelques aventures dans un article précédent, je me demandais alors si j'étais capable de rentrer en contact avec lui via la toile...et c'est pourtant dans un vieux numéro de National Geographic de juin 2000 que j' en découvrais un peu plus sur ce feu spécialiste surinamien des tortues marines ! " Ainsi, la mère de Louis Autar a été amené "par contrat" depuis Java quand elle avait 15 ans. Récemment décédé, Louis était un spécialiste reconnu des tortues de mer géantes du Surinam. Il était né dans une plantation au bord de la rivière Commewijne appelée Het Vertrouywen (La confiance). Malgré ce nom prometteur, la vie des paysans n'avait rien de plaisant. Lors d'une visite chez lui, dans les faubourgs de Paramaribo, Louis m'a raconté sa jeunesse. Nous étions installé dehors, sur des chaises en plastique, et sirotions un soda à l'orange. Il parlait tantôt en hollandais, en anglais, tantôt en sranan tongo, une langue créole autant utilisée que le hollandais. " En 1917, après huit ans, ma mère a décidé de rester au Surinam et d'acheter trois lopins de terre. Elle avait réussi à économiser assez sur son salaire journalier d'un peu moins de 3 francs. Bien évidemment, ce n'était pas drôle tous les jours. On n'avait pas d'éléctricité et on ne buvait que l'eau de pluie. Je suis né à la saison sèche ; ma mère était obligé de me laver les dents à l'eau de mer." Louis était bon élève, mais ses parents n'avaient pas les moyens de l'envoyer au lycée. A 14 ans, il part s'installer sur la côte et s'improvise braconnier ; il dérobe les oeufs des tortues luths pour les revendre aux Javanais de Paramaribo, qui en sont très friands. Des années plus tard, il se fait prendre par les Hollandais. le jour même de son arrestation, les autorités lui proposent de travailler au Service des forêts, un des meilleurs, en ce temps-là, d'Amérique du Sud. Ils n'en revenaient pas que je connaisse si bien les tortues de mer, se rappellet-il. Protéger ces oeufs était largement plus lucratif que de les revendre illégalement. le Service m'a donné de l'argent pour construire un vivier. En tout, j'ai remis 16000 de ces tortues à la mer. Après l'indépendance, quand les militaires ont pris le pouvoir, on m'a coupé les fonds. Avec la montée de la mer, mon vivier n'est plus qu'un remblais de boue."

Un élément est également expliqué par Hebe Verrest: Paramaribo se compose de différents quartiers ou mixités sociale et ethnique sont fortes, sans réelles zones de non-droit et autres aires à totalement éviter. Même pour les touristes ?

13 avril 2014

Une souris et...Bennett, de la compétence interculturelle

Développer des compétences progressives sur les thèmes de l'expatriation, de la culture, de l'interculturel. Voilà un beau projet à mener dans ces temps où le chômage important en France peut inciter une personne demandeuse d'emploi à s'ouvrir à l'international. Cet article n'est que recopiage, une fois n'est pas coûtume. Après tout, l'écriture d'éléments purement recopiés est un outil pour apprendre.

Stéphane Talleux et Bertrand Fouquoire en parlent dans un des (nombreux) livres de la collection "la première fois" des éditions StudyramaPro, qui fournissent nombre d'ouvrages synthétiques et efficaces sur divers outils de travail à utiliser dans le cadre personnel ou professionnel. Leur sujet d'expertise: l'expatriation. Le thème du livre: "réussir ma première expatriation". Un des enjeux : anticiper le "choc" culturel. Pour cela, évaluer sa compétence interculturelle. Il est important de repérer où l'on en est de sa capacité à vivre dans une autre culture. La personne qui n'a pas éprouvé ce que recouvre la confrontation avec une autre culture peut minimiser ou maximiser son impact. Aussi, la génération Y (née depuis 1980) a vécu une entrée progressive dans l'international. A l'origine de cela: les classes européennes et leurs échanges scolaires, le programme ERASMUS, les stages à l'étranger imposés en post-bac. Mais aussi les réseaux sociaux, car ils permettent la gestion de liens nombreux et faibles en investissements de temps. On conserve les liens avec les personnes qui déménagent en France ou à l'étranger. Le Schéma chez les X était de s'expatrier pour une entreprise. A 25 ans, on pouvait se retrouver à travailler au Japon, sans avoir fait ses armes dans un pays européen. Les Y ont construit progressivement leur compétence interculturelle : d'abord dans des pays proches culturellement au collège (Angleterre, Allemagne, Espagne), puis dans des pays européens plus éloignés, pour aborder ensuite les autres continents. "Dans mon parcours d'ouverture et de découverte du monde, j'ai procédé par étapes : chaque étape me prépare à l'étape suivante. Je pense qu'il est difficile d'entrer en contact avec les locaux dès la première expérience. La démarche est progressive. Mais ce n'est qu'en se retournant qu'on se rend compte que chaque étape a permis la suivante. Je conseille de s'inscrire progressivement dans une démarche de mobilité internationale. J'ai commencé à Londres par échanger avec des gens qui ont voyagé. J'ai profité de leur expérience. J'ai réalisé que ce n'est pas sorcier, ce qui a enclenché mon départ. Je me souviens avoir été ébahie par une fille partie en Amérique du Sud et qui avait trouvé un travail très sympa là-bas : elle avait été obligée de trouver quelque chose car elle n'avait plus d'argent. En fait, quand tu es ouverte, et que tu te retrouves dans une situation d'inconfort, tu te mets à chercher et tu trouves. La plupart de ceux qui hésitent pour s'expatrier ne savent pas par quel bout prendre ce projet de partir. ça les fait rêver mais c'est finalement trop de remise en question", indique Justine, 24 ans. L'inscription dans une démarche de mobilité internationale a été directe pour une majorité de X, ce qui explique une mise sous contrôle et l'installation fréquente dans la bulle expatriée. Vigiliance chez les Y néanmoins : Erasmus est un premier pas, certes. Cependant, les conditions n'ont rien à voir avec un départ en solo à l'autre bout du Monde : le système Erasmus est une ouverture à un milieu de Y internationaux, non une intégration culturelle dans des conditions de travail avec des autochtones de toute génération. L'échelle de Bennett permet alors à toute personne d'évaluer son attitude dans une situation de confrontation à une autre culture (source: document de l'institut canadien du service extérieur, centre d'apprentissage interculturel)

BENNETT_SCALE2

Déni: le déni représente le plus bas degré d'ouverture face aux différences culturelles. On ignore tout simplement qu' elles existent, ou bien on les perçoit à un niveau très général : ce qui résulte d'un isolement physique ou social en rapport avec ces différences. En tant que telle, cette position représente l'ultime ethnocentrisme, où la propre vision du monde que l'on a, n'est jamais remise en question et est posée comme étant centrale à toute réalité. Une forme plus répandue de déni est ce que l'on nomme " l'esprit de clocher " ou une vision du monde plus ou moins étroite. Cet état d'esprit reflète un degré limité de contact avec les différences culturelles, ce qui se manifeste par de la gêne, ou par le fait qu'on trouve bizarre ce qui est différent. L'esprit de clocher se caractérise par l'utilisation de très larges catégories pour classifier les différences, ces larges catégories permettront aux différences d'être perçues de manière minimale et sans grand discernement. Un exemple d'une telle catégorie serait la reconnaissance que les Asiatiques sont différents des Occidentaux, sans reconnaître que les cultures asiatiques diffèrent entre elles. 

Défense: La défense, deuxième stade, représente un développement de la sensibilité par rapport au déni, parce qu'il est le résultat d'une perception assez forte des différences pour qu'elles soient menaçantes. La forme de défense la plus commune est celle du dénigrement des différences. On reconnaît généralement ce phénomène à l'élaboration de stéréotypes négatifs, où chaque membre d'un groupe culturel distinct se voit doté de caractéristiques indésirables qu'on voit doté à tout son groupe. Ce type de dénigrement est considéré ici comme un stade de développement et non comme un acte isolé. Une observation qui corrobore cette opinion est que les gens qui dénigrent un groupe en particulier sont également susceptibles de dénigrer d'autres groupes. Bien que le dénigreur puisse être mal informé, ce n'est pas l'ignorance qui explique sont attitude défensive, mais bien l'ethnocentrisme. Une autre forme du stade de défense est le postulat de supériorité culturelle. Plutôt que de dénigrer une culture, on présume simplement que sa propre culture est l'apogée de quelque projet évolutionnaire. Une telle manoeuvre insigne automatiquement à ce qui est inférieur un statut inférieur. C'est un stade où l'insécurité face aux différences est très grande, puisqu'elles laissent entrevoir la possibilité que notre culture ne soit pas la seule vision du monde possible. A une étape plus avancée de défense, on considère que les autres cultures sont tout simplement inférieures à la notre, sur un continuum dont nous sommes l'apogée.

Minimisation: ce troisième et dernier stade de fermeture face aux différences culturelles traduit un degré si intense d'expérience de la différence que l'individu qui le traverse cherche un refuge. Les personnes à ce stade recherchent une paix ou un confort qu'il est impossible de ressentir dans le stade de la Défense. A ce stade, on présuppose que toute l'humanité est régie par des principes communs de base qui guident les valeurs et les comportements. Les gens qui adoptent ce point de vue abordent généralement les situations interculturelles avec l'assurance qu'une simple conscience des patterns fondamentaux d'interaction humaine leur suffira pour assurer le succès de la communication. Un tel point de vue est ethnocentrique parce qu'il présuppose que les catégories fondamentales de comportement sont absolues et que ces catégories sont justement les nôtres ! Dans ce contexte, les différences ne sont que des variations sur un thème commun à toutes les cultures. A ce stade, les différences culturelles sont reconnues et tolérées jusqu'à un certain point. Par contre, ces différences sont perçues comme étant superficielles, ou comme pouvant constituer un obstacle à la communication. Cela se comprend du fait qu'à ce stade, on présume que la communication repose nécessairement sur un ensemble commun et universel de règles et de principes. Bien qu'à ce stade on démontre plus de sensibilité culturelle qu'aux stades précédents, on ne peut pleinement entrer dans la compréhension interculturelle comme le prétendent les gens qui traversent ce stade.

Acceptation: entre le stade de minimalisation et d'acceptation se fait un embrayage qui change radicalement l'attitude des gens face aux différences. Ce passage est marqué par une nouvelle manière de voir les cultures comme étant fluides et dynamiques, plutôt que rigides et statiques. Cette transition se  caractérise par un passage de la vision des différences comme des choses à la vision des différences comme des processus. D'un point de vue ethnorelativiste, les gens n'ont pas un comportement mais plutôt ils se comportent. Plus profondément, les gens n'ont pas de valeurs, mais plutôt ils valorisent quelque chose. Cette réinterprétation subjective permet d'éviter une vision statique de la culture telle que définie par Hall. A ce stade, les gens sont également perçus comme étant en quelque sorte co-créateurs de leur propre réalité. Cette vision de la réalité culturelle comme à la fois consensuelle et muable (en mouvement) constitue la base de l'ethnorelativisme, et est donc nécessaire à un plus grand développement de la sensibilité interculturelle. Il est possible à ce stade de concevoir d'autres cadres de référence culturelle que le nôtre, bien qu'on ne les comprenne pas toujours dans toute leur complexité. Les gens qui sont au stade de l'acceptation cherchent à explorer les différences et ne les perçoivent plus comme menaçantes. Ils acceptent le fait que des gens puissent avoir des cadres de référence culturels différents des leurs, et se réjouissent de ce fait. On les reconnaît à leur questionnement avide des gens de l'autre culture, qui traduit une volonté réelle de s'informer, et non pas de confirmer des préjugés. Le stade de l'acceptation souligne une ouverture dans sa vision des différences. Le mot-clé de ce stade est connaître ou apprendre.

Adaptation: accepter les différences culturelles comme non-figées permet d'y adapter son comportement et sa pensée. La capacité de modifier temporairement sa vision habituelle des choses constitue le coeur de la communication interculturelle. En contexte interculturel, changer ainsi sa façon de traiter la réalité témoigne d'une augmentation de la sensibilité culturelle. La forme la plus commune d'adaptation est l'empathie. L'empathie implique un changement temporaire des cadres de référence, où l'on perçoit des situations comme si l'on était l'autre personne. Lorsque cette autre personne utilise une vision du monde passablement différente de la notre, l'empathie se rapproche d'un changement de vision culturelle. Généralement, l'empathie est partielle, s'étendant seulement aux domaines pertinents à la situation de communication. Le comportement empathique se manifeste par des actions qui sont plus appropriées dans la culture cible que dans sa propre culture. Ces actions peuvent être simplement mentales,tel que le fait de formuler des questions acceptables, ou elles peuvent inclure la capacité de générer des comportements verbaux et non-verbaux coordonnés qui sont perçus comme étant appropriés par un membre de la culture cible. Adaptation aux différences culturelles suit l'Acceptation et souligne un changement au niveau de manières d'agir des personnes. Les gens qui traversent ce stade comprennent le cadre de référence de l'autre culture et sont capables d'agir en conséquence : ils sont en mesure d'empathiser avec les gens de l'autre culture. A ce stade avancé d'adaptation, les gens sont des pluralistes culturels, puisqu'ils sont capables de fonctionner dans plus d'un cadre de référence culturel. Ils sont devenus capables de faire spontanément le décodage des normes et valeurs qui expliquent un comportement dans sa logique culturelle. Le pluralisme culturel peut être également vu comme une capacité devenue habituelle d'empathiser. En résumé, l'adaptation aux différences en tant que stade de développement de la sensibilité interculturelle se traduit par l'habileté d'une personne à agir de façon ethnorelative. Cette habileté d'agir hors de son cadre culturel est basé sur une vision dynamique des différences, et est au coeur de la communication interculturelle. D'autres formes de comportements adaptifs, telles l'assimilation ou le pluralisme né de long séjours en cultures étrangères, peuvent sembler de la sensibilitéinterculturelle, mais en soi, elles relèvent plutôt d'une forme de mimétisme et n'ont pas la base développementale nécessaire à l'ethnorelativisme. Ce stade traduit un sentiment de sécurité par rapport à sa culture d'origine : on peut s'adapter sans se sentir menacé. Le mot-clé de ce stade est comprendre.

Intégration: l'intégration est le dernier stade d'ouverture face aux différences culturelles. C'est le sens qui sous-tend la description qu'Adler fait de la personne multiculturelle : cette personne n'est pas simplement la personne sensible à plusieurs cultures différentes. C'est plutôt la personne qui est constamment en train de devenir une partie de et qui se sent en même temps en dehors d'un contexte culturel donné. Elle se développe seulement après des séjours prolongés dans plusieurs endrois où l'on est mis en contact avec d'importantes différences culturelles. Dans le langage de ce modèle, une personne qui a intégré la différence est celle qui peut percevoir les différences en tant que processus, qui peut s'adapter à ces différences et qui, en plus, peut définir sa culture de plusieurs façons différentes. Une aptitude de la sensibilité culturelle à ce stade est l'habileté d'évaluer un phénomène en regard d'un contexte culturel donné. Cette aptitude, appelée évaluation contextuelle, permet de reconsidérer les jugements qu'on avait suspendu au stade de l'acceptation sans toutefois tomber dans l'ethnocentrisme. C'est en regard de tel ou tel cadre de référence culture qu'on évaluer les actions. La même action peut donc être jugée potentiellement " bonne " (culture A) ou " mauvaise " (culture B). En termes d'éthique individuelle, cela implique que les actions sont évaluées par rapport à un contexte culturel qu'on a soit même établi. A ce stade, l'individu intègre plusieurs cadres de référence dans sa propre manière d'être. Son système de valeur est extrait de ces différents cadres culturels, mais il n'en adopte aucun tout entier. Le fait qu'une personne ne s'identifie de manière absolue à aucune autre culture peut être positif. Cette marginalité constructive peut devenir un précieux outil en médiation culturelle. A ce point culminant de la sensibilité interculturelle qu'est le stade de l'intégration, une personne vit les différences culturelles comme un aspect essentiel et réjouissant de la vie.

Stratégies d'évolution d'un stade à un autre: Bennett propose aussi des stratégies d'évolution afin de favoriser les transitions d'un stade au suivant. En voici un résumé. Du déni vers la défense : une prise de conscience des différences ; De la défense à la minimisation : dépolariser les jugements négatifs, introduire les aspects positifs communs à toutes les cultures, voir les similitudes ; De la minimisation à l'acceptation : se rendre compte de l'importance des différences culturelles ; De l'acceptation à l'adaptation : encourager l'exploration intensive et la recherche (questionner pour connaître l'autre cadre culturel) ; De l'adaptation à l'intégration : tout ce qui permet de développer sa capacité d'empathie avec l'autre culture ainsi que sa capacité de communiquer interculturellement ; de l'intégration sans désintégration : préciser ou définir un cadre d'éthique personnel, servir de médiateur culturel où le fait de ne s'identifier complètement à aucune culture en particulier sera considéré comme un atout et non une faiblesse.

Maintenant,il ne reste plus qu'à utiliser cette échelle pour continuer à mûrir cette compétence et alimenter ce blog en présentant des anecdotes vécues ou entendues !

30 novembre 2013

Une souris et...Louis Autar, Suriname, années 60

Louis Autar ne m'est pas connu, peut-être n'est-il même plus de ce monde, mais la lecture récente d'une publication sur les effets létaux et non létaux de la prédation des tortues marines adultes m'invite à écrire de nouveau sur ce thème. Voilà 4 ans que je suis rentré de Guyane, mais la magie d'internet ou des livres me permet de continuer à mûrir ma connaissance et compréhension du plateau des Guyanes, qui va du Vénézuela au Nord du Brésil. Un des outils de travail très utile est l'acquisition d'un niveau d'anglais bilingue (dans le sens : non-gênant dans aucune situation), qui donne accès à une multitude d'études et ouvrages de grande qualité sur la région. L'expérience bénévole de l'époque, 4 mois sur le projet de conservation des tortues marines géré par l'association Kwata en 2009 me permet aussi de continuer, petit à petit, à apprendre sur la conservation de ces espèces. Non pas que j'en ai besoin dans mes activités quotidiennes depuis 4 ans, mais c'est un sujet intéressant car il touche à la fois à des espèces emblématiques des mers et océans, à des enjeux écologiques importants pour les habitants des littoraux, et à des problématiques internationales, certains specimens de tortues luth se retrouvant sous des lattitudes variées. Et puis, en tant qu'adhérent "passif" de l'association Kwata, qui met en oeuvre le programme de conservation des tortues marines au niveau de l'île de Cayenne, il est intéressant de lire ponctuellement quelques publications scientifiques produites soit par l'association, soit par d'autres structures...d'autant plus qu'il est possible de bien visualiser les expériences décrites.

MARINE TURTLES

Suivi télémétrique de 16 tortues vertes sur le plateau des Guyanes par le WWF, 2012

Ces lectures ont aussi l'utilité professionnelle de maintenir des compétences qui s'en iraient au fond du tiroir, du fait de l'obligation de spécialisation poussée générée par le marché du travail: les métiers de l'ingénierie de l'environnement, comme beaucoup d'autres, nécessitent de se spécialiser pour pouvoir obtenir des projets et financements dédiés; toutefois, le bénévolat associatif est un formidable outil pour s'ouvrir à de nouvelles thématiques et développer des compétences permettant d'agrandir son employabilité. Ainsi, comprendre progressivement comment est mis en oeuvre un programme de conservation de la Nature ainsi que les méthodes et technologies utilisées ne servira pas à mon champ de compétences actuel, mais pourra peut-être un jour être utile professionnellement, qui-sait ! La vie professionnelle est encore très longue, quand on est en début de trentaine...

Pour en revenir à Louis Autar, c'est donc grâce à la magie d'internet et de l'anglais bilingue que je lisais, en cette pâle matinée du 30 novembre 2013, son retour d'expériences sur les attaques de tortues marines par les jaguars au Suriname. En fait, son expérience est relatée ici, mais, la trouvant stimulante, je la traduis sur ce blog.

Sea Turtles Attacked and Killed By Jaguars in Suriname

Louis Autar, 1994

Marine Turtle Conservation Program, Surinam Forest Service, P. O. Box 436, Paramaribo, Suriname

" En 1963, la plage Bigisanti dans la réserve naturelle Wia Wia, au Suriname, était un site de ponte de quatre espèces de tortues marines: verte (Chelonia mydas), luth (Dermochelys coriacea), olivâtre (Lepidochelys olivacea), et imbriquée (Eretmochelys imbricata). En août de cette année, Je suis allé à Bigisanti durant une semaine. Là, je découvris trois tortues mortes: deux vertes et une luth. Elles avaient été tuées par un jaguar. La tortue luth et une des tortues vertes avaient été tuées depuis environ une semaine, mais l'autre tortue verte était encore fraîche. Je remarquais que la dernière carcasse était entourée d'urubus noirs, et que cette dernière tortue avait encore des oeufs dans son ventre. J'étais curieux, et sortis les oeufs du ventre de la tortue verte. Alors que j'avais sorti l'ensemble des oeufs dans un sac, les vautours s'envolèrent soudainement. Je me demandai ce qui avait effrayé les oiseaux. Lorsque je me retournai, je vis un jaguar (Panthera onca) me regardant à deux mètres. Alors que j'étais accroupi, je me sentis piègé. Je laissai le sac rempli d'oeufs et me déplaçai centimètre par centimètre. J'étais chanceux de voir que le jaguar resta où il était, mais il continua à me regarder alors que je reculais. La plage était d'une largeur de 60 mètres, et quand j'étais à environ 5 mètres du jaguar, Je bondis et courus vers la mer. Après environ 1h30, je retournais vers la tortue morte. Je fis beaucoup de bruits, mais le jaguar apparu encore. Après avoir attrapé le sac d'oeufs, je courus en direction de mon camp. 

Pendant plusieurs années après l'incident, j'ai enregistré le nombre de tortues mortes attaquées et tuées par les jaguars sur les plages du Suriname. (n/r = not recorded that year):

MARINE TURTLES COUNT

Comptage des attaques de tortues marines par les Jaguars sur les sites de ponte du Suriname, par Louis Autar Krapé: verte ; Aitkanti: luth; Warana: Olivâtre

Je suis certain que des morts additionnelles ont eu lieu en 1973; toutefois, les carcasses n'ont jamais été trouvées. 

Le problème est persistant. Henri Reichart (Conseiller Technique Senior, Suriname Forest Service) a compté 13 tortues vertes tuées sur la place Galibi (est de Bigisanti) dans l'intervalle de quelques jours en 1980. De 1980-1981, environ 200 vertes de trois ans furent tuées et mangées par deux jaguars, un mâle et une femelle. En l'espace de quelques semaines après avoir découvert cela, les deux jaguars furent tirés et tués. La décision de tuer un jaguar n'est jamais facile, mais parfois il n'y a pas de choix. Les jaguars sont protégés des chasseurs au Suriname et leurs populations sont considérées comme en bonne santé."

12 juin 2013

Une souris et...Kathrin, immergée en culture francophone

Kathrin était volontaire sur le chantier international de Guissény, dans le Finistère Nord, en juillet 2010. A l'heure d'Internet et de ses réseaux sociaux, il est facile de garder contact, et c'est en Suisse, à Lausanne, que je la revois en cette journée d'automne 2012. Allemande de nationalité, elle est maintenant en échange Erasmus à l'Université de Lausanne (UNIL), dans le champ des langues étrangères et de la traduction. A 21 ans, elle parle couramment l' Allemand, le Français et l'Anglais. Nous reparlons de ce volontariat à Guissény, et des stéréotypes qu'elle pouvait avoir des français: arrogants, fiers, fermés à l'apprentissage d'autres langues, systématiquement en grève. La France était alors associée à la gastronomie, la baguette, le croissant, le vin, Paris, la tour Eiffel, les châteaux. Par définition, les stéréotypes constituent un ensemble de traits censés caractériser ou typifier un groupe, dans son aspect physique et mental, et dans son comportement. Cet ensemble s'éloigne de la réalité en la restreignant, en la tronquant et en la déformant. L'utilisateur du stéréotype pense souvent procéder à une simple description, en fait il plaque un moule sur une réalité que celui-ci ne peut contenir. Le stéréotype est simplication: la réalité est simplifiée avec pour résultats non pas une clarification mais une mise à l'ombre d'éléments essentiels à la compréhension. Le stéréotype est aussi généralisation: un individu appartenant au groupe cisé se verra appliquer d'office le même schéma de comportement, de mentalité, de qualités ou de défauts. Stéréotyper revient à utiliser le même concept ou groupe de concepts pour définir les éléments d'une catégorie, sans se soucier des exceptions ou se demander dans quelle mesure le contenu du stéréotype ne s'appliquerait pas justement aux exceptions elles-mêmes. Stéréotyper est ainsi un comportement particulièrement dangereux, une supposition sur un groupe de personnes ne correspondant souvent à aucune réalité.

2012 12 01 Les Diablerets-5410

Kathrin "de la digue"

Dans le cadre d'un de ses cours à l'UNIL, Kathrin doit tenir à jour un journal d'observation, dont le but est consigner ses expériences de la vie quotidienne en milieu francophone: quelque-chose de culturel étonnant, problématique, incompréhensible, amusant etc. Il lui est demandé de décrire de façon aussi précise que possible la date, le contexte général, la situation exacte etc; et de noter ses réflexions, interrogations et hypothèses. Son lieu d'observation: le métro de Lausanne: "j'ai choisi le métro pour faire des observations et révéler des règles implicites. Le métro est un lieu où les gens sont confrontés à une situation de rencontre avec des gens inconnus. Ils sont souvent proches des autres, plus proches par exemple que dans un café ou dans un restaurant. C'est la raison pour laquelle j'ai choisi le métro. En plus, je prends souvent le métro et pour cela je trouve qu'il est intéressant d'observer un lieu auquel je ne fais normallement pas attention." Kathrin continue: "j'ai pris le métro M1 au Flon pour aller à Renens-Gare. Puis, je suis restée dans le métro pour aller dans l'autre direction. Beaucoup de gens ont lu, d’autres ont écouté de la musique par leur lecteur MP3 ou ont écrit des messages par leur portable. Il y avait des gens qui ont parlé, mais ils n'ont pas parlé d'une voix forte. Certes, parfois les regards des gens se sont croisés, cependant ils n'ont pas regardé dans les yeux de l'autre pendant longtemps. C'est pour cela que je pense que la règle implicite la plus importante dans le métro est de ne pas déranger les autres voyageurs. Toutes les choses qui pourraient déranger quelqu'un sont évitées par les gens, elles sont « interdites »  par les règles implicites : crier, courir, fixer quelqu'un avec des regards ce qui est considéré comme impoli ici. Au cas où il y avait des gens devant la porte, ils se sont écartés quand quelqu'un d'autre voulait sortir. Quand le métro s'est arrêté et les portes se sont ouvertes, les gens sur le quai ont laissé sortir les gens dans le métro. Je pense donc que les voyageurs sont « obligés » de faire attention aux autres. En outre, les gens ont parlé seulement aux gens qu'ils connaissent déjà, ils n’ont pas parlé aux inconnus. J'étais assise sur une place au milieu d'une rangée de trois places avec une rangée identique de trois places libres juste en face. Le premier qui est entré a choisi une place de la rangée en face. C'est pour cela que je pense que chaque personne qui entre toute seule dans le métro reste seule."

L'apport d'une expérience de mobilité internationale dans le cadre d'un programme d'échange du type Erasmus, d'un volontariat ou d'un stage à l'étranger est qualifié et quantifié par plusieurs études, comme celle-ci, publiée par Behrnd et al. (2012). Des expatriations courtes d'un an, si elles sont conduites dans une démarche positive et constructive, permettent, lors d'un retour au pays, de pouvoir développer et intégrer nombre d'acquis liés à l'interculturel. Dans cette logique, il est alors intéressant de lire ce genre d'études, qui proposent qui plus est une revue de littérature en première partie. Ainsi, on y apprend donc que la compétence interculturelle est améliorée en s'expatriant pour des études ou des stages, de manière plus importante que d'autres compétences, telles que des compétences sociales ou personnelles. En s'expatriant, une personne améliore en général son auto-adaptation, ses prises d'initiatives et de décisions, ou encore sa flexibilité. D'autres études montrent qu'une expatriation d'un an apporte plus qu'une expatriation de quelques mois. Alors que le premier objectif de l'étudiant(e) s'expatriant dans le cadre de ses études est l'acquisition d'une langue étrangère, une fois installé dans un autre pays, les différences et nuances culturelles sont observées lors du socializing ou des colocations. Enfin, il est très intéressant de noter que plusieurs études soulignent une grande différence entre le fait de s'expatrier avec ou sans préparation. Du fait des challenges sociaux et psychologiques générés par une expatriation, certains auteurs mettent en avant le besoin de programmes de support et d'orientation pour les étudiants s'expatriant. Pour conclure, les expatriations d'un an peuvent permettre à des personnes novices de se lancer dans le développement d'une compétence puis une expertise sur l'interculturel...pour pouvoir mieux repartir !

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Une Souris et des Hommes
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